Winter : Salut, quand démarre l’aventure Bones of Minerva ? Pouvez-vous vous présenter un peu?
Ruth : Bien sûr ! On est un groupe qui vient de Madrid, formé par quatre meufs qui aiment le metal. On pourrait dire que Bones of Minerva a démarré sérieusement vers 2015, bien que Blue, Chloé et moi avions le rêve de jouer ensemble dans un groupe de metal depuis que nous nous connaissons à l'école. Nerea, notre batteuse, est entrée dans le groupe il y a presque deux ans, quand on a commencé à tourner partout en Espagne. L'année dernière, on a fait une tournée au Royaume Uni et on a joué dans des festivals comme le Resurrection Fest ou Download Madrid, c'était la folie!
Winter : Quelles sont vont principales influences musicales ? Madder Mortem en fait-il partie ?
Ruth : (Rires) non, nous ne connaissons pas ce groupe, on va se renseigner !
Nerea : Je crois que nous n'avons pas vraiment d'influences fixes. C'est plutôt ce que tu écoutes à un moment donné qui va t'influencer au moment de composer et t'apporter de nouvelles idées. Ceci dit, si on devait citer certaines influences, dans mon cas, ça pourrait être Lamb of God et Mudvayne.
Blue : Actuellement, on peut dire que les influences que nous avons toutes en commun sont Tool, Deftones, Mastodon, Gojira,...
Winter : Y-a-t il des types de musiques que vous n’écoutez pas du tout ?
Chloé : Oui, sans doute le reggaeton (rires), si je pouvais le faire disparaître je serais une femme heureuse.
Blue : Ouh là, pas facile de répondre. On va dire la pop facile et de mauvais goût comme Les Gemeliers et les trucs comme ça.
Winter : Votre musique possède un côté brut, mais également beaucoup de poésie. Êtes-vous d’accord avec cette affirmation ?
Ruth : Oui, totalement, notre musique est difficile à expliquer parce qu'elle est pleine de contradictions. Surtout, on recherche une balance entre la coté chaman, le son brut, et les émotions...
Winter : Quels sont les sujets que vous traitez dans vos textes ? Sont-ils aussi importants que la musique ?
Blue : On ne nous avait jamais posé cette question (NdW: pourtant, j'ai pas l'impression d'avoir été très novateur… ) et, pour être honnête, je n'y ai jamais réfléchi. Jusqu'à présent, c'est moi qui écris les paroles, avec l'aide ponctuelle de Ruth. Quand j'écris, je sais souvent que je veux parler d'un sujet concret mais j'attends de voir ce que va donner la musique pour être sûre qu'elle est adaptée à la thématique. C'est une évidence, mais dans nos chansons nous essayons toujours de dire quelque chose, qu'il y ait toujours un message clair, que ce soit sur nos conflits internes ou sur de la critique socio-politique. Dans le cas de Blue Mountains (NdW: le dernier album), il s'agit d'une œuvre très introspective. En général, quand nous lançons un message, nous nous concentrons plus sur la musique, et les paroles cherchent à rendre ce message plus clair et plus intense, musique et paroles finissant par interagir. Mais la musique est, évidemment, plus importante pour lancer les messages.
Ruth : Je dois dire que dans nos chansons les plus récentes, comme "Privilege" et "Madre", le message est aussi important que la musique.
Winter : Votre univers musical semble très large. Vous évoluez actuellement en mode guitare, basse, batterie. Pensez-vous introduire d’autres instruments dans le futur ?
Chloé : Je pense qu'actuellement on est bien comme ça, On n’a pas envisagé d’introduire d'autres instruments.
Winter : Où se trouvent les Montagnes Bleues ? Y a-t-il un rapport entre la couleur de ces dernières et le nom de votre chanteuse ?
Ruth : (Rires) non, c'est un peu confus mais ce n'est pas un hommage à Blue. Les Montagnes Bleues se trouvent au nord de Madrid, où nous habitons et nous avons grandi. C'est probablement pour ça qu'on a une relation très proche avec la nature. La pochette du disque est une de mes peintures. Vraiment, toutes les montagnes sont bleues vues de loin. C'est une façon de dire qu'on est tous égaux et qu'on ne croit pas aux barrières.
