«Tiens donc, un live de Neal Morse, ça c’est original !» C’est ce qu’on est en droit d’attendre comme réaction de la part du fan de rock progressif moyen, qui ne voit là qu’un 4e live en moins de 5 ans, tous supports confondus (2 albums et 2 DVD). Cependant, quand on aime, comme votre serviteur, l’artiste et son œuvre, on ne peut que se réjouir, tout en craignant la redite, de la sortie d’un (excusez du peu) triple album live, enregistré sur le vieux continent. Alors, radotage ou innovation ? Ni l’un, ni l’autre, à vrai dire…
Commençons par parler du sieur Morse lui-même. Que l’on aime ou que l’on déteste, pour des motifs musicaux ou extra-musicaux, on ne peut lui enlever le fait que le gars Nealou aime et croit en ce qu’il fait! Pour peu que l’on arrive à mettre de côté l’aspect prêcheur exalté qui peut en énerver certains, la vie et les émotions qu’il arrive à instiller dans ses morceaux sont incroyables. C’est le cas sur ce live! Musicalement et vocalement impeccable, parfois dans l’excès mais toujours sincère, il fait osciller son public et ses auditeurs entre joie et tristesse, introspection et partage, recueillement et exaltation. Il communie avec ses fans à grand renfort de gimmicks musicaux et vocaux qui n’appartiennent qu’à lui, entre rock et métal progressif, de montées en puissance imparables, de duels guitares/claviers, le tout agrémenté de mélodies magnifiques et de quelques soli exécutés de main de maître par son compère Elisa Krijgsman. Une performance remarquable pour peu que l’on aime ou que l’on veuille découvrir l’œuvre déjà conséquente de Neal Morse.
De son œuvre, il est bien question ici. Ce triple live qui dure près de quatre heures couvre toutes les périodes de la carrière musicale de l’artiste. De Spock’s Beard ("At The End Of The Day" qui ouvre de manière admirable l’album, et la moins attendue "Walking On The Wind" issue de Beware Of Darkness, "I’m The Guy", tiré de Snow, mixée avec "Author Of Confusion") au petit dernier Lifeline, forcément à l’honneur ("Lifeline", "Leviathan", "The Way Home", "So Many Roads") en passant par ses œuvres phares ("Question Mark Medley", "Testimedley", "Help Me" et "Author Of Confusion" pour One) et un "That Crutch" relativement dispensable tiré de Songs From The Highway. Il n’oublie pas non plus Transatlantic avec un magnifique enchaînement "Stranger In Your Soul/Bridge Across Forever" pour clôturer le tout.
Alors parfaite, cette setlist? Pas totalement… Car si elle fait la part belle aux plus beaux moments de la carrière de Neal Morse, sa longueur peur repousser les plus craintifs (il n’y a qu’à voir la durée des morceaux sur les disques 2 et 3). De plus, l’enchaînement de morceaux longs, épiques diraient certains, ne laisse pas beaucoup de temps à l’auditeur pour digérer la richesse de la musique. Et quand on n’est pas habitué, ça peut faire beaucoup d’un coup, lasser voire même repousser l’auditeur le moins courageux! Le fan tatillon pourra également reprocher l’absence de morceaux issus de Sola Scriptura, après un DVD magnifique mais ne bénéficiant pas d’un support CD. Cependant, quand on aime, comment bouder son plaisir? Retrouver au sein d’un même album tous les morceaux cités ci-dessus, passer de "Entrance" à "The Spirit And The Flesh" sur la même galette, enchaîner "So Many Roads" et "Stranger In Your Soul", c’est le rêve du fan qui n’a jamais eu la chance de voir Nealou en live. Rien que pour cet aspect best-of, et malgré ses défauts, ce triple live vaut largement le coup.
Enfin, on ne pourrait parler d’un album live de Neal Morse sans causer de son groupe de fidèles néerlandais. En effet, le batteur Collin Leijenaar, rencontré au cours d’un concert aux Pays-Bas, a réussi à le convaincre de laisser son groupe de copains l’accompagner au cours de ses tournées européennes. Sacré coup de bluff! Bon, il faut dire qu’il est plutôt talentueux, le Collin, et qu’il n’a pas à rougir de la comparaison avec Mike Portnoy! De la même façon que les autres membres du groupe n’ont pas de complexe d’infériorité à avoir et remplissent leur rôle à merveille… Chacun des membres du groupe aura de nombreuses occasions de s’illustrer au cours de l’album: Elisa, le guitariste (excellent de justesse et de feeling), Henk le claviériste virtuose (écoutez la magnifique ligne de clavier sur "Entrance" dans le "Question Mark Medley"), Wilco le bassiste (rapidement mis à l’honneur sur "At The End Of The Day" et sa ligne de basse sautillante), et Jessica la choriste. Déjà présents sur le Question Mark Live et sur le DVD Sola Scriptura And Beyond, ils associent leur talent indéniable et nous prouvent tout au long de l’album leur bonheur de jouer aux côtés de ce grand monsieur qu’est Neal Morse.
Au final, ce triple live de Neal Morse est une magnifique offrande (une de plus) faite à ses fans et un très beau témoignage de la richesse de sa musique. Forcément un peu long, mais jamais poussif, sincère à l’image son auteur, cet album est une belle manière de découvrir l’œuvre du bonhomme pour le novice, et un achat indispensable pour les fans!