CHRONIQUE PAR ...
Flower King
Cette chronique a été importée depuis metal-immortel
Sa note :
15.5/20
LINE UP
-Roger Daltrey
(chant+harmonica)
-Pete Townshend
(guitare+chœurs)
-John Entwistle
(basse+chœurs)
-Keith Moon
(batterie+chœurs)
TRACKLIST
1)Heaven And Hell
2)I Can't Explain
3)Young Man Blues
4)I Don't Even Know Myself
5)Water
6)Shakin' All Over/Spoonful/Twist And Shout
7)Summertime Blues
8)My Generation
9)Magic Bus
10)Overture
11)It's A Boy
12)Eyesight To The Blind (The Hawker)
13)Christmas
14)The Acid Queen
15)Pinball Wizard
16)Do You Think It's Alright ?
17)Fiddle About
18)Go To The Mirror
19)Miracle Cure
20)I'm Free
21)Tommy's Holiday Camp
22)We're Not Gonna Take It
23)See Me Feel Me/Listening to You
24)Tommy Can You Hear Me ?
Titres Bonus:
-Substitute
-Naked Eye
DISCOGRAPHIE
Who, (the) -
Live At The Isle Of Wight Festival 1970 (DVD)
Attention les yeux ! Cramponnez-vous à votre siège parce que là, on va parler d’un live historique. Cela fait très solennel pour du rock & roll mais c’est la réalité : The Who à l’île de Wight en 1970, c’est tout de même un groupe au sommet de son art scénique, livrant une prestation fiévreuse (à deux heures du matin !) en pâture à un demi-million de festivaliers abasourdis. Vicieux, épique, furibard… avec l’image et le 5.1, c’est encore meilleur.
Les Who étaient en effet un groupe à voir autant qu’à écouter, tant les quatre individualités qui le composaient affichaient des comportements atypiques et complémentaires, en plus d’assurer comme des bêtes. Entwistle doit bien être le musicien le moins expressif de tous les temps, mais c’est pour ça qu’on l’aime ; Daltrey, flamboyant, se balançant constamment d’avant en arrière comme en proie à une transe mystique, joue le rôle du relais quasi-christique entre la Parole électrique d’un groupe résolument sauvage et les brebis égarées sur l’île jadis chantée par Delpech. Townshend plante à peu près toutes ses parties vocales, mais il compense par une énergie ahurissante. Entendre ses déflagrations soniques sur le "Young Man Blues" du Live At Leeds est une chose ; le voir se contorsionner et martyriser sa six-cordes sur ce même titre est plus impressionnant encore, un mélange de charisme et de puissance dont bien des groupes devraient s’inspirer.
Mais le héros de ce DVD, c’est peut-être bien notre batteur fou, Keith Moon, dont la consommation d’amphés devait alors équivaloir au PIB du Bangladesh, ce qui en fait une attraction visuelle à lui tout seul. L’amplitude, la frénésie et la vivacité de son jeu lors des parties musclées vont laisser bouche bée tous ceux qui n’ont jamais vu le bonhomme en action, car c’est très loin d’être du n’importe quoi ; preuve en est les moments d’accalmie dans lesquels il fait preuve d’une précision diabolique. Bon point d’ailleurs pour le montage qui ne s’axe pas exclusivement sur le couple Daltrey/Townshend, et qui prouve que chacun des quatre maillons de cette machine de guerre était indispensable à la réussite du tout.
Le répertoire, outre une bonne moitié de l’album Tommy, mélange allègrement les classiques du groupe, les reprises et les nouvelles compositions. Ces dernières sont mieux loties que les premiers, car jouées avec plus de passion et de vigueur : "I Don’t Even Know Myself", "Naked Eye" et surtout "Water" sont traversés de fulgurances et d’instants de parfaite communion avec les musiciens dont seuls les plus grands sont capables. À l’inverse, "I Can’t Explain" est expédiée sans génie, et "Substitute" est quelque peu dissipée. Au moins tous ces morceaux sont filmés de manière exemplaire pour l’époque, avec des angles de vue multiples et bien choisis ; facile ensuite d’en tirer un DVD, même si une restauration de l’image a été nécessaire.
On déplorera que le même soin n’ait pas été apporté à la partie Tommy du concert, de plus inexplicablement repoussée en fin de DVD alors qu’elle était jouée en plein milieu du show. Il faut croire que les cameramen étaient alors en bad trip, car non seulement des morceaux pourtant joués ce soir-là ne figurent pas sur le film ("Amazing Journey", "Sparks"...), mais en plus, et c’est le comble, certains plans sont utilisés plusieurs fois au sein de morceaux différents ! Passe encore quand il s’agit du même gros plan sur la guitare de Townshend pour un même riff, mais quand le contexte change totalement d’une fois sur l’autre, ça fait tâche, et ça ne passe pas vraiment inaperçu. Il n’y a bien que le final de l’album, sublime, qui échappe à cette réalisation approximative.
Les fans se consoleront avec une interview passionnante de Pete, probablement réalisée en 1996, dans laquelle il revient longuement sur les conditions houleuses du festival, son rôle dans le groupe, et l’évolution de ce dernier jusqu’à Tommy. Difficile de dire s’il emploierait le même ton mi-amusé mi-désabusé aujourd’hui, mais cela reste un témoignage enrichissant. Tout comme ce DVD, reflet d’une époque bercée d’illusions de grandeur qui allaient progressivement se casser la figure, victimes des excès qu’elles avaient malheureusement engendrées.