CHRONIQUE PAR ...
Cosmic Camel Clash
Cette chronique a été mise en ligne le 01 juin 2021
Sa note :
14.5/20
LINE UP
-Masha
(chant)
-Elio Alien
(guitare)
-Privacy
(basse)
-BH
(batterie)
TRACKLIST
1)Phoenix
2)Are you Breathing
3)The Hunter
4)I'm Perfect
5)Across the Sky
6)Emptiness of You
7)Far from the Dark
8)Deleted
9)No Destination
10)In the Air Tonight
11)My Own Army
12)Mangnolia
DISCOGRAPHIE
Vous voulez faire le vide autour de vous ? Allez dans une soirée de chevelus quelconques, attendez un blanc dans la conversation et prononcez distinctement les mots « néo-metal italien à chanteuse ». L'effet est garanti : après une période de franche moquerie (il se peut qu'on vous jette des chopes à bière vides donc faites attention), l'assemblée désolée décidera unanimement de vous ignorer et de repartir dans des discussions passionnantes sur le fait que Dave Lombardo encule Paul Bostaph les mains dans le dos. S'acheter une tranquilité est finalement assez facile dans le monde du métal.
Et pourtant cette stigmatisation ne serait pas totalement justifiée. Il est vrai que le dernier groupe italien correspondant à cet intitulé (Addiction Crew) était une véritable abomination, un genre de mélange poisseux entre Linkin Park et Evanescence la patate et l'inspiration en moins. Et ô joie, Exilia ne s'inscrit absolument pas dans cette approche ! Dès l'entrée en matière "Phoenix" on sent tout de suite qu'un élément va faire pencher la balance en leur faveur : Masha, vocaliste à tresses et à forte personnalité. Aux antipodes des minaudeuses R'nB qu'on a pu subir ces derniers temps (pensez à Jam Pain Society, mais pas trop longtemps car ça fait du mal), Masha est une de ces chanteuses qui fait plaisir car elle semble dotée d'une solide paire de burnes alors qu'en fait non. Le grain de sa voix est extrêmement plaisant : il donne au tout une pêche rock salvatrice quand elle chante en clair/agressif et permet même de basculer dans le méchant quand elle se met à beugler sur un mode hardcore. Sans atteindre le niveau de violence et de classe d'une Veronica Freeman (Benedictum) elle donne à My Own Army une saveur très corsée et assure à sa formation une identité forte par sa seule présence.
En plus de cette voix unique, Exilia peut se targuer de proposer une musique variée où mélodie, groove et puissance se côtoient pour un résultat souvent décapant. Les titres donnant dans un néo-hardcore survitaminé passent très bien : "Phonenix" est un burner de très bonne qualité, et "The Hunter" surtou alterne très bien les gros riffs du couplet et du refains aux descentes mélodiques des ponts. Idem pour les syncopes permenantes de "I'm Perfect" : ça pulse, c'est suffisamment varié pour qu'on ne s'ennuie pas, les refrains restent en tête et les variations vocales de Masha sont le petit plus qui fait plaisir. En général Exilia a la bonne idée de ne pas laisser des ficelles trop visibles régenter la composition de leurs compos, et comme ils alternent pas mal les genres c'est encore mieux. Dépassant la simple approche du groove mélodique, le groupe surprend franchement quand il bascule dans un heavy moderne aux accents épiques avec "Emptiness of You" : non seulement les montées d'intensité des guitares sont très bien menées, mais la voix de Masha colle tout aussi bien sur ce registre que sur le reste. On retrouve cette approche grandiloquente dans certains riffs de "Magnolia", avec un succès moindre néanmoins.
La démarche d'Exilia a cela de très agréable que leur volonté de se renouveler au fur à mesure de l'album est palpable. Elle s'exprime par le truchement d'arrangements souvent soignés dans les ballades : les guitares acoustiques et les choeurs presque grégorien font de "My Own Army" un jolie respiration, alors que le début au piano de "Far from the Dark" fait fortement penser à "My Immortal" d'Evanescence en moins irritant. Masha laisse pour une fois tomber l'agressivité dans sa voix et se révèle être une vocaliste accomplie : le grain dans sa voix n'est pas un cache-misère, elle sait réellement très bien chanter à la base. Dommage que les violons sur le refrain radio-friendly rendent le tout trop mièvre, un peu comme le refrain grandiloquent de "Accross the Sky" qui gâche des couplets pourtant ciselés et ambiancés à l'extrême. On peut également reprocher à l'album un ventre mou vers la fin : "Deleted" et "No Destination" n'ajoutent franchement pas grand-chose dans le genre catchy-groovy par rapports aux premiers titres du disque. Et il y a la reprise de "In the Air Tonight" de Phil Collins, faute de goût incompréhensible tant le résultat est laid... les choeurs hardcore hurlés donnent envie de casser le cd, c'est dire.
Bref, tout ça n'est pas mal du tout. Il reste des faiblesses à retravailler et des effets qui tombent à plat, mais le potentiel d'Exilia est bel et bien perceptible et ça fait plaisir. Donc une fois la bande de chevelus partie de votre bar métal, essayez mine de rien de placer My Own Army dans le lecteur du patron. Qui sait, quelques clients ouverts d'esprit vous remercieront peut-être...