CHRONIQUE PAR ...
Winter
Cette chronique a été mise en ligne le 01 juin 2021
Sa note :
19/20
LINE UP
-Robert Del Naja
(chant+claviers+programmation)
-Grant Marshall
(chant+claviers+programmation)
-Andrew Vowles
(chant+claviers+programmation)
TRACKLIST
1) Angel
2) Risingson
3) Teardrop
4) Inertia Creeps
5) Exchange
6) Dissolved Girl
7) Man Next Door
8) Black Milk
9) Mezzanine
10) Group Four
11) (Exchange)
DISCOGRAPHIE
L’été 1998 était chaud à Paris, je m’en rappelle bien. La victoire de Zidane et ses amis avaient considérablement chauffé l’ambiance, mais à titre beaucoup plus personnel, l’été 1998 c’était l’été Mezzanine. Une chaleur moite étouffante, accentuée par l’écoute répétée à l’envi d’un CD à la pochette de scarabée, lancinant, noir, réalisé par un trio aux relations parait-il tendues (je n’étais pas là pour le constater, je me fie à ce qu’en on dit les media, ce qui est toujours hasardeux), un album frôlant la perfection. Un album qui mérite totalement sa place dans un webzine comme le nôtre.
Del Naja et ses comparses n’ont pas enfilé des pantalons moulants à rayure rouge et noir et sorti les patches Twisted Sister, non. Mais après deux (excellents) albums d’influences rap, funk, soul, dance, etc., etc. Massive Attack durcit son propos. « Muscle ton jeu, Robert ! », Del Naja a dû le prendre pour lui et suit à la lettre les consignes de Saint Aimé Jacquet. On range les couleurs et on sort le noir et blanc, le scarabée noir n’est pas là par hasard. On sort les beats hypnotiques et les samples de guitares ("Angel", "Dissolved Girl") et on fait appel à l’immense Elizabeth Frazer ("Teardrop", "Black Milk", "Mezzanine",…). La tournée qui suit mettra en évidence le peu d’impact vocal de Mme Cocteau sur scène, mais sur l’album c’est un délice. Que reste-t-il des plans hip-hop et soul ? Vraiment pas grand-chose. "Exchange" et sa reprise en mode outro, "Man Next Door" (et les vocaux si typiques de Horace Andy si prompts à faire hérisser le poil de tout fan de growl), et c’est tout. Et encore, ces chansons n’invitent pas franchement à la danse… Pour le reste, le trip-hop de Massive Attack est sec, ultra sobre et envoûtant, il invite le doigt à appuyer encore et encore sur la touche « Replay ».
Le duo initial "Angel", "Risingson" ordonne au cerveau de se plonger dans un état d’hébétude immédiat, toute affaire cessante. Elizabeth a pu réveiller nos sens endormis avec ses douces plaintes sur "Teardrop" ? Qu’à cela ne tienne, "Inertia Creeps" mérite bien son nom : Mezzanine est un démon rampant. Et pour ceux qui auraient encore résisté aux pouvoirs lancinants de cette merveille, le tryptique final "Black Milk", "Mezzanine" (à la limite de l'indus), "Group Four" finit le travail de manière magistrale, à tel point que la guitare de "Group Four" pourtant peu musclée fait plus d’effet que bien des riffs graisseux qui traînent dans les chroniques du site. Que dire d’autre ? Que le duo vocal Del Naja / Marshall (ah Grant Marshall, quelle voix t’a donné le bon Dieu…) fonctionne à merveille ? Oui. Qu’on tient ici l’œuvre maîtresse du groupe de Bristol ? Sans aucun doute : 100th Window est bien plus inégal, quant à Heligoland, il s’agit plus d’un ensemble de morceaux (parfois excellents) que d’un réel album. Les amateurs de feeling plus black (non, pas black metal !) préfèreront peut-être Blue Lines et/ou Protection, mais vu d’une perspective Eternelle, je confirme : sans aucun doute.
Sur mon lecteur, Mezzanine détient le record absolu d’écoutes tout genre confondu et ce dernier n’est pas prêt d’être battu. Normal, n’est pas né l’album qui saura prendre l’essence du trip-hop, lui enlever tout espoir et la noircir de la sorte. Mezzanine est à Protection, ce qu’Angel Dust est à Epic. Une progression, rampante et sombre, qui ne demande qu'à vous lécher l'oreille et à s'installer dans votre cerveau. Brrrr… j’en ai encore la chair de poule…