CHRONIQUE PAR ...
Sebrouxx
Cette chronique a été mise en ligne le 01 juin 2021
Sa note :
10/20
LINE UP
-Ken Hensley
(claviers+guitare+chant)
-Jorn Lande
(chant)
-Glenn Hughes
(chant)
-John Lawton
(chant)
-Eve Gallagher
(chant)
-Ovidio Lopez
(guitare)
-Rafa Raposo
(guitare)
-Dani Saiz
(guitare)
-Antonio Fidel
(basse)
-John Smithson
(basse)
-Vicente Ruiz
(piano)
-Antonio Molto
(saxophone)
-Juan Carlos Garcia
(batterie)
-Tommy Lopez
(batterie)
TRACKLIST
1)(This Is) Just the Beginning
2)We're on Your Way
3)Blood on the Highway
4)You've Got It
5)Doom (Scene 1)
6)It Won't Last
7)Think Twice
8)Doom (Scene 2)
9)There Comes a Time
10)Okay (This House Is Down)
11)What You Gonna Do
12)Postscript
13)I Did It All
14)The Last Dance
DISCOGRAPHIE
Ressortie dans une édition Limitée-Collector-Ultimate-Deluxe, Blood On The Highway montre combien un album studio on ne peut plus commun peut prendre de l’ampleur lors de sa transposition sur scène. Arrivé dans les bacs au printemps 2007, le dernier effort solo de Ken Hensley avait pour objectif de raconter la life de son auteur dans un temps record de cinquante-trois minutes. Comme quoi elle tient pas à grand chose, hein, la vie. Cinquante-trois ans d’existence (un an par minute, donc) réduits à ces onze pistes de qualité très inégale : le clavieriste de Uriah Heep a-t-il eu les yeux plus gros que le ventre?
Pour cette mise à jour de l’été un peu spéciale car partagée entre déclarations d’amour et déclarations de guerre, je vais me permettre une infraction aux règles élémentaires de la Charte d’écriture des Eternels : la rédaction à la première personne. Pourquoi ? Parce que l’Éternel patron nous a laissé les (cc)clefs du site. Et ensuite parce qu’il m’est difficile de parler et par conséquent d’écrire sur Uriah Heep, groupe préféré d’un proche disparu pour vous la faire courte. C’est donc le plus subjectivement du monde que je mets d’entrée de jeu les points sur les “I” et le “H” sur le “Heep” : Uriah Heep appartient aux rares groupes dont la seule évocation me file une boule à l’estomac.
Mon courage pris à deux mains, je libère ensuite une mimine pour introduire le CD dans le lecteur idoine. Me disant qu’il ne s’agit pas d’un nouveau Uriah Heep, mais seulement de Ken Hensley bien décidé à tout nous révéler de sa vie en moins d’une heure, de son ascension à sa déchéance. Un peu comme un film type Phantom Of The Paradise toute proportion gardée. En gros, au programme, du grandeur et décadence avec un fond poétique et des chœurs à foison comme Hensley en a pondu des kilotonnes aussi bien avec le Heep qu’avec ses autres groupes ou en solo (rappelons au passage que «Blood On…» est son treizième scud perso). Treizième. Autobiographique. La barre est haute, Kenny, n’est-ce pas ? Faut pas être superstitieux surtout quand tu invites les copains (John Lawton, Glenn Hugues, Jorn Lande en tête de gondole), que tu enchaînes ensuite sur une tournée promotionnelle, et qu’un DVD Live va suivre dans la foulée (j’y reviendrai in fine).
Pour l’auditeur, faut en revanche éviter toute écoute par dimanche pluvieux en état dépressif même si le sous-titre de l’album -« When Too Many Dreams Come True »- laisse augurer un happy end dont nul n’aurait douté. Rassurez-vous : Hensley a survécu au Rock’n’Roll Circus, coule des jours heureux en Espagne et semble encore en forme sur DVD. Ouf, Blood On... est à mille lieux des délires schizo-persos, par exemple, d’un Roger Waters sur The Wall. Mais cela ne transpire pas le bonheur pour autant et ne mérite pas davantage de s’attacher les services d’un Alan Parker pour le mettre en images. Dans l’esprit et la mélodie, disons que j’ai plutôt l’impression de m’envoyer une galette semblable à la B.O. de Young Guns II par Jon Bon Jovi. Je commence à sentir des viseurs lasers sur mon front mais le titre éponyme (interprété par Jorn Lande) rappelle “Blaze of Glory”. Et la piste finale symphonique a des relents de “Sante Fe”. J’ouvre la parenthèse ciné. Mais si, soyez honnêtes, vous connaissez Young Guns II : un pseudo-western 90’s réalisé pour plaire aux djeun’s de l’époque et surtout aux filles, avec mon Jon qui chante au fond du saloon vêtu comme un cowboy en fin de stage initiatique chez les Apaches. Là, c’est pareil sauf que le saloon a été déserté depuis un bail et que Hensley a racheté le fonds de commerce pour nous narrer, le temps de l’happy hour, son expérience et sa déception du Rêve Américain (“You’ve Got It” en est la parfaite illustration, et peut sans conteste prétendre au titre de meilleur morceau Hard FM de l’album, et soit dit en passant Lande y excelle dans un registre très Coverdale, le père David étant d’ailleurs étrangement absent).
Les pistes mélo mid-tempo alternent difficilement avec les plus énergiques. Et derrière, le personnel (très compétent) suit le mouvement. Le guitariste a tout compris, par exemple. En gros, il prend le son clair quand c’est triste, signe que la vie d’Hensley part en quenouille (“There Comes a Time”, son clean+piano+solo de sax+pedal steel ou encore “What You Gonna Do”, son clean+dobro+piano+surtout Glenn Hugues). Et parfois le six-cordiste enclenche le canal saturé dès lors que l’auteur semble reprendre un peu du poil de la bête (“Okay (The House Is Down)”). Rien n’y fait et Hensley pour raconter sa vie préfère la longue Reverb et le profond Chorus à l’Overdrive From Hell. Sauf si l’usage de ce dernier permet de balancer un solo pleurnichard au possible comme c’est le cas sur la reprise de ”The Last Dance”, ultime piste langoureuse sur laquelle officie l’Orchestre Symphonique d’Alicante. Pour le coup (de grâce ?), Hensley, ça rime avec un peu trop avec cliché.
Coup de gueule donc à un Monsieur que pourtant j’adore et qui en son temps à fait faire un bond en avant à l’usage des claviers dans nos musiques de prédilection. L’emballage souvent sur-produit ne rend pas hommage à la beauté de certains textes et au déplacement de guests amis. C’est d’autant plus préjudiciable qu’après vision du DVD live enregistré à Hambourg l'année dernière, il faut se rendre à l’évidence : la mayonnaise prend. Pourtant votre humble serviteur craignait un délire grandiloquent digne de nos Opéras Rock à la Luc Plamandon-Élie Chouraqui. Mais non. La mélancolie sur scène dégage au contraire une puissance délirante que la version studio n’offre jamais, alors que les intervenants sont exactement les mêmes. Ils reprennent la quasi-intégralité de Blood On The Highway sur le disque 1 avant de s’attaquer au best of traditionnel de Uriah Heep sur le volume 2. Je m’arrête à “Lady in Black”, si cela ne vous gêne pas…