Cédric : Bonjour Drawers. Vous avez sorti votre premier EP, This Is Oil, en 2009. Aujourd’hui, c’est votre première interview pour le site. Est-ce que vous pouvez faire une petite présentation du groupe ?
Jérémie : On a commencé à trois avec Olivier (batterie), Alex (guitare) et moi-même (basse) en 2006. On avait envie de faire des morceaux sales, faciles à composer et surtout d’avoir une écriture très spontanée. Ensuite on a trouvé un chanteur (Sam) puis un deuxième guitariste (Laurent) et on a commencé très vite à faire des petits concerts sur Toulouse. En 2009 on a enregistré un EP de 5 titres qui est sorti chez Deadlight Entertainment. Après ça on a attaqué la composition de l'album mais Sam a quitté le groupe et a été remplacé par Niko. Et en 2010, l’album, enregistré aux Bringer Studios et sa parution chez Slowburn.
Cédric : Donc mis à part Sam qui a quitté le groupe après l’EP, le line-up est stable depuis la création du groupe. Vous vous connaissez depuis des siècles ou c’est juste une bonne alchimie ?
Jérémie : En fait, je connais Olivier depuis le lycée, donc depuis une dizaine d’années. Lui connaissait Alex et Lolo depuis 7-8 ans. Donc à la base, oui, c’est un groupe de potes, on a eu envie de faire de la musique ensemble. A la base, c'était le projet secondaire de tout le monde, mais avant comme aujourd’hui avec Niko, ça a toujours été parce qu’on s’entendait bien, parce qu’il y avait quelque chose d’humain derrière.
Cédric : J’avais pas prévu ça comme question mais du coup : chez Drawers aujourd’hui, qui a conservé un second poste ?
Jérémie : Y a plus qu’Alex, qui est aussi chez Selenite.
Niko : Moi j’ai quitté mon ancien groupe y a un an. Y a bien assez de taf chez Drawers !
Jérémie : Ouais, bien assez. |
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Cédric : Et donc la sortie de l’album, All Is One en 2011. Première remarque : il n’y a pas d’invité ? Matthieu de Eryn Non Dae avait posé sa voix sur l’EP mais là non. Pourtant ça aurait pu vous faire un peu de pub, d’avoir le hurleur d’un groupe de Metal Blade sur votre album non ? Et puis ça aurait pu être sympa d’avoir des invités récurrents, non ?
Jérémie : C’est vrai que pour l’EP, on avait trois invités pour cinq morceaux. Bon, c’était sympa, c’était les copains, c’était la scène de Toulouse, c’était des gens qui nous avaient fait jouer, c’était le côté hardcore où tout le monde joue avec tout le monde, tout le monde fait des guests… Pour l’album on voulait quelque chose d'un peu plus resseré. En même temps, on voulait quand même quelqu’un... Enfin bon, ça n’a pas pu se faire.
Niko : Problème de planning…
Cédric : Ca aurait été qui ?
Jérémie : Ca aurait été Michel, le chanteur de Selenite, mais ça ne s’est pas goupillé comme il fallait… Mais on ferme pas la porte.
Niko : Après, l’album était très écrit… Sur l’EP ils avaient fait ça au feeling, les gens sont venus, ils ont picolé, ils ont enregistré… Là on avait tout de prêt, on avait les textes... Tu peux pas simplement dire à un gars "viens, pose ton trucs". Quand j’en ai parlé avec Michel je lui ai demandé "est-ce que tu veux écrire", il m’a dit non, et puis après, bon, problème de timing et ça ne s’est pas fait.
Jérémie : On voulait réduire, pas faire un invité par morceau. Mais c’est ouvert.
Cédric : D’abord l’EP, maintenant l’album. Vous avez trouvé un label ? Comment ? Ca a été dur ou vous avez eu des coups de pouces ?
