Mozart, Beethoven, Schubert, Haydn, Mahler, etc. La liste des compositeurs autrichiens de renom pourraient s’étendre aussi longuement que facilement. Le pays-frère de l’Allemagne a souvent grandit dans l’ombre de ce dernier, mais il sait tout de même se distinguer et sortir le bout du nez quand il le faut. Et vous pourrez désormais ajouter Seth Angerer à l’index des talents du royaume de l’Est.
Moins de quatre-vingt likes sur Facebook au moment où j’écris ces lignes. Aucune présence sur Spirit Of Metal ou l’Encyclopaedia Metallum. Tout juste si son album apparaît sur un bandcamp. Et encore, ça n’est même pas le sien, mais celui de son label. Pour rencontrer Selzar, il faut quand même s’en donner les moyens. Mais quand ça sera chose faite, vous en serez sûrement satisfait. Mais pourquoi tant de mal à trouver quelques informations sur ce projet qui n’est pourtant ni censuré, en raison de quelques idées ou penchants extrêmes, ni originaire d’un pays comme Saint-Marin ou le Vatican ? La raison vient certainement du fait que sa création soit très récente, puisque datant du début du mois de Septembre 2016. Le viennois Seth Angerer est à l’origine de ce projet, qui a d’ailleurs disparu depuis, laissant place à un nom un peu plus sobre : Seth Angerer. Sorti il y a donc un peu plus d’un an et demi via Tukdam Records, label qui regroupe le travail de Seth Angerer et Nico Seddiki, de Tribe Of Wendigo (death/thrash/folk autrichien), ce Void Awake nous propose huit titres pour trois quarts d’heure de musique. Et comment qualifier cette musique si particulière entièrement composée, enregistrée, arrangée, mixée et interprétée par notre ami autrichien ?
Metal orchestral ? Trop ciblé. Metal progressif ? Trop réducteur. Djent ? Trop connoté. Instrumental ? Oui, pour ça, il n’y a rien à redire. Un mélange des trois premiers genres est donc à prioriser si l’on veut savoir dans quel monde on a mis les pattes. La capitale autrichienne, ayant longtemps été considérée comme la capitale mondiale de la musique, il n’est pas étonnant qu’un nouvel artiste en émerge. Et l’on sent assez rapidement que la « Ville de la musique » n’est pas étrangère à l’apport d’un fort côté symphonico-orchestral dans ce disque. Autre aspect non-négligeable, le fait que le compositeur ait pour idole Hans Zimmer. Mais si, vous savez, ce bon monsieur qui a produit quelques films de seconde zone tels que Gladiator, Hannibal, Le Cercle, Pirate des Caraïbes, Batman, Transformers, Iron Man, Inception, ou encore Interstellar. Entre autres. Tenez, écoutez par exemple "Polyparous Nonentity" pour vous plonger en plein cœur d’une intrigue cinématographique ! Mais avant toute chose, Seth Angerer vous immerge dans son monde avec l’introduction "Yclept owt That Is Direful" qui n’a aucun autre intérêt que celui de vous présenter une de ses influences non-soupçonnée, le groupe russe Huun Huur Tu, formation traditionnelle de la Sibérie du Sud (de culture turque). Non, ce ne sont pas des didgeridoo, mais bien des voix humaines.
Un garçon plein de surprises n’est-ce pas ? Un homme qui aime également se renouveler et ne pas s’enliser dans un seul style. C’est le moins que l’on puisse dire puisque presque chacun des titres de Void Awake possède sa particularité, sa propre âme. On peut dès lors divaguer sur le progressif et oriental "New Heavy Bombardment", se laisser kidnapper par l’ambiance japonisante mêlée aux bruits de cétacés rappelant Gojira sur "The First Waterbender", se briser la nuque sur le très djenty "Commencing Possession", s’échapper dans un monde classique en compagnie du très prenant "Polyparous Nonentity", ou enfin se laisser transporter à de vastes rêveries avec le final ambiant et aérien "An Onset Of Thousands", et ses deux dernières minutes féeriques. Tout est réglé à la perfection de sorte à ce qu’on assiste à des actes uniques et différents à chaque fois, entrecoupés par l’interlude théâtral "To Behold A Magnum Opus". Difficile de se lasser et ce malgré l’absence totale de paroles (contrairement à ce que le titre du disque laisse présager), ainsi que la présence d’un rythme général plutôt modéré – excepté "Commencing Possession". On sent bien dans tout cela une certaine culture germanique. Une certaine rigueur, une certaine froideur, mais une efficacité remarquable, en tout point. Très peu de fausses notes sont à dénombrer ici, seulement quelques longueurs à déplorer.
Premier et dernier disque sorti sous le nom de Selzar, qui a d’ailleurs complètement disparu des radars depuis, ce Void Awake livre une musique intéressante et riche d’influences, permettant à tous de s’accrocher à un côté ou à un autre du wagon autrichien (sans mauvais jeu de mots bien évidemment) et n’en décrocher qu’à la fin de la pièce. Si vous voulez continuer à suivre le quidam, il a tout simplement décidé de poursuivre l’aventure sous le nom de Seth Angerer. Simple, efficace et pragmatique qu’on vous dit.