Vous connaissez Theocracy vous ? Parce que votre serviteur, non. Et comme le devoir passe avant tout, il va bien falloir se renseigner. Mais avant tout, une petite écoute s’impose. Et là, tout parait clair, sans même avoir besoin de se renseigner : Theocracy, c’est du heavy speed mélodique scandinave, point barre. Voilà, finalement, une écoute aura suffi à ôter les quelques doutes qu’il pouvait y avoir. Sauf qu’en fait, non, il s’agit d’un groupe créé sous l’impulsion du chanteur/guitariste Matt Smith, qui nous vient tout droit de la mère patrie, j’ai nommé les Etats-Unis.
Et pourtant, on s’y tromperait tellement l’émulation est parfaite. Un production bien épique avec ce qu’il faut de froideur pour donner l’impression que la galette sort tout droit des studios Finnvox, une voix haut perchée très claire n’étant pas sans rappeler Chris Bay de Freedom Call, en plus maitrisé, des refrains fédérateurs, de la mélodie en veux-tu, en voilà, de la double pédale, des claviers guillerets… À croire que le bonhomme à des gênes suédois. Mais cette impression ne durera que le temps des deux premières pistes qui sont certes jouées avec un certain entrain et un savoir-faire indéniables, mais qui pêchent par un manque de personnalité et d’ambition handicapants dans un style qui commence à vieillir dangereusement. Non il faudra attendre "Laying the Demon to Rest" pour que l’on rentre enfin dans le vif du sujet. Et là, force est de reconnaitre que ça devient plutôt bon : du riff de guitare bien lourd, de l’ambiance à couper au couteau, des rythmiques qui râpent les tympans sans pour autant oublier certains des éléments développés dans les deux premiers titres : un côté épique pas déplaisant, du refrain hymnesque dégoulinant, le tout saupoudré d’une petite couche de prog.
Oui, prog, vous avez bien entendu. Ce mot qui fait fermer les volets des grands-mères et qui fait pleurer les petits enfants. Car, toujours dans la piste "Laying the Demon to Rest" qui ma foi ressemble de plus en plus à une tuerie, on passe par une assez grande variété d’ambiances et de rythmes, notamment un petit blast-beat qui dépoussière bien comme il faut ainsi qu’une signature plus chaloupée. Heureusement, l’aspect progressif est plus structurel que rythmique et le tout reste écoutable sans devoir y sacrifier votre intégrité mentale. Bonne nouvelle, le standard de qualité, qui a désormais été posé assez haut, sera maintenu le restant de l’album. Après une power-ballad nommée "Bethlehem", qui arrive peut-être un peu trop tôt dans l’album mais qui permet de récupérer du pavé cité plus haut, on repart dans un heavy bien speed et bien burné qui rappelle Sonata Arctica avec la pointe d’agressivité supplémentaire qui va bien. Et ce n’est qu’un des nombreux habits que Matt Smith peut prendre, car on pensera immédiatement à Edguy dès les premières notes de la piste suivante. Là encore, l’émulation est de qualité sans pour autant faire dans la copie pure et dure sans personnalité.
Arrivé à ce stade de l’album, on enchaine tout de même depuis maintenant 5 titres des pavés de plus de 7 minutes en moyenne. Et ce n’est pas le moment de baisser sa garde, car le plus gros nous attend encore, alors considérons Martyr comme le calme avant la tempête finale : j’ai nommé le titre éponyme, qui tape lui dans les 22 minutes. Et, croyez-moi sur parole, les minutes que vous passerez à écouter ce titre ne seront pas perdues ! C’est véritablement une leçon à laquelle on a droit. Leçon vocale tout d’abord, car si Matt reste dans un timbre plutôt clair tout le long de ce titre, il s’adapte parfaitement en ambiance en se servant de sa large tessiture a bon escient. Et le bonhomme sait forcer un peu quand c’est nécessaire. Leçon de développement d’ambiances également. On reste tout d’abord dans un esprit heavy mélodique d’une fraicheur étonnante, avant de passer dans un power plus lent et donc plus propice au headbang sans que cela choque un seul instant, avec une efficacité de tous les instants. Pas beaucoup plus loin, on part dans un blast-beat apocalyptique qui mène tout droit, sans transition, vers un passage tout en émotion duquel toute saturation guitaristique est absente. Et le plus étonnant, c’est que tout cela coule de source !
Au final, ces 22 minutes, comme tout l’album, passent beaucoup trop vite. Une franche réussite que ce Mirror of Souls, voilà ce que c’est. Qui plus est, venant d’un pays duquel on ne les attend pas forcément dans ce style là. Bon dieu, que cette fraicheur et cette spontanéité font du bien. Enfin un groupe qui ne borne pas son inspiration et son ambition dans des codes réducteurs que tout le monde se sent obligé de suivre. Dommage simplement que cela ne dure pas tout l’album, mais à écouter, définitivement !