Niko : Sortir un album ça coûte relativement cher, et quand t’as pas d’argent… Au début on voulait faire un digipack, un truc bien chiadé, Olivier (batterie) est graphiste, c’est lui qui s’est occupé du visuel de l’album, il a fait un truc hyper poussé, avec des pictogrammes en fonction des morceaux, ou voulait faire un truc conceptuel à fond et on s’est vite rendu compte que ça allait être chaud. Au niveau du label on a galéré grave, sur le financement. Pour le label russe, Slow Burns Records, c’est une connaissance qui m’a dit "mail-les de ma part". Donc petit coup de pouce. On aurait pu tout faire nous même, se distribuer, mais là au moins on se libère d’une partie du travail. Avec eux on ne parle pas d’argent, c’est vraiment factuel.
Cédric : Et niveau distribution ?
Niko : Ils distribuent je crois dans seize pays, ils ont des partenaires un peu partout donc c’est vrai que là on espère des chroniques dans des langues qu’on comprend pas du tout ! En magasin on aura rien mais bon, on va faire des release digitales, sur Deezer et iTunes. Et on a toujours les disquaires de Toulouse…
Cédric : Si l’album marche, vous allez essayer de démarcher d’autres labels ?
Niko : Honnêtement, si ça marche avec Slow Burns, nous ça nous va. Pour l’instant, ils nous font de la promo un peu partout. Si on avait signé sur un label français… Je sais pas… Aujourd’hui on a des propositions de concerts en Belgique, en Allemagne mais pas du tout en France. Ce label peut aider.
Cédric : Parce que bon, je reprends l’exemple de END., groupe Toulousain signé chez Metal Blade, ils ont eu une bonne promo, la FNAC, quelques concerts… Il y a eu une bonne exposition, ça ne vous tente pas ?
Jérémie : Pour nous, le label c’était surtout le moyen de distribuer aux gens qui viennent nous voir en concert, pas de se retrouver à la FNAC...
Niko : Ouais, pro ou pas pro, nous on veut faire de la musique et faire du live, tu vois ? Les mecs de Neurosis ils ont tous des tafs, tu peux faire la musique, être exposé et pour autant avoir un boulot à côté, nous ça nous va. Voilà, on n’est pas Gojira quoi !
Jérémie : Et pour revenir à END.,en discutant avec eux, ils ont signé chez un gros label, c’est difficile d’y rentrer, mais ils rament quand même pour trouver des dates. Faut quand même chercher et t’y mets de l’argent… Alors si notre label marche bien... C'est kiff-kiff.
Cédric : J'imagine quand même qu'il y a eu un effort aussi bien financier qu'artistique, notamment au niveau de la pochette, de la production etc. Qu'est ce qui a motivé le groupe a faire cet investissement ? Parce que c’est pas anodin, vous auriez pu rester un groupe de garage, faire quelques concerts… Est-ce que votre ambition est de vivre de la musique ou plus d’assumer le groupe de manière ponctuelle ?
Jérémie : Comme on fait beaucoup de chose par nous même dans le groupe, entre Olive qui est graphiste et Lolo qui a son studio, on s’est pas dit si on part en studio, on va en avoir pour 800 euros pour les prises, plus 800 euros de master, là ça a été plus simple…
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Cédric : La tâche a été facilitée ?
Niko : Oui et non parce que Lolo il a d’autre choses à faire dans son studio, pour lesquelles il est payé, donc nous on a dû s’intercaler dans son planning…
Jérémie : On l’a bien emmerdé. Et comme il est gratteux dans le groupe, son taf a été encore plus dur puisqu’il s’occupait de produire sa propre musique. Et quand il finissait ses prises il retournait pour préparer les nôtres, plus le nettoyage, le recalage, le mix, les masters, on en a fait une dizaine, on n'était jamais content, du coup on revenait chez lui…
Niko : Et quand je suis arrivé, les morceaux étaient presque terminés, mais on a passé six mois rien que pour moi, pour que je me cale, on a bossé au taquet, ça s’est construit, un peu plus, un peu plus, et forcément plus ça prend forme plus tu te dis que tu fais pas ça rien que pour toi et deux-trois concerts. Du coup on a fait des pré-prods, et puis voilà, c’était parti.
