CHRONIQUE PAR ...
Tabris
Cette chronique a été mise en ligne le 01 juin 2021
Sa note :
16/20
LINE UP
-Karen Willems
(chant+batterie)
-Jürgen de Blonde
(guitare)
-Ward Dupan
(claviers)
TRACKLIST
1) I Va Va Vimedoom
2) Minimal
3) Vladimir
4) StrangeWaltz
5) Intown
6) Dirty Monks
7) Be Kind
DISCOGRAPHIE
Au début, le ton est grave. Puis il y a cette petite mélodie qui s'élève. Mélancolique. Elle m'évoque cette boîte à musique d'une tristesse infinie que l'on ne retrouve que dans les décombres des souvenirs chaotiques. La sonorité se fait pourtant siège d'une étrange nostalgie sucrée-amère, enfantine. Plus j'avance, plus l'air ambiant devient dense, pesant. S'élèvent alors des voix, nombreuses. Une pièce se fait jour et j'assiste furtivement à une étrange cérémonie rituelle. Puis aussi soudainement que ces silhouettes étaient apparues, elles disparaissent, et je me retrouve à nouveau seule, face à ce sentiment désenchanté. Et "I Va Va Vimedoom" ne dure en vérité qu'un instant. C'est mon premier contact avec cet « hors du monde ».
Une voute céleste s'ouvre alors au dessus de ma tête, une danse gracieuse accapare mes sens, un voile d'onirisme oriental effleure mon esprit dans un rai de lumière orangée et paresseuse. Mon regard se tourne vers la silhouette qui semble tourbillonner lentement et langoureusement autour de moi, cherchant à m'enivrer, tandis que les nappes sidérales m'emportent par vagues dans un songe d'éther. Mais me voici arrachée à ma douce contemplation par ce battement de peau, puis ce roulement, et ces cliquetis. "Vladimir" vient d'entrer dans la place, il s'agite, gesticule de tout côtés. Puis semble vouloir recouvrer son maintien. Sa silhouette devenue sévère, s'agrandit, dressant sur moi une ombre de plus en plus inquiétante. Je perçois un râle, et Vladimir m'attire dans la tourmente distordue de son esprit, il m'emporte avec lui et je sens mon corps s'étirer, s'étirer, encore et encore... Mais je n'atteins pas le point de rupture. Il m'abandonne devant cet autel et je reste figée un instant à mirer la pièce organique qui se joue devant moi.
Ou suis-je à présent ? Est-ce l'océan ? Est-ce l'éther à nouveau ? Je me sens bercée, mouvements de va-et viens, rythme lancinant, ballottée comme un rien. La tête me tourne. Et me voici à battre l'asphalte, presque à gambader sur cet "Intown", un sentiment pourtant étrangement pesant sur le cœur. Comme si le rythme de mes jambes n'était pas en accord avec la nostalgie de mon âme. Ou en fait si, il l'est totalement. Il est justement décalé et ça me plait. C'est bien ainsi. C'est ainsi que ça doit être. Je m'arrête et frappe à la porte qui se dessine sur mon chemin. Je risque un regard dans l'entrebâillement : quelqu'un joue "Dirty Monk". Peu à peu, mon pouls s'accélère, de plus en plus fort, le sang pulse dans mes veines, une montée orgasmique s'élève dans la nuit, j'entends leurs voix qui exultent. Et puis... un tintement, comme une goute d'eau tombée au sol et qui résonnerait en moi. "Echoes" ? Non. "Be Kind". La voix se répète. Encore, Encore. Le mantra se greffe dans mon esprit. Elle progresse, monte en puissance, jusqu'à un point d'orgue. Puis une nouvelle histoire se dessine, complexe et impalpable. Un rêve aux multiples entrelacs...
Le songe. Et en cela oui, nous plongeons dans l'inspiration krautrock. Des noms viendront à l'esprit des rêveurs. Ash Ra Tempel. Tangerine Dream. D'autres encore. Mais il ne s'agit point de citer des « références ». Il est simplement de ces musiques expérimentales qui sortent du sens commun pour vous emporter dans un ailleurs totalement libre, où lumière et obscurité sont des notions qui elles même n'ont soudain plus le sens qu'on leur prête d'ordinaire. Et il n'y a justement aucun sens à chercher. Il n'est qu'à se laisser porter. Inwolves crée un de ces songes. Hors du monde.