Ayreon

Entretien avec Arjen Lucassen (compositeur) - le 30 novembre 2007

2
Cosmic Camel Clash

45
Struck

Une interview de




Ayreon_20071130

Effervescence dans les chaumières : Ayreon sort un nouvel album, et un double qui plus est ! Subtilement nommé 01011001 (chronique ici), ce nouvel opus rassemble comme d'habitude le gratin vocal des scènes métal et prog, et comme d'habitude il s'agit d'un concept-album basé sur un univers de science-fiction. Le maître d'oeuvre Arjen Lucassen étant toujours aussi incroyablement bavard (et grand!), la déjà légendaire équipe CCC / Struck ne fut pas de trop pour recueillir ses propos lors de cette très longue interview réalisée en partenariat avec nos éminents confrères de Music Waves. Première partie !


Struck : Avant que l'album ne sorte, tu as titillé la curiosité des fans avec l'identité des invités. N'est-ce pas étrange de les mettre en avant plutôt que le contenu musical de l'album ?

Arjen Lucassen : Tu fais référence au concours du chanteur mystère qui a eu lieu sur le site officiel... c'était une blague au départ. Nous avions enregistré avec notre première chanteuse et le résultat était nickel... et nous nous sommes dit « Pourquoi ne pas poster ça sur le site et laisser les gens deviner de qui il s'agit ? Ça sera marrant. ». Nous avons donc posté sa voix sur le site... et tout autour du monde, des gens ont commencé à soumettre des noms ! Nous avons recommencé avec le deuxième interprète et ça s'est étendu partout : on en a parlé sur Blabbermouth (ndCCC : célèbre site de news et de ragots métal), tout le monde votait et il a y a une masse de gens qui se sont inscrits sur le forum pour prendre part au truc. Et ce jeu me plaisait : je collais un extrait avec Steve Lee... et qui s'attendrait à voir Steve Lee sur un album d'Ayreon ? Je me disais « celui-là, personne ne le trouvera » et quelque part dans le monde quelqu'un a trouvé, en une demi-heure. C'était juste un truc très cool à faire, une super manière de faire participer les gens au projet.

Photo
Struck : Et combien de personnes ont participé, en gros ?

Arjen Lucassen : C'est très dur à dire... mais énormément. Tu te rends compte que tous les chanteurs ont été identifiés en moins de vingt minutes, même les inconnus ? Même les guitaristes et les claviéristes ? Tomas Bodin des Flower Kings a été trouvé en moins d'une heure... c'est très dur de dire combien de gens ont participé, je sais juste que ça a très bien marché. Et je ne me suis pas vraiment préoccupé des conséquences, je n'ai pas pensé que ça pourrait nuire au projet si telle était ta question.

Struck : À la base c'était plus une blague qu'un acte commercial...

Arjen Lucassen : Oui mais au final ça a eu un impact commercial certain (rires) ! Ça aurait pu être un plan de maison de disques ! En fait nous sommes partis de quelque chose de tout petit et c'est devenu énorme, surtout quand des noms comme Hansi Kürsch, Jorn Lande et Daniel Gildenlöw ont commencé à faire surface. Les gens se disaient « wow, les choses se passent à fond ! ».


Struck : Avoir tellement de chanteurs, est-ce que ça ne rend pas le scénario plus complexe et le concept moins fluide ?

