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CHRONIQUE PAR ...

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Djentleman
Cette chronique a été mise en ligne le 01 juin 2021
Sa note : 14/20

LINE UP

-Mohammad T
(chant + basse)

-Behnam Z
(guitare)

-Armanof M
(batterie)

TRACKLIST

1) World Oh Phobia
2) Anthropophobia
3) Tyrannophobia
4) Homophobia
5) Eremophobia
6) Panophobia
7) Hypnophobia
8) Phonophobia
9) Algophobia

DISCOGRAPHIE


Tension Prophecy - World Of Phobia
(2013) - death metal brutal death technique - Label : Infinite Regress Records



La musique persane ne date pas d’hier. Elle remonte à plusieurs millénaires, et selon certaines sources, jusqu’au Néolithique. Tension Prophecy est un poil plus récent puisque sa création date de juin 2009, dans la capitale de la république islamique d’Iran. N’ayant pu résister à la vague metal occidentale qui déferle sur le monde, nos Téhéranais sont allés à l’encontre des bonnes mœurs du pays, instaurées et guidées par la religion d’Etat. Et celle-ci ne voit pas d’un bon œil ce type de musique, surtout quand on connait l’origine de son plus gros fournisseur mondial.

C’est donc dans ce contexte particulier, qui lui impose un nombre de limites non-négligeables, que Tension Prophecy pratique son style de cœur. Quitte à faire dans l’excentricité, autant pousser le vice jusqu’au bout et aller dans l’extrême. Comment ? Le style pratiqué par cette formation ? Du brutal death technique, rien de moins. Ça fait peur hein ? Justement, en parlant de peur, c’est ce dont traite le disque entier. Un concept-album basé sur les phobies. A force de vivre dans l’angoisse d’un pays qui peut vous persécuter et vous chasser à tout moment, l’art que vous pratiquez s'en retrouve fortement influencé. A ce propos, le groupe est bien évidemment interdit de jouer dans son propre pays, logique. Et s’il ne fut pas facile pour eux de trouver un label, ils ont tout de même signé chez l’éphémère et défunt  Infinite Regress Records, qui produisait principalement des groupes de brutal death. Dès les premières lueurs de phobie apportées par l’introduction éponyme angoissante, on sent que cet album n’est pas le fruit d’une maison telle que Metal Blade ou Nuclear Blast. La production n’est pas non plus dégueulasse, mais tout de même assez médiocre, dans un style qui peut déjà paraître brouillon à la base. Ça n’arrange bien sûr pas les choses, à moins que ce soit volontaire de la part des artistes. Pas forcément absurde puisqu’on sait que ce n’est pas le milieu dans lequel la production est la plus soignée.

Le côté expérimental du groupe vient rajouter une couche à tout l'aspect brouillon de l'ensemble. Quand je dis expérimental, ne voyez pas ici un sous-produit de Converge ou de Tony Danza Extravaganza. Voyez plutôt des passages comme sur "Anthropophobia" à 0’55 ou sur "Homophobia" à partir de  1‘24. Des passages un peu sortis de nulle part dans toute cette bouillie technique et brutale. Technique, c’est le moins que l’on puisse dire. Ça shredde tellement à base de sweep, de tapping et de tremoli qu’on dirait qu’on a fait appel aux guitaristes de Rings Of Saturn sur "Hypnophobia". Et pour le coup, vous n’aurez pas peur de vous endormir. Aucun risque de toute manière, car si vous tentez un endormissement soudain, le batteur sera là pour vous secouer à la manière de Max Duhamel de Kataklysm comme sur "Algophobia". En espérant que vous ne craigniez pas la douleur, sinon vous n’allez pas apprécier les samples de tronçonneuse qui viennent clôturer l’album. Ça, c’était pour le côté brutal. Mais les Iraniens savent aussi mettre de l’eau dans leur vin (bon ce n’est peut-être pas la meilleure métaphore). Ils n’ont pas misé que sur le bourrinage intensif. "Panophobia" viendra apporter une petite touche progressive et ralentir quelque peu la cadence, tout comme sa comparse entièrement instrumentale "Phonophobia" aux belles influences thrash dignes de la belle époque Slayer. Enfin, le synthé aux sonorités de violon viendra égayer (sans mauvais jeu de mots) l’opus d’une manière assez ludique sur "Homophobia" (3’37).

Pour finir, arrêtons-nous sur Mohammad T, qui officie au poste de chanteur-bassiste. Il a beau ne pas s’exprimer en farsi, c’est tout comme. A mi-chemin entre les gargouillements de Chris Barnes (
Six Feet Under) et la puissance vocale de Maurizio Iacono (Kataklysm), on ne comprend que très difficilement ses paroles et il faudra un appui visuel afin de pouvoir déceler les différentes peurs auxquelles il veut nous confronter. Il scande donc ses propos dans la langue de Shakespeare, en se mettant en scène à la première personne, comme pour expliquer un vécu ou un ressenti. L'on vogue alors entre la peur de la solitude avec "Eremophobia" – qui est, au passage, un peu trop répétitive et terne – la peur des gens et de leur compagnie dans "Anthropophobia" et la peur de presque tout sur "Panophobia". Malgré le mixage loin d’être parmi les meilleurs, la basse est suffisamment  présente pour apporter une ambiance froide et métallique parfaitement en harmonie avec le thème. Félicitations à eux d’avoir eu les burnes de placer un titre frôlant les six minutes, tel que "Tyrannophobia" qui est on ne peut plus significative de leur situation particulière en Iran. Tout en prenant soin d’ajouter un petit extrait d’un discours d’un certain Adolf Hitler pour marquer les esprits comme il faut. De là à ce que les autorités publiques tombent dessus, il y a le temps d’une nouvelle révolution.

Tension Prophecy a donc voulu jouer la carte de la provocation par l’intermédiaire d’un concept-album à la gloire de la peur. Montrant une belle technicité dans ce premier album, le groupe devra surmonter deux obstacles pour pouvoir continuer à progresser : la qualité de production et la censure dont il fait l’objet dans son propre pays.



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