CHRONIQUE PAR ...
Wotan
Cette chronique a été mise en ligne le 01 juin 2021
Sa note :
11/20
LINE UP
-Marco Neves
(chant)
-Polak
(guitare)
-Dread Fred
(guitare)
-Didier Breard
(samples)
-Bud
(basse)
-Marto
(batterie)
TRACKLIST
1)Dirty Dance
2)Planet Crash
3)Unclean
4)Massive Hardcore Soldier
5)Mad Box
6)Sonic Life
7)Freak Machine
8)Human Attack
9)Evil Angel
10)One More Time
11)Never Give Up
DISCOGRAPHIE
La Syphilis est une maladie sexuellement transmissible. Les symptômes sont multiples et rendent la maladie difficile à identifier, la syphilis ayant depuis longtemps eu le surnom de Grand Imitateur. Si elle est détectée suffisamment tôt, la guérison n’est pas un problème ... Non, non, Les Éternels n’est pas devenu un magazine de santé publique. Le rapport avec cette chronique ? Eh bien la bactérie vecteur de la Syphilis n’est autre que Treponema Pallidum, et ce nom a inspiré le plus grand groupe français de la scène metal industrielle.
C’est durant la fin des années 80 que le public américain découvre l’Electro Body Music, cette version musclée de l'électronique dont les plus fidèles représentants à cette époque sont Front 242, Nitzer Ebb ou encore DAF, essentiellement des groupes anglais, belges et allemands. Certains musiciens des U.S.A. décident alors de lancer un pont entre les deux continents en mêlant cette musique profondément européenne aux guitares thrashs américaines. Ces artistes se nomment Al Jourgensen, Trent Reznor ou encore Sascha Konietzko, aidés et inspirés par les précurseurs que furent Killing Joke et Prong. Ensemble, ils créèrent le metal-indus, un phénomène qui se répandra sur tout le globe mais essentiellement américain à la base. Pourtant, un groupe français les rejoindra en 1989, Treponem Pal. Un de ces groupes hexagonaux légendaires, qui fait partie de la grande scène des musiques sombres françaises, aux cotés de Die Form et Trisomie 21, et dont la popularité est plus importante à l'étranger que sur nos terres.
Ils commencèrent avec du pur metal indus durant leurs trois premiers albums, martiaux et marqués autant par l’EBM que par le thrash et le hardcore. Puis évoluèrent sur leur avant-dernier disque, Higher, sorti en 1997, vers une musique plus dub. Onze ans plus tard, le groupe revient avec Weird Machine et un line-up complètement modifié. Il faut dire que le groupe ne fut jamais stable et le nombre de musiciens ayant collaboré avec eux est assez impressionnant. Marco est le seul membre restant du line-up de 1986, lors de la formation du groupe. Martin a participé à Higher et les autres musiciens furent recrutés pour l’occasion. De plus, Treponem Pal s’adjoint de deux invités prestigieux: Ted Parsons (membre de Prong) derrière les fûts et feu Paul Raven (Prong, Killing Joke et Ministry) à la basse. Toutes ces explications pour vous faire comprendre les attentes que les fans du groupe et d’indus pourraient avoir de cet album. Après tout, le retour d’un groupe culte du genre dont les albums furent considérés comme innovateurs et en avance sur leur temps, cela n’arrive pas tous les jours.
Et c’est au final une énorme déception au vu du potentiel. Engagés dans une foule de projets parallèles durant le long hiatus du groupe, les membres semblent avoir perdu de vue l'état de la scène actuelle et si sorti en 1989, Weird Machine aurait pu être révolutionnaire, il est juste banal en 2007. Entre temps, des dizaines de groupes se sont approprié les gimmicks propres à l'indus, et certains d’entre eux sont même des stars du genre maintenant. Alors plutôt que de nous proposer quelque chose de nouveau avec cette folie qui les caractérise, les Parisiens restent campés sur leurs acquis et ne font pas dans l'originalité. C’est du metal-indus tout ce qu’il y a de plus classique, avec des parties de guitares peu audacieuses, voire franchement plates et manquant cruellement d'originalité ("Hardcore Massive Soldier" et "Planet Crash"). Les samples sont utilisés sans abus ni parcimonie, juste ce qu'il faut pour créer une atmosphère sale et oppressante.
Orienté sur la rythmique et le côte martial et oppressant de l’indus, les compositions ne font pas dans l’accrocheur (il y a peu ou prou de riffs) ou le mélodique. Les seuls passages apportant une touche de mélodique sont les lignes de chant clair de Marco, qui se détourne alors du vocoder pour prendre une voix de crooner bluesy. Alors que la première moitié du disque est résolument sale et hardcore, la seconde partie reprend le tournant dub entamé sur Higher, via des nappes atmosphériques lourdes et rythmiques. Cette influence se retrouve dans certaines parties de "Sonic Life" ou encore "Freak Machine". Et paradoxalement, c’est lorsque le groupe se démarque de ses racines originelles qu’il nous propose une bonne chanson, en l'occurrence "One More Time". Très éloignée de l’indus, la composition est un mélange planant entre des nappes dub lourde et ambient, et le chant bluesy/rock de Marco.
Groupe légendaire de la scène indus française et mondiale, Treponem Pal ne surprend pas, et même pire, ne convainc pas. Il semblerait que son absence durant onze longues années ait nui à ses capacités à composer des chansons originales. C’est carré et bien produit (Ted Parsons est derrière les manettes), c’est pas désagréable mais il y manque quelque chose pour que l’on prenne du plaisir à l'écoute, et surtout pour que la légende renaisse de ses cendres.