Winter : En parlant de Blue… Est-elle la fille cachée de Mike Patton ?
Blue : Ah ah ah ah, si seulement. Je n'ai que ma mère alors… Je dois admettre que je n'ai pas non plus écouté beaucoup de choses de lui, mais je l'admire comme l'artiste complet qu'il est.
Winter : Jouez-vous beaucoup en live ? Avez-vous prévu de tuer l’ingénieur du son de la salle Nazca ? Si c’est le cas, je plaiderai en votre faveur au procès…
Ruth : Ah ah ah, merci pour le soutien. On en aura besoin pour le procès.
Chloé : (Rires) un peu oui, depuis que Blue Mountains est sorti, on a joué partout où on pouvait. Cette dernière année a été une folie absolue, on a joué partout en Espagne, on est allé deux fois en Angleterre…
Winter : La peur est un biscuit (référence au titre "Fear Is A Biscuit" de Blue Mountains). Quelle saveur a-t-il ? Avez-vous peur du futur ? Quel futur voyez-vous pour Bones of Minerva ?
Ruth: La peur a un goût de merde, ça pue, tu ne peux même pas la mâcher. Mais si tu ne manges pas ta peur, c'est elle qui te dévorera. Le climat politique et social en Espagne fait peur. Il y a une tendance fasciste qui te fait broyer du noir. Et aussi, le futur de notre planète est préoccupant. Nous canalisons toute notre énergie dans notre musique pour surmonter cette peur. Il y a un long chemin devant nous, mais on a accompli tellement de choses, le futur de Bones of Minerva est brillant !
Winter : Quel accueil vous réserve le public en général ? Est-il sensible à votre musique non standard ?
Ruth : Le moins qu'on puisse dire c'est que notre genre n'est pas attendu et surprend en général. Le bon côté c'est que les gens sont curieux et restent durant tout le show. Si nous avions un genre différent, peut-être que nous attirerions plus de gens, mais nous avons un bon groupe de fans et je ne souhaite le changer pour rien au monde.
Winter : Le succès vous attire-t-il ? Seriez-vous prêtes à être un peu moins originales dans votre approche pour toucher un public plus large ?
Chloé : Je pense que ça attire tout le monde, on veut vivre de ça, mais si tu dois sacrifier ton art pour avoir plus de succès, c’est non.
Nerea : Je crois que sur ce sujet, nous avons toutes des opinions différentes. Le succès en soi n'est pas quelque chose qui m'attire personnellement, mais j'aimerais pouvoir vivre de la musique d'une manière ou d'une autre.
Blue : Je ne vais tromper personne. C'est quelque chose qui m'attire, oui. Pas mal, même. Mais je ne laisserai jamais personne influencer ce projet pour des motifs « non artistiques ».
Winter : Quels groupes aimeriez-vous accompagner en tournée, si vous aviez le choix ?
Chloé : J'aimerais accompagner Bala pour commencer ou, prêtes à rêver, Gojira ou Mastodon, (rires).
Nerea : Je dois admettre que je n'aimerais pas connaître en vrai les membres des groupes avec lesquels j'ai un lien émotionnel fort, et aller en tournée avec eux impliquerait avoir des relations avec eux. Je pense que quand tu parles avec les gens, tu démythifies beaucoup, et je préfère préserver mon imaginaire. Ce n'est jamais agréable que quelqu'un te rappelle que tu n'es qu'un simple humain (rires). Donc je préférerais accompagner des groupes qui ne représentent pas grand-chose pour moi, émotionnellement parlant.
Winter : Quels sont vos projets pour 2020 ? Aurons-nous la chance d’écouter bientôt le successeur de Blue Mountains ?
Nerea : Nous sommes en pleine période de composition et nous espérons pouvoir entrer en studio en 2020, donc en principe, oui.
Ruth : On veut aussi faire une tournée comme il faut en Europe, retourner en Suède et en Scandinavie, visiter pour la première fois l'Allemagne, l'Italie, la Pologne... Et la France!