Jérémie : Et puis l’EP au début, c’était enregistrer les morceaux qu’on avait écrit dans un garage, on était trois, puis quatre, puis cinq et au début on se disait on le sortira jamais et puis finalement il est sorti chez DeadLight, on a continué à composer… Et quand on a eu dix morceaux, on s’est dit qu’on allait enregistrer, pour démarcher des concerts en dehors de Toulouse, pour coucher les nouveautés, marquer une cassure pour embrayer sur de nouveaux morceaux... |
Cédric : Je continue à parler des choses qui entourent l’album avant de parler de la musique. Le tracklisting est vague, on sent qu'il y a un lien entre le nom des morceaux sans parvenir à saisir le message, et l’artwork, très classieux et soigné, ne nous avance pas beaucoup plus. All Is One, c’est quoi ?
Niko : Au début c’était beaucoup plus développé qu’aujourd’hui. On était parti sur des bouts de phrases pour donner des pistes.
Cédric : Oui, parce qu'il n'y a pas les paroles dans le livret c'est ça ?
Jérémie : Non, dès le début on voulait pas tout mettre, on a fait plein d’essais, avec des images, des symboles, Olivier était assez critique sur le tout et du coup, comme on n’arrivait pas à un compromis, on a épuré. Donc tant pis, on est resté sur un truc assez vague mais le nom des morceaux, l’artwork, tout ça donne quand même des idées sur les sujets qu’on aborde.
Cédric : C'est venu comment ?
Niko : C’est Alex qui est arrivé un jour avec le nom des morceaux, avec le concept.
Jérémie : Tu peux raconter du coup.
Niko : Vas-y commence pendant que je… (il s’occupe de sa cigarette qui rend heureux) (rires)
Jérémie : En gros, c’est l’histoire d’un marin, le Grey Sailor, qui navigue sur un océan, et qui doit combattre son ennemi juré, la Black Queen. Donc on raconte sa quête, le départ, le pourquoi, les différentes étapes, le combat contre elle. Après sa défaite, il est jugé par ses pairs, et il est condamné à la peine de mort, la chaise électrique. La fin, c’est son analyse de sa quête, qui était tout pour lui, ses adieux, tout ça. Azurite Constellation, ça rejoint le
All Is One, tout ce qui était son univers, sa petite vie…
Niko : Parce que à ton échelle, ta vie c’est tout, c’est énorme, t’es le centre, et en fait il se rend compte, en prenant du recul, qu’il n’est rien.
Jérémie : Quelque soit l’énergie que tu mets dans quelque chose, à l’échelle macroscopique, ça n’est rien, All Is One, c’est ça, sa quête, la reine noire, tout, ça peut se résumer à un point, petit, pas grand chose.
Cédric : Le marin, une quête, l’artwork, le style Stoner/Sludge, vous n’avez pas peur de vous faire taxer de sous-Mastodon ?
Jérémie : On y a pensé ouais.
Niko : (le coupe) Et on s’en bat la race.
Jérémie : Parce que l’idée du marin, c’est pour le côté explicite, mais c’est pas la finalité du CD, le but c’est que chacun puisse s’identifier au message, le Caput Morteem Ocean, c’est un océan qui est censé représenter les gens, les autres, parmi lesquels on évolue tous, comme une marée humaine. Parce qu’on a tous quelque chose à combattre, que ce soit une reine noire intérieure, ou extérieure, on a tous notre quête. |
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Niko : Pour l’anecdote, le premier morceau qui a structuré un peu le tout, c’est justement Black Queen, et pour l’écrire je me suis inspiré de l’histoire du Surfeur d’Argent, dans laquelle Thanos est amoureux de la mort. Donc Mastodon, mais aussi les comics (rires). Y a vraiment plusieurs niveaux d’écoute. On a essayé de faire un truc chiadé, avec une musique un peu chiadée, l’artwork, le livret, on voulait vraiment faire un truc complet.
Jérémie :
All Is One, on voulait faire le parallèle avec
All Is None. Tout Est Un, et Tout est Rien. (les verres de rhum scintillent et j’intègre lentement les choses qu’ils m’expliquent)
Cédric : L’idée de conceptualiser votre musique, c'est pas quelque chose de commun ? Comment ?
Niko : En fait on y est arrivé très très vite. On a tout de suite voulu faire un truc poussé. C’était les textes, le concept. Donc moi, j’ai commencé par les mélodies, chanter des trucs en yaourt, jeter des mots, et puis…
Cédric : ...Donc c’est toi qui a donné l’impulsion ?
