CHRONIQUE PAR ...
Beren
Cette chronique a été mise en ligne le 01 juin 2021
Sa note :
11.5/20
LINE UP
-Julie Kiss
(chant)
-Tom McLean
(guitare)
-Hugo Shepard
(claviers)
-Lee Barrett
(basse)
-Paul Westwood
(batterie)
TRACKLIST
1)The Lie
2)Mirage
3)The Glory of a New Day
4)Inside the Hourglass
5)A Sorrow to Kill
6)Asylum
7)Fallen from Grace
8)Temptation
DISCOGRAPHIE
To-Mera représentait enfin, avec un Transcendental globalement surprenant dans son approche mais encore perclus d'imperfections (techniques mais aussi de goût), une nouvelle vague de metal à chant féminin, qui, pour une fois, ne s'épanchait pas dans la mélodie-guimauve, dans les paroles mélancoliques et dans le riff facile. Bien au contraire, ce premier album prometteur avait l'audace de prendre complètement à revers l'auditeur habitué au pénible raccourci « chanteuse+metal=metal gothique », avec son metal progressif complètement barré et inclassable, ce qui ne fût pas pour me déplaire.
Autant dire que pour Delusions, sorti après dix-huit mois d'un petit buzz et le départ d'un membre fondateur du groupe (Akos Pirisi), la barre fut placée terriblement haut. Passer après un disque qui, malgré ses défauts de jeunesse, éclaboussait d'un joli jet la scène metal à chanteuse est devenu un sport à part entière. Malheureusement, à ce petit jeu, To-Mera ne remplit pas son contrat. En effet, la première écoute est rebutante au possible. Les Anglais ont poussé leur gros vice à son paroxysme; dès "The Lie", on s'aperçoit que le groupe pousse le compteur "barré" à fond: les plans progressifs s'enchaînent sans aucun liant mélodique, ni véritable feeling et à un plan purement black (la tournée avec Emperor a fait son petit effet) répond un plan death technique sorti de nulle part (enfin, si, de chez Meshuggah), puis voilà que déboule un plan typiquement jazzy, avec force mellotron, orgue et claviers vintage. Indigeste. Il faut attendre "Inside the Hourglass" et "A Sorrow to Kill" pour enfin entendre un semblant de mélodie – entraînante et réussie sur la seconde piste – à travers le jeu des guitares, qui sortent enfin de leur carcan purement démonstratif et de leur ressemblance, souvent frappante, avec le son d'un groupe de metal progressif très connu (suivez mon regard!).
Ce côté progressif hélas sans âme (à son apogée sur "Asylum", foutoir musical techniquement incroyable mais sans véritable queue ni tête) s'accentue encore à cause du problème principal du groupe: l'intégration du chant. Bien que Julie Kiss possède un joli brin de voix (d'autant plus intéressant lors des parties ambiantes, majestueuses et enlevées, comme sur "The Glory of a New Day"), ses lignes de chant ne collent pas, le plus souvent, aux plans ultra-techniques proposés par les musiciens. Ils semblent même parfois avoir été enregistrés en total décalage avec la musique!
Ce désavantage certain est beaucoup plus important sur Delusions que sur Transcendental, où le côté progressif était moins prononcé, d'autant plus qu'entre-temps, Julie Kiss n'a pas vraiment retravaillé les défauts de son chant (puissance vocale, justesse dans les aigus, variété). C'est ainsi que l'on se retrouve, sur Delusions, avec un album dont on sait pas vraiment quoi penser, qui possède les défauts de ses qualités et inversement: montrer à l'auditeur que l'on sait jouer d'un instrument et que l'on possède un univers musical riche et varié (black, dark metal, death, prog, jazz) ne dispense pourtant pas de recherche mélodique et de finesse.
En cela, Transcendental était plus réussi alors que Delusions s'enfonce, dans un bourbier mal dégrossi dont il ne sait parfois pas se dépêtrer. Dommage que le groupe soit tombé si tôt dans un des travers les plus exaspérants des groupes de metal progressif: ne pas savoir trouver le juste milieu entre démonstration technique, exécution irréprochable et feeling mélodique. Le manque de...transcendance, justement.