Arjen Lucassen : En fait ça a été assez difficile cette fois-ci car au départ je voulais faire un projet avec quatre ou cinq chanteurs. Donc je leur ai envoyé des e-mails et personne ne m'a répondu. Alors j'ai envoyé une autre volée d'e-mails, cette fois-ci à dix-quinze chanteurs en tout, puis à vingt... et pas une seule réponse. Je me disais « Oh merde Ayreon n'intéresse plus personne... ». Et d'un seul coup, en une semaine de temps, quinze chanteurs m'ont répondu qu'ils étaient motivés ! Je me suis retrouvé avec quinze chanteurs sur les bras du coup. Et on ne peut pas dire à un chanteur « Bon ben finalement je n'ai pas besoin de toi. » quand on l'a démarché à la base. Donc ce qui était initialement prévu comme un simple album est devenu un double et avant que je ne réalise vraiment tout ça est devenu beaucoup plus gros que ce que j'avais anticipé. Il a fallu que j'écrive une histoire qui convienne à toutes ces voix, et j'ai créé cette histoire où dix des dix-sept chanteurs appartiennent à une race alien appelée Forever et les sept autres incarnent des humains. D'une certaine manière tout ça se tient très bien : ça fonctionne dans les chansons et c'était censé se dérouler comme ça dès le départ. En fait ça n'a pas été réellement compliqué : la partie compliquée a été de trouver la bonne place pour chaque chanteur, mais une fois ça défini tout a fonctionné comme prévu.

Struck : Est-ce que les histoires de science-fiction et les space-operas te donnent plus de liberté en tant que songwriter ?

Arjen Lucassen : Mmmh... (réfléchit) oui, car c'est une manière de raconter des histoires en étant très critique à propos de ce qui se passe dans le monde sans se retrouver à prêcher directement. Présenter un discours critique sous la forme d'une histoire de science-fiction permet aux gens qui ne veulent pas lire entre les lignes de ne pas le faire, ils peuvent se contenter de lire une chouette histoire. Prends Star Trek : on peut regarder les épisodes et les apprécier en tant que tels mais il y a toujours un message derrière, qu'on peut choisir de considérer ou pas. C'est en gros ce que je voulais faire : je pensais à toute la merde qui arrive dans le monde et qu'on peut voir tous les jours à la télé. Tel groupe croit en tel dieu, tel autre groupe croit en tel autre dieu et ils se battent car ils veulent que tout le monde croie au même. Ca n'a aucun sens ! Et on regarde la télé, on voit tout ça se produire et pour nous c'est déjà devenu normal. Mais je me demande toujours ce que penserait un extra-terrestre qui regarderait notre planète : une planète parfaite, toute cette eau, les substances les plus rares de la galaxie, le soleil pile à la bonne distance, tout est magnifique... que penseraient-ils en nous voyant ? « Mais qu'est-ce que vous faites, là ? Et pourquoi ? »(rires). Si on met tout ça dans un concept de science-fiction on peut le faire sans être ridicule, et c'est pour ça que j'utilise cette approche plutôt que de partir dans la critique sociale directe où on prêche, « Vous devez vous amender »... car je déteste ça dans la musique en général. Mais j'aime quand il y a plusieurs niveaux de lecture.

Cosmic Camel Clash : Tu viens de dire que tu as écrit l'histoire autour des chanteurs et pas le contraire. Or 01011001 est la suite d'Into The Electric Castle... était-ce donc voulu depuis le début ou est-ce arrivé en cours de route ?

Arjen Lucassen : Je commence toujours par écrire la musique, puis je laisse la musique m'inspirer pour l'histoire. Cette fois-ci ça sonnait très spatial, avec tous ces synthétiseurs et cette atmosphère très sombre et glauque... donc je savais que ça devait être une histoire de science-fiction et que ça devait être assez sombre. L'histoire d'Into The Electric Castle est très simple en fait, c'est un album très bateau si on y regarde de plus près : ça parle d'amour, d'aliens et d'un château électrique ! C'est assez bébête en fait, tout en étant mignon : il y a ces aliens de la race "Forever" qui vivent sur la planète Y et ont perdu leurs émotions. Donc on se demande à quoi cette planète ressemble et pourquoi leurs émotions ont disparu... se pourrait-il qu'il y ait un lien avec le fait qu'ils soient devenus dépendants de la technologie comme nous le sommes devenus ? Je le vois autour de moi : les gens sont devenus dépendants de la technologie et tout va extrêmeent vite, on est dans une logique d'accélération et d'amélioration continuelle. Je voulais lier ces deux choses, et j'ai oublié ta question (rires).
Photo

Cosmic Camel Clash : (rires) Quand as-tu réalisé que tout ça allait être la suite d'Into The Electric Castle ?