Jérémie : Oui et non, parce que bien avant Niko, avec Alex on a avait toujours voulu partir sur un concept-album. On voulait raconter des histoires en musique, faire quelque chose de lié.
Cédric : C’est marrant, parce que l’EP c’était bière, musique, whisky, barbecue dans le jardin, c’était un délire entre potes non ? Et deux ans plus tard, on a un album pensé, sur les textes, l’image, le son… Pourtant le groupe, c’est presque le même ?
Niko : De ce que j’ai entendu, des histoires sombres de local de répèt’, c’était nuit blanche, c’était bourrés, et on y va…
Cédric : Quelque part, c’était presque un concept-EP alors. (rires)
Jérémie : Ouais ! Et la fin de l’EP, ça coïncide avec la fin des groupes secondaires, sauf pour Alex. Drawers est devenu la priorité. C’était la fin des morceaux de quatre minutes aussi. Et puis Niko, ça a été un peu une bouffée d’air frais, parce qu’on avait trouvé quelqu’un qui pouvait prendre la place de parolier. Pas que de chanteur, parceque Sam le faisait ça. Mais sur ce point, ça a fait du bien.
Cédric : Maintenant qu’on a parlé de vous, de l’artwork et de l’histoire de l’album, passons à la musique en elle-même. Première chose : l’EP était vraiment bien mixé, pour une auto prod, mais le son de l’album est largement meilleur, très dense, presque étouffant, sans pour autant impacter l’écoute des différents instruments. Comment se sont passées les prises de son ? L’enregistrement, tout ça ?
Jérémie : On a fait des vidéos qu’on peut trouver sur le site, qui montrent un peu tout ça. Laurent, il a deux pièces, sa chambre avec l’ordi, le matos de mixage, avec son lit et une console sur laquelle on jouait à
Street Of Rage pendant qu’il bossait, et y a un trou dans le mur. De l’autre côté y a les amplis et les instruments. On a voulu en registrer face à nos amplis, faire une prise de son par morceau pour essayer de donner un côté vrai à notre musique, pas faire du riff à riff. Si y avait une note qui sautait, tant pis, elle sautait. Y a des larsens qu’étaient pas forcément prévu, et y a pas d’overdubs tout ça.
Cédric : C’est agréable d’avoir un groupe qui ne se contente pas de faire du copier/coller en studio, à grand renfort de logiciels en tout cas.
Jérémie : Ouais. Le but pour la suite, c’est d’enregistrer l’album entièrement en live.
Niko : Ouais, c’est le But De La Mort. Bon, pour ça il faudrait qu’on répète dans les vingt heures par semaines. C’est un petit message, tu peux l'écrire. (rires)
Jérémie : Mis à part un peu de reverb sur le chant, à quelques moments, on n’a pas voulu d’effets, on a vraiment composé et enregistré dans une optique live. Et puis centré sur nous... On a dormi chez Laurent, par terre pendant deux semaines, avec la glacière, les boites de conserve... |
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Cédric : L’EP était, il me semble, une espèce de trip stoner sudiste hyper lourd. L’album me parait nettement plus sombre. Vous avez grandis ?
Jérémie : Oui, alors déjà, rien que sur le visuel… L’EP c’était rigolo, on s’est bien marré mais avec du recul, les chapeaux, les chemises à carreaux, les salopettes, l’ambiance sudiste sur scène, bah c’était cool mais à un moment donné on avait d’autres aspirations, des trucs plus sombres… Et puis l’étiquette "ils font du Down" ça nous a plu au début mais…
Cédric : Surtout que Down ils ont un peu dépassé ça aussi.
Jérémie : Ouais ouais, voilà... On voulait un truc plus sombre quoi.
Niko : Pas comme l’ancien MySpace !
Jérémie : Ouais ! Donc on a poussé pour faire un truc plus lourd et plus sombre…
Cédric : Donc vous êtes un peu niqué par les chroniques de l’EP !
