En septembre 2009 est paru le deuxième opus de Ghost Brigade, Isolation Songs, digne successeur de Guided By Fire, qui avait fait, lors de sa sortie, fait l'unanimité. Cette dernière offrande aura un peu plus divisé le public, malgré le très bon accueil général. Il en découle l'éternel débat, de l'album mieux construit, mais qui perd l'innocence et la spontanéité du premier. Votre serviteur n'ayant jamais écouté son prédécesseur, c'est donc une oreille neuve et objective qu'il va tenter de dégager les caractéristiques de cet album à double tranchant.
La recette de Ghost Brigade est assez simple... ce qui prime c'est l'émotion. Beaucoup de morceaux ont en commun la structure de l'intro à la guitare, "Suffocated", "Into the Black Light", "Concealed Revulsions" entre autres, avec une suite, lourde et planante à la fois, alliée à la complémentarité du chant clair/saturé. Cette dualité se retrouve dans les guitares, avec l'art des refrains entrainants, presque entêtants et des couplets pleins de groove et de d'émotion. Arrêtons-nous ici pour la théorie, puisque Ghost Brigade c'est bien plus que ça, ce sont avant tout des atmosphères, plus précisément une atmosphère générale. Un savant mélange de Katatonia et de Paradise Lost, avec l'appui d'un spectre à peine perceptible de Porcupine Tree pour les ambiances de certaines mélodies, à la fois un tantinet rétro et pop soutenues par le clavier de Aleksi Munter (Swallow The Sun), omniprésent, discret mais indispensable. Pour comprendre, je vous propose d'analyser l'album selon certains points afin que chacun puisse s'en faire sa propre idée, puisqu'il y a une double lecture de certains aspects de celui-ci. Ce ne sont pas des défauts en soi, mais des reproches personnels, pour vous il peut même s'agir de qualités.
Parlons du son. Pour faire simple, cet album sonne tout simplement... Fascination Street studio et pourtant il n'a pas été enregistré dans l'antre de Jens Bogren. Puissant, couvrant tout le spectre audible, il n'y a aucune sensation de vide, à chaque instant l'on se sent entouré par la musique. Le genre de mix très froid, qui vous met une bonne claque, mais qui possède cependant un revers de la médaille. À faire un son trop puissant, on perd certaines subtilités lors des premières écoutes, le besoin de disséquer le son pour découvrir les richesses de leur musique devient indispensable. Une multitude de subtilités demandent à être découvertes, mais cela n'est possible qu'au bout d'un certain nombre d'écoutes, dès lors que les morceaux commencent à nous être familiers. Malgré cela tout sonne très naturel (mention spéciale à la batterie qui paraît très puissante tout en conservant son son acoustique) et surtout rien ne sature. Bref, je pense que vous avez saisi l'idée? C'est avant tout une question de goût.
L'autre point est du même calibre, mais concerne le chant: bien qu'ultra travaillé, celui façon « core » et arraché (avec une sensation de « noyé » due aux effets utilisés) peut à la longue être difficilement supportable. Mais est aussi présent, le chant clair, magnifique et touchant à souhait qui apporte de la légèreté, cela permet de varier les compos. De ce contraste naît une complémentarité des compositions. Le chant uniquement « core » se trouve dans "Suffocated", Lost in the Loop", "Architect of New Beginnings", "Birth" et "Liar". Seule "Into the Black Light" est uniquement en chant clair et enfin le mix des deux se retrouve dans quatre chansons: "My Heart Is a Tomb", "Concealed Revulsions", "Secrets of the Earth" (au passage ce morceau est le seul bémol de l'album), "A Storm Inside". La couleur et la personnalité des morceaux cités plus haut suit cette logique. Le problème réside dans le fait que chacun des chants est totalement linéaire dans son domaine. Une fois de plus, on aime ou on déteste, mais on n'y est pas insensible.
Bien entendu, il s'agit de grandes lignes pour vous donner une idée de deux caractéristiques qui ne concernent pas la musique en elle-même, mais la personnalité générale de l'album. Même si certains morceaux peuvent être mis dans le même panier en ce qui concerne leur structure (voir le premier paragraphe), certains ressortent du lot de par leurs spécificités. "Lost in a Loop" et son riff principal stoner à souhait, qui sent la fumée contraste avec le refrain très aérien et surtout son pont au violoncelle qui fait retomber la pression pour finalement... retomber dans un des instants les plus lourds de l'album. Le morceau qui suit, "22:22 - Nihil" est un instrumental de près de 6 minutes. On parle de Ghost Brigade pas de Malmsteen, ici la démonstration n'est pas technique mais mélodique et émotionnelle, le tout est une sorte de crescendo reposant et prenant comme rarement, de quoi toucher le coeur du plus hermétique des old School deatheux! Et enfin, troisième et dernier morceau choisi c'est "Birth", point culminant de l'album avec ses 10 minutes, qui n'est pas là non plus une suite de plans, mais une construction logique visant à se terminer sur un final de presque trois minutes... il n'y a qu'à fermer les yeux et écouter... Ce n'est pas verbalement descriptible, si ce n'est que la sensation d'être absolument « stone », le corps ne répond plus, c'est la musique qui nous transporte.
Voilà, vous avez matière à vous forger votre propre opinion sur leur musique, mais pour réellement apprécier cet album, il faut un certain nombre d'écoutes. Puisqu'au premier abord c'est la sensation de ressemblance et de déjà entendu qui prime, puis qui s'efface, pour laisser passer la richesse et la sensibilité des compositions au fur et à mesure des lectures.