Arjen Lucassen : Je me suis dit que ça pourrait être cool d'expliquer comment tout ça était arrivé, comment les émotions avaient disparu, ce qui s'était passé. La base du concept était celle-là, puis j'ai dégoté tous ces chanteurs et j'ai écrit l'histoire précise autour d'eux. Je fais toujours les choses dans ce sens-là : si on le fait dans l'autre sens on est trop limité.

Cosmic Camel Clash : Sur la chanson "Web Of Lies" qui traite des relations sur Internet, les personnages joués par Simone Simons (Epica) et Phideaux Xavier (Phideaux) portent les noms de leurs interprètes. Jouent-ils leur propre rôle ? L'ambiguité entre interprète et personnage fait-elle partie du concept ?

Arjen Lucassen : Non. Je me suis juste dit que ce serait amusant... j'ai dix aliens sur l'album, et sept humains. Je déteste devoir inventer des pseudonymes, je ne sais pas pourquoi. Et même pour les aliens : appeler tel alien Ziltoïd (rire général), tel autre je ne sais pas quoi... ça me gonfle, je trouve systématiquement le résultat ridicule. Donc les aliens n'ont pas de nom mais des symboles, et chaque chanteur a pu choisir son symbole. Par exemple Steve (Lee) a choisi le yin-yang, Jorn (Lande) voulait un corbeau... et pour les humains je me suis dit que plutôt que d'inventer des noms ils pouvaient utiliser les leurs. Mais ils ne jouent pas leurs propres rôles : Simone est une jeune fille magnifique et elle n'a pas besoin de draguer sur Internet, elle a déjà suffisamment d'admirateurs à la base (rires).

Struck : Tu viens d'évoquer Ziltoïd, et durant une interview que nous avions réalisée avec Devin Towsend...

Arjen Lucassen : (le coupant) Vous avez interviewé Devin Townsend ? Ca a dû être intéressant...

Cosmic Camel Clash : Oui, c'était justement pour la promotion de Ziltoid The Omniscient...

Struck : Il nous a donc dit qu'il préférait la voix de Céline Dion à celle de James LaBrie (Arjen rit). Serait-il envisageable d'entendre un jour Céline Dion sur un album d'Ayreon ?

Arjen Lucassen : Jamais de la vie (rires) ! Je ne l'aime pas du tout. Mais il devait blaguer, non ?

Cosmic Camel Clash : J'ai bien peur que non en fait.

Struck : Il nous a dit que la voix de James LaBrie ne le touchait pas du tout.

Arjen Lucassen : Possible. Mais je ne l'emploierai jamais... je ne sais même pas son nom. Je ne veux pas le prononcer (rires). C'est vraiment très mainstream. Ce n'est pas à cause de sa personnalité, c'est juste que ce type de musique entre par une oreille et sort par l'autre. Ca ne me touche pas, mais alors pas du tout. J'espère que vous n'êtes pas fans.

Struck : Est-il envisageable de voir un jour des chanteurs français sur un album d'Ayreon ?

Arjen Lucassen : J'adorerais ça, oui : sur le dernier album j'ai des chanteurs qui viennent de partout dans le monde mais aucun Français. Le problème c'est que je n'en connais aucun. Je n'ai aucun chanteur masculin hollandais non plus d'ailleurs. C'est bizarre... tu peux m'en citer quelques chanteurs français ?

(s'ensuit une énumération CCCienne où les noms de Hreidmarr, Joe Amore, Joe Duplantier et Julien Cassarino sont évoqués)

PhotoStruck : Pourquoi invites-tu tant de chanteurs métal d'ailleurs ?