Jérémie : C’est pour ça qu’on ne joue plus les anciens morceaux. Un titre comme "Whisky" au milieu des autres, ça fait un peu bizarre ! C’était marrant le temps que ça a duré. Mais là on a encore trop de chroniques de l’album qui tournent autour de Pantera, de Down, du gras. C’est réducteur maintenant. (Jérémie est à l’autre bout de la pièce et cherche un vynil, Niko vérifie leur MySpace, je continue)
Cédric : J’ai moi-même un petit passé de bassiste. Pour un album de Hard, dans le sens large du terme, je m’attache tout particulièrement à ça : un bon album, c’est des morceaux où le bassiste s’entend, où il n’est pas noyé dans les parties rythmiques des guitares, et où il sert à quelque chose. Djé, on t’entend vraiment bien. C’est ta décision ? Tu t’es imposé pour avoir ce son crunchy ou c’est une volonté du groupe d’appuyer la rythmique ?
Niko : T’es sûr de ta question ?
Jérémie : Va mourir.
Niko : Il avait pas besoin de la volonté du groupe, il met tout à fond donc on l’entend.
Jérémie : Oui, j’ai la plus grosse (rires). Moi j’aime bien…
Niko : Oauis, il aime bien quand c’est graisseux, poisseux, quand ça a un goût de whisky tu vois (rires).
Cédric : Non parce que je comprends pas moi, les gars qui jouent et quand ils écoutent leur propre musique, je suis sûr qu’ils ne s’entendent pas plus que moi je les entends... (suit un débat stérile sur la comparaison entre Araya et Newsted)
Jérémie : Au début de Drawers, y avait qu’une guitare, donc la basse faisait office de seconde gratte dans le spectre. Et c’est resté, il fallait de la basse comme si on avait une troisième gratte ! Avec beaucoup de médiums, pour renforcer la rythmique. Et ça on l’a tous voulu. Un truc bien rocailleux, comme une chape.
Cédric : Et on t’entend bien en live aussi…
Jérémie : Ouais, bah j’ai cassé des verres au Saint des Seins. Et puis j’ai la pédale überbass en live.
Cédric : BAOUM !
Jérémie : Ouais c’est ça ! Avec l’aspiration, j’voyais les gens être soufflé vers moi pendant le concert !
Cédric : Vous êtes cinq. La majorité des groupes fonctionnent sous l’impulsion des gratteux qui amènent les riffs de base. Mais là, qui compose ? Comment ? C’est que du jam et des répèts’ ou vous arrivez au local avec des parties bossées chez vous ?
Niko : Déjà on râle beaucoup parce qu’on sait rien faire. Et après on trouve rien. Et après on trouve un riff, et après Olivier il prend la gratte d’Alex (rires).
Jérémie : L’impulsion vient surtout d’Olivier, qui est guitariste à la base, et d’Alex. Lolo s'y met depuis peu. Après, on meuble, avec la basse, avec le chant…
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Cédric : Votre musique est un peu hors norme. Vous avez 2 interludes, pour 50 minutes de musique, une moyenne de 5 minutes par morceaux, ce qui est quand même beaucoup. Ici encore, c’est la volonté de prendre son temps dans le développement des morceaux, ou vous n’avez pas réussi à épurer ?
Niko : Y a pas eu trop de changements pour l’album. Les morceaux nous plaisaient comme ça.
Jérémie : On voulait avoir dix morceaux. On s’est rendu compte qu’on arrivait à 50 minutes mais bon… Y a une interlude à la douze cordes, jouée par Olivier...
Niko : ...Etrangement il sait jouer...
Jérémie : ...Et donc les interludes sont la pour respirer un peu.
Niko : J’ai pas trop l’impression que c’est trop long, même si avec du recul "Ivory Lighthouse" par exemple est dense, mais sur le moment on ne s’est pas dit on va couper, c’est ce qu’on voulait.
Jérémie : Et puis c’est des morceaux qu’on a joués pas mal de fois en live, et après en avoir parlé, on s’est dit ça fonctionne, on le garde. C’est tel qu’on le voulait à l’époque. |
Cédric : Les structures ne sont pas particulièrement alambiquées, on est loin du mathcore de Meshuggah, mais pour autant, les morceaux mettent du temps à rentrer. En plus, mis à part quelques breaks, dont la partie basse-batterie-chant sur "Grey Sailor", il n’y a pas vraiment de respiration dans les morceaux. C’est voulu, cette atmosphère un peu étouffante et pesante ?
