Vous n’en aviez sans doute pas entendu parler, mais de mars à juin 2008 a eu lieu le Guitar Idol 2008. Grand concours organisé via Internet, il avait pour but de révéler la nouvelle génération de guitar-heroes. Un genre de Star Academy pour shredder, l’infâme Nikos Aliagas et les prime-times à paillettes en moins. Le résultat nous parvient sous la forme d’une compilation des œuvres retenues par le jury (les internautes, en fait : environ 500.000 de partout dans le monde si l’on en croit les chiffres du label), dix-huit titres instrumentaux destinés aux amateurs de guitare.
Globalement, la tendance générale est sans surprise tournée vers la virtuosité. Mais heureusement, sauf exception, le déballage de notes ne se révèle pas aussi vain qu’on aurait pu le craindre de prime abord. La qualité globale de cette compilation est relativement élevée, même si de par sa nature même on y trouve de flagrantes inégalités. Les influences sont diverses même si là encore on peut dégager une tendance général pour tout ce qui peut se ranger sous l’appellation « guitar hero », comme ont pu l’être Satriani, Vai ou Van Halen. Du hard rock mélodique où à la place du chant, c’est une six-corde qui s’exprime. Pas vraiment de shred débridé ni de plans néo-classiques à la Malmsteen : le mot d’ordre semble avoir été de faire de titres mélodiques, expressifs et avec des phrasés au sein desquels se glisse la virtuosité. Ce qui immanquablement amène une certaine naïveté du propos, pour ne pas dire niaiserie, par moment.
On trouve logiquement à prendre et à laisser dans ces 18 titres. Beaucoup de hard-rock mélodique, donc (Daniel Gottardo, Marc Playle, Petchalov, Ben Randall et le grand gagnant du challenge, le brésilien Gustavo Guerra), mais aussi dans une moindre mesure du métal progressif (Silvio Vasquez, Gustavo Di Padua) voire du metal tout court (Denis Vlachiotis et son thrash dévastateur, Fernando Miyata qui semble très influencé par un certain Michael Romeo, et Chris Feener). Et parfois, des délires tout à fait personnels plus ou moins pertinents (le serbe Muris Varajic, ami de Emir Hot, et son shred oscillant entre le funk et les musiques d’Europe de l’Est, mais aussi Tom Quayle ou Lyle Watt qui, du haut de ses 15 ans, nous offre un Strat Jam dans la veine des improvisations de Joe Stump – c'est-à-dire pas toujours très réussies). Le propos est donc tout de même relativement varié sans s’éparpiller, et le niveau technique de tous ces jeunes poulains fougueux ne peut que rassurer pour l’avenir de la guitare instrumentale.
Véritablement international (on trouve des Brésiliens – la future patrie du shred, dirait-on – un ou des Anglais, Italiens, Bulgares, Argentins, Japonais, Russes, Bosniaques… et un jeune français de 17 ans, sous le nom de MattRach, prodige venant de Nord-Pas-de-Calais qui enquillait déjà à 13 ans sans sourciller des morceaux de Vai ou Satriani*), ce Guitar Idol 2008 est donc un bon instantané d’une partie de la planète guitare présente, et peut-être future. Malgré tout, son statut de compilation la rend difficile à écouter juste pour le plaisir. Elle remplira aisément son statut pour quiconque recherche un ou plusieurs nouveaux talents, que ça soit pour son propre plaisir ou dans une optique professionnelle – on espère que cette initiative ouvrira des portes à ces jeunes artistes – mais ne correspond pas vraiment à un achat qui ne répondrait pas à un de ces deux impératifs. Initiative absolument louable, donc, si tant est qu’elle débouche sur quelque chose de concret derrière.
Que deviendront donc ces 18 guitaristes ? Vont-ils retourner dans l’anonymat, condamnés à se cantonner aux tremplins et autres compilations-découvertes ? Ou l’un ou plusieurs d’entre eux vont-ils se détacher du lot et se faire vraiment connaitre ? Vu la jeunesse de certains des lauréats, tous les espoirs sont permis. En attendant, le succès de cette initiative se solde par une conséquence prévisible : la session 2009 est déjà ouverte. Amis guitaristes, vous savez ce qu’il vous reste à faire si vous voulez que votre nom soit cité ici dans un an.
*d'après mon estimé collègue Flower King, qui avait vu le jeune homme en concert il y a 4 ans, à l'époque où il faisait encore partie de l'atelier guitare de Marly (près de Valenciennes).