CHRONIQUE PAR ...
Lucificum
Cette chronique a été mise en ligne le 01 juin 2021
Sa note :
13.5/20
LINE UP
-Gianni Poposki
(chant+percussions)
-Igor Nardin
(guitare+rogrammation)
-Uros Lipovec
(basse)
-Mathias Gergeta
(batterie)
TRACKLIST
1)Premonition
2)Terror
3)Deluders & Followers
4)Monarch
5)Demoncracy
6)Slavedriver
7)Rust
8)Non Individuum
9)Catarsis
10)Demagog
11)Holymen
12)Samsara
13)SM 02
DISCOGRAPHIE
Ah bien, tiens donc. Après quelques écoutes de ce Death Culture de bonne facture, proposé par un groupe relativement inconnu venant de Slovénie, je pensais en ces termes : « ah ben, il est sympa, cet album, plutôt bien fait et agréable à écouter, on croirait parfois entendre du Pain ou du Samael ». Et ô surprise : on peut lire sur le MySpace du groupe que Mas de Samael a participé à la pré-production et que Peter Tägtgren de Pain a mixé l’album dans son studio Abyss. Ceci explique surement cela ! Malgré donc un rapprochement plus qu’évident avec ces deux grands du métal, Death Culture a des arguments pour lui.
Déjà, une production en béton armée – ce qui est me direz-vous, la norme quand on sort des studios Abyss. Death Culture mixe allégrement les sonorités : grosses guitares propres mais agressives, batterie triggée aux touches électroniques, synthés et bruitages un peu indus, et voix aussi bien hurlées que parlées, radiophonées ou tout autre artifice visant à la rendre moins monotone. Le tout rend donc une bien bonne impression, moderne et dynamique. Mais c’est musicalement que Noctiferia a décidé de marquer des points. Leur death/electro/indus/gothique est un mélange qui, si on l’a déjà vu, est suffisamment maitrisé pour susciter l’attention. Dans les grandes lignes, donc, on peut rapprocher Noctiferia de Pain et Samael, comme nous l’avons dit, mais aussi d’un Rammstein en plus violent ou d’un Deathstars en moins gothique – voire d’un Fear Factory plus organique. Les ingrédients sont les mêmes, les proportions légèrement différentes, mais l’ensemble se tient parfaitement.
Car malgré un relatif anonymat dans nos contrées, Noctiferia existe depuis 1992. Certes, le début était black métal, et après des tas de démos, des live et des albums, il semble que la signature récente avec Listenable pour trois albums signifie l’entrée dans la cour des grands. Ce sont donc des musiciens vétérans (malgré des changements de line-up, deux des membres sont des membres d’origine) auxquels nous avons affaire, et ça se sent dans la maturité des compositions. Courts, efficaces, condensés et catchy, les treize titres de Death Culture respirent le professionnalisme et l’expérience. La voix de Gianni Poposki est un growl typé death mélodique, plus hurlé que grogné, mais qui parvient malgré tout à donner une assise et une brutalité à l’ensemble. Maintenant, il ne faut pas être gêné par cette délicate sensation de déjà entendu qui survient plus d’une fois : "Monarch" et les synthés de "Deluders & Followers" font clairement penser à du Samael quand des titres catchy et tout en binaire comme "Demoncracy" ou "Slavedriver" évoquent Pain. Mais après les déceptions que furent les derniers albums de ces deux groupes, il est tout à fait possible d’accueillir Noctiferia avec bienveillance.
Difficile de voir donc en Noctiferia un groupe innovant, tant son identité de 2010 reflète ses influences. Comment ne pas penser à Fear Factory à l’écoute de "Non Individuum", par exemple ? À Samael (encore une fois) à l’écoute de "Holymen" ou du côté arabisant de "Samsara" ? Et pourtant, Noctiferia se laisse écouter sans déplaisir, parvenant même à proposer des solos de bonne facture ("Rust", "Demoncracy") ou encore des titres plus violents, presque death métal, comme "Demagog". Visiblement anti-politique en général, Noctiferia nous assène malheureusement des paroles plutôt bateau (« Power Corrupts and Absolute Power Corrupts Absolutely ») le tout dans un état d’esprit de rébellion et une idéologie qui, semble-t-il, se rapproche du punk, ainsi que peuvent le suggérer la couverture et les photos du groupe. Encadrés d’une introduction et d’une outro sans grand intérêt, les onze titres restants ont donc l’avantage de mixer des influences variées quoique trop marquées, et de proposer un panel d’ambiance allant du martial au grandiloquent en passant par le violent.
Les déçus de Pain, Samael et autres Rammstein peuvent donc sans grand risque se rabattre vers Noctiferia qui fait les choses bien, sans originalité mais avec efficacité. Death Culture ne deviendra sans doute jamais un grand classique, mais si Noctiferia persiste et signe dans cette direction en remuant un peu mieux la soupe pour diluer les grumeaux, il y a de fortes chances que le prochain album soit une tuerie.