Arjen Lucassen : J'invite plein de chanteurs, mais en fait je n'arrive pas à convaincre des vocalistes en dehors des scènes métal et prog. Car « prog » et « métal » sont encore des gros mots : si j'essayais de démarcher Céline Dion elle se braquerait dès que j'évoquerais ces genres. Pourtant la notion de progressif est liée à celle d'ouverture et d'absence de limites, on peut tout tenter. Donc je continue d'essayer de démarcher des gens : j'essaye à chaque fois d'obtenir Kate Bush, Peter Gabriel, Ian Anderson (Jethro Tull), etc... je continue de tenter de les convaincre mais c'est toujours non.

Struck : Comment convaincs-tu les chanteurs en général de participer à tes projets ?

Arjen Lucassen : S'ils connaissent ma musique c'est facile : beaucoup de chanteurs apprécient ce que je fais et participent à cause de ça, ils me disent même qu'ils sont honorés d'y participer. Il y a aussi beaucoup de gens qui me démarchent : James LaBrie m'a fait savoir qu'il adorait Ayreon et qu'il voulait participer par exemple, ce qui est une manière géniale de procéder. Convaincre des chanteurs qui ne connaissent pas ma musique est très difficile, surtout les gros noms. Ce n'est pas facile de les atteindre, il faut passer par les maisons de disques car on ne peut pas les contacter directement. Ce genre de chanteurs représente la réelle difficulté car ils refusent purement et simplement de prendre part au projet.

Struck : Tu les payes pourtant... pas assez peut-être ?

Arjen Lucassen : Oui je les paye, et s'il le fallait je les paierais suffisamment. Je paierais David Bowie vingt mille euros sans sourciller pour qu'il apparaisse sur un de mes disques. Mais quelqu'un comme lui ne travaille pas pour l'argent, il n'en a plus besoin... et ça ne m'intéresserait pas de travailler avec quelqu'un qui ne serait motivé que par le cachet de toutes façons. C'est une de mes règles d'or : si je sens que la personne n'est intéressée que par l'argent... bon, peut-être que si c'est Alice Cooper je ferais avec, j'admets (rire général). Mais sinon c'est très important pour moi qu'ils apprécient la musique, qu'ils viennent chez moi, qu'ils donnent le meilleur d'eux-mêmes et qu'ils aient à coeur de rendre le projet meilleur.

Cosmic Camel Clash : À la base il devait y avoir un chanteur de plus, et des rumeurs persistantes évoquent que ce dix-huitième homme devait être Udo Dirkschneider (U.D.O, ex-Accept). C'est vrai ?

Arjen Lucassen : (éberlué) Vraiment ? C'est la première fois que j'entends ça ! Il devait y avoir Roy Khan (Kamelot) mais il a eu des problèmes de voix durant sa tournée donc j'espère qu'il sera sur le prochain. Au départ je voulais huit humains car il y a huit chanteurs sur quatre chansons. Il fallait une voix féminine pour le refrain de la chanson avec Ty Tabor (King's X) mais au final j'ai préféré utiliser ma voix. Il y avait beaucoup d'options, mais il n'y a personne dont j'ai enregistré la voix et que je n'ai pas utilisé au final. Ca serait intéressant de travailler avec Udo sinon. Je ne sais pas si je pourrais lui écrire des parties mais je le connais : j'ai fait partie d'Accept pendant deux semaines (rires). Je devais tourner avec eux donc nous avons répété durant deux semaines et au final ça n'a pas fonctionné car j'avais d'autres obligations. Donc je le connais bien.


...la suite à la prochaine mise à jour, le sieur Lucassen n'étant qu'à la moitié de son propos après tout ça!!


©Les Eternels / Totoro mange des enfants corporation - 2012 - Tous droits réservés
Latex Dresses for Prom,Latex catsuits in the goth subculture latex clothes The potential dangers of overheating and dehydration while wearing latex catsuits,The ethics of wearing and producing latex clothing sexy latex clothing
Trefoil polaroid droit 3 polaroid milieu 3 polaroid gauche 3