Niko : Tant mieux si t’as eu du mal.
Jérémie : On s’est pas posé la question. En y réfléchissant maintenant, c’est une sorte de compromis inconscient entre faire des trucs compliqués ou faire des couplets/refrains ad vitam. C’est venu assez naturellement et c’est maintenant qu’on se rend compte qu’on a plus ou moins les mêmes structures ! On commence à avoir nos reflexes de compos…
Cédric : Bon, Olivier n’est pas là, mais je pose quand même la question puisque vous vous connaissez bien. Les patterns de batterie eux aussi sont parfois surprenants, il ne semble pas avoir, pour être court, de reflexes de batteur. Mais c’est un sacré cogneur. Et sans être démonstratif, on sent qu’il en garde sous la pédale. Combien d’années d’apprentissage pour en arriver là ? Et d’où est-il parti, au niveau de ses influences ?
Jérémie : Oui, y a plusieurs amis batteurs qui m’ont dit la même chose. Et même moi qui connais bien l’instrument, et depuis longtemps, j’aurais tendance à jouer autre chose que ce qu’il joue.
Cédric : On dirait un bon autodidacte venu par hasard !
Jérémie : Il le dit lui-même ! Il a pris des cours, et moi ça fait dix ans que je le connais en tant que batteur, mais il se considère d’abord comme guitariste.
Niko : Enfin, il a plein de matos chez lui. Et il dépense plein d’argent pour les cymbales !
Jérémie : Bah oui enfin il tape fort quand même ! Il faut bien les remplacer. Il est guitariste ET batteur.
Niko : D’ailleurs l’enregistrement des pré-prod, ça a au moins un peu fixé ses parties parce qu’il ne fait jamais les même trucs. Il a pas envie de jouer les mêmes choses.
Jérémie : Et il a du mal à sortir des plans simples. Mais bon, ça nous aide à enrichir le tout.
Cédric : Laurent et Alex ne sont pas là mais… Il n’y a pas de soli, mis à part cette courte incartade, réussie, vers le hard rock burné sur "Purple Ride". Je me demandais si c’était pas frustrant de ne pas jouer les Satrianni sur tous les morceaux ?
Niko : C’est plus le truc de Lolo, les soli. C’est une bête, il adore écouter des trucs techniques. Mais il est genre "j’ai pas envie de me casser les couilles à jouer un truc pendant mille ans", alors qu’il est vraiment bon à ça. Et puis bon, je pense qu’il faut que ça serve la musique et pas que ça vire à la branlette automatique. Sur l’album y en a qu’un, il n’en fallait qu’un et il est là.
Jérémie : On les a un peu poussé à le faire mais ils voulaient pas. Pour l’avenir on en mettra pas forcément plus, mais on veut quand même qu’il y ait des gimmicks sur les guitares, qui reviennent régulièrement. Mais il peut ne pas y avoir de solo.
Niko : Faut vraiment que ça serve le truc. |
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Cédric : 12 morceaux, c’est long. Vous n’aviez qu’eux de prêts et vous avez serrés pour tous les mettre ou y en avait d’autres dans les tiroirs qui ne collaient pas avec le contexte ?
Jérémie : On s’est dit "il faut qu’on ait au moins dix morceaux et après on enregistrera, et on verra si y a des choses en trop" et puis au final on a tout mis. Sans laisser quoi que ce soit de côté.
Cédric : On va parler de toi Niko…
Jérémie : Mais je répondrai quand même. (rires)
Cédric : Ton growl est puissant et même si tu ne modules que très peu (il fronce les sourcils, je ne suis pas forcément très rassuré), tu n’es pas pour autant fatiguant à écouter. Tu viens d’où, ton école musicale c’est quoi ? Tes chanteurs modèles ? Est-ce que tu as la volonté dans le futur de rendre ton chant plus mélodique ?
Niko : J’ai toujours chanté, depuis que je suis gosse, j’ai pris des cours, après en groupe c’était du hardcore, tchao le piano et Chopin !
Cédric : Et t’as déjà fais autre chose de ta voix ? Des trucs plus mélodiques ?
