CHRONIQUE PAR ...
Cosmic Camel Clash
Cette chronique a été mise en ligne le 01 juin 2021
Sa note :
15/20
LINE UP
-Rainer Nygård
(chant+guitare)
-Marko Utriainen
(guitare)
-Aadolf Virtanen
(basse)
-Heikki Malmberg
(batterie)
TRACKLIST
1)Trail of Kings
2)Living Dead Superstar
3)Bad Sign
4)Resign from Life
5)Icaros
6)Light of the End
7)Chagrin
8)Through Difficulties to Defeat
9)Hammer
10)Into the Sea
DISCOGRAPHIE
La sacro-sainte trinité Suède – Finlande – Norvège présente des aspects divers. La Norvège est principalement réputée pour son black-metal misanthrope, la Suède pour le melodeath qui a fait sa gloire et le power mélodique bardé de claviers des Finlandais est devenu un genre en soi. Mais à force de vivre les uns à côté des autres des échanges ont lieu, et c'est ainsi qu'un groupe finlandais comme Diablo se révèle beaucoup plus proche de la scène suédoise que de la sienne. Sans s'y limiter néanmoins : malgré un manque de tenue sur la longueur Mimic 47 avait déjà imposé une personnalité composite, et Icaros ne la remet pas en doute.
Diablo continue effectivement à piocher dans tous les râteliers, et le métal présent sur Icaros étend son spectre du melodeath au heavy/thrash en passant par le metalcore voire le néo... sans effort apparent. Responsable principal de ce grand écart : Rainer Nygård, chanteur réellement impressionnant dans son genre et sur qui la plupart des fans de performance vocale devraient se pencher. Le potentiel présent sur Mimic 47 se confirme totalement : Nygård assure méchamment dans n'importe quel type d'ambiance grâce à une modulation sans faille. Son registre écorché se pratique avec ou sans notes, et le parallèle avec Matthew Barlow lors des parties claires-agressives reste plus que jamais d'actualité. Le chant mélodique posé et grave du bonhomme impressionne déjà sur le heavy gothique (on s'en serait douté) de "Chagrin", mais dès qu'il met du grain sa puissance le fait rivaliser avec les ténors du genre. L'autre caractéristique réjouissante conservée depuis l'album précédent est l'énormité du son : Icaros est un album qu'on peut s'envoyer à fort volume car sa prod est ample, puissante, claire, avec une basse qui ressort et des claviers très bien intégrés. Beaucoup d'atouts au départ, donc.
L'intro de "Trail of King" surprend par le côté hyper-mélodique des guitares qui taquinent Blind Guardian, une seconde plus tard c'est un riff énorme à la Scarve qui déboule... puis c'est l'explosion, et le placement du growl sur le riff start-stop comme le refrain à moitié chanté évoquent directement le Soilwork post-Natural Born Chaos. Sauf qu'au-delà d'un simple collage le titre est fabuleusement efficace, qu'il sait briser et varier ses plans dès qu'il le faut... et qu'il est doté d'une paire de gratteux de compétition. Les envolées lead des compères vont taquiner les références du power mélo, et sans atteindre le génie d'un Loureiro ils se révèlent très doués dans l'exercice. Toutes ces caractéristiques liées et re-dosées en permanence donnent le son Diablo, et le niveau de maîtrise comme de puissance atteint force le respect. Cette approche domine sur la première moitié de l'album : "Living Dead Superstar" taquine tour à tour le thrash et le metalcore avant que les soli ne viennent remettre une énorme louche de mélodie dans le tout, "Bad Sign" y va de ses accélérations rythmiques à la Jon Schaffer, tout ça tape très fort... mais le principal reproche fait à Mimic 47 était un manque de patate dans sa deuxième moitié, donc on n'est pas surpris.
Ô joie : il semble que Diablo ait décidé de ne pas retomber dans ses erreurs passées, et ils ont trouvé une manière intelligente de gérer l'écueil : varier le propos une fois arrivé à la moitié de l'album. Ainsi "Icaros" est un titre basé sur l'opposition entre breaks clairs presque pop et passages heavy basés sur un riff beaucoup plus martial que ses collègues, les nappes de claviers renforçant une approche très solennelle voire incantatoire. "Through Difficulties to Defeat" tape très fort avec son riff d'intro néo groovy et malsain, riff ensuite déconstruit rythmiquement sur un couplet asymétrique de haute volée. Et comme par magie le groupe passe de ce plan torturé à un thrash mélodique hyper direct, à des envolées symphoniques... l'intensité ne retombe jamais, elle va même crescendo. L'énergie brute thrash/melodeath de "Hammer" cueille au menton autant que les ambiances de "Chagrin" sont mélancoliques, et l'intention derrière un titre épique comme "Light of the End" fait vraiment plaisir : sans arriver au niveau de génie d'un Back To Times Of Splendor, Diablo semble dans la même optique de proposer un métal « complet », basé sur une synthèse presque exhaustive des émotions que cette musique peut provoquer.
Il reste trop de groupes cités dans cette chronique pour qu'on crie au génie : Diablo est encore tributaire de trop d'influences pour que la sensation d'avoir affaire à un poids lourd s'installe. Mais le chemin parcouru depuis Mimic 47 est remarquable, et si la puissance de cet album hyper fédérateur se confirme en live ça fera du bonheur dans les fosses. Des gens à suivre, assurément.