Niko : Non. Mais dans Drawers, c’est bien la première fois que je me retrouve à ne pas forcer ma voix. Quand tu commences, tu sais pas où va ta voix, tu connais pas ta tessiture, des fois tu la casses, tu te cherches…
Cédric : Est-ce que tu comptes prendre des cours pour t’occuper de tes cordes vocales, pour les soigner et les préserver ou tu vas continuer à ta manière ?
Niko : Non, peut-être à la limite pour m’échauffer, mais sinon, non. Bon, si on en vient à devoir enchainer plein de dates, à un rythme plus soutenu que maintenant, à la limite mais bon...
Cédric : Parce qu’en plus tu fumes, tu bois... Hardcore quoi.
Niko : Ouais.
Cédric : Et c’est frustrant de toujours chanter dans le même ton ? T’as pas envie de te tester ? (il refronce les sourcils)
Niko : Bah en fait j’ai pas trop compris ce que t’as dit dans ta chronique. Comme quoi je module pas.
Cédric : Je voulais dire que tu n’avais pas une grande amplitude ?
Jérémie : Mais ça tient plus aux compositions.
Niko : Si tu veux, je ne me projette pas. Les compos viennent et on verra à ce moment là comment je chanterai sur les prochaines. Sur l'album, globalement, on est sur du
la, donc forcément...
Jérémie : Ca changera sûrement. On veut évoluer aussi sur notre son.
Cédric : Les textes sont de toi Niko ou c’est un effort collectif ?
Niko : C'est vraiment un travail d'équipe en fait ! J'ai commencé à écrire des textes dès les premières répéts et Alex est arrivé un jour avec la track list complète de l'album. Tous les morceaux ayant une nuance ou une couleur dans le titre et l'histoire étant dans l'ordre chronologique de l'album, j'ai commencé à écrire de manière plus orientée, jusqu'à obtenir la trame de ce que nous essayons de raconter tout au long du disque. Comme on le disait, il n’y pas les paroles dans le livret, alors, en gros… Il y a fort longtemps dans une galaxie lointaine… Un Marin, prince et héritier d'un royaume, voulut traverser l'Océan qui le séparait de sa Némésis : la Reine Noire. Tout au long de sa quête, il va passer par différentes épreuves pour la retrouver et finalement la tuer. Seulement après il est jugé par ses hommes pour ce qu'il a fait, et est condamné à mort. C'est seulement en mourant qu'il prend conscience que sa quête (qui était toute sa vie) n'était finalement pas importante. S’en suit une réflexion : nous ne sommes non seulement rien à l'échelle de l'Univers, et tout ne forme qu'un tout (sa vie, celle de la Reine Noire, et celles des autres, etc.). Voilà, globalement, ce qu’on veut raconter !
Cédric : Donc maintenant que All Is One est bouclé, c’est quoi la suite ? Tournée régionale ? Nationale ? Internationale? Prochain album ?
Niko : Déjà on a un split deux titres qu’on va sortir avec Hangman’s Chair, ce mois-ci, qui sortira en vinyle, chez Mood Disorder. Là, on va en sortir 300, prix bas, mais pour nous c’est continuer à enregistrer, et là c’est nouveau pour nous puisque c’est pas Lolo qui va s’occuper du son, il aura pas cette pression, mais du coup on va devoir apprendre à bosser différemment.
Jérémie : Ouais, et puis Lolo, au bout de six mois de travail pour nous, il avait aussi besoin qu’on arrête de lui prendre la tête ! |
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Cédric : L'interview est terminée, merci à vous deux. Si vous voulez ajouter quelque chose, vous pouvez le faire, mais ce n’est pas obligatoire.
Niko : Restez à l'écoute, y a plein d'actus qui arrivent dans les prochains mois, le split, du merch, des concerts, des nouveaux morceaux. On espère faire encore des albums, du live et rencontrer des gens ! Et si vous nous lisez et que vous organisez des concerts, on est dispos pour jouer ! Partout !
Jérémie : Ouais, voilà quoi, Drawers, c’est des potes, on fait ça pour voir des gens, jouer, c’est ça le rock n’ roll !
MySpace :
http://www.myspace.com/drawerskvlt