Aujourd'hui, on va une fois encore parler métal d'ici. Et très franchement c'est agréable de voir à quel point notre scène nationale se porte à merveille, ce malgré l'absence quasi totale de soutien des circuits médiatiques classiques (il serait même plus judicieux de dire que lorsque ceux-ci parlent métal, c'est le plus souvent uniquement pour le déboiter au travers de débats stériles et empreints de pudibonderie sur le droit du Hellfest à exister, par exemple). Fort heureusement, cela n'empêche pas nombre de groupes de continuer à envoyer du bois. Nephalokia est de ceux-là.
Et, mes bons amis, Nephalokia ne fait pas semblant. Œuvrant dans un métal moderne à tendance plutôt bourrin, les Toulousains n'ont pas peur des mélanges et en font même la base de leur cuisine, pas très diététique reconnaissons-le, mais finalement très digeste et empreinte d'une identité qui fait plaisir à voir pour un groupe si jeune. Membre du collectif Klonosphère, pouvant se targuer d'être le chantre d'une concentration assez folle de groupes de talent ces dernières années (Klone, Hacride, Trepalium, Mistaken Element and co.), on sent chez Nephalokia une véritable volonté d'être identifié comme membre de cette scène french metal récente et novatrice, en s'inspirant, majoritairement, de groupes d'ici, ce qui est assez rare pour être signalé. C'est donc bien chez Gojira, Manimal ou encore Eryn Non Dae qu'il faut aller chercher les principales influences des Toulousaings. Mais pas que. Non, la musique de Nephalokia est plus riche encore que cela, et tape également dans la scène postcore, certaines saillies planantes et progressives proposées par le groupe n'étant pas sans rappeler le travail d'un Devil Sold His Soul ou de Cult of Luna. Ces passages viennent assez souvent aérer l'album de minutes de calmes bienvenues pour permettre à l'auditeur de souffler un peu. Parce que le reste du temps, ça tabasse plutôt sévèrement. Pas forcément très élevée niveau bpm (peu voire pas de blast ou de séquences thrash jouées pied au plancher, renforçant le côté vraiment moderne de l'ensemble, mis à part sur le très rentre-dedans ''Calvaire''), la violence chez Nephalokia se décline à l'aune de sa lourdeur, de son côté barré (l'influence de Manimal est, je trouve, très présente, notamment sur le morceau titre) et de son groove massif et implacable, présent sur quasi toutes les compos.
Après une intro très typée deathcore US (''Dawn'') plutôt réussie, le groupe rentre vite dans le vif du sujet avec ''Sunshine'', morceau sur lequel le soleil ne brille pas tellement mais qui représente une très belle synthèse de ce que le groupe sait faire : syncopes, groove pachydermique, lead guitare distillant des ambiances plus que de véritables soli avec une réussite insolente, gros breaks core brise-nuque, refrain aérien d'une classe peu commune rappelant pour le coup la scène hardcore new school (Defeater ou encore Comeback Kid), bref que du bon. Au rayon des grosses réussites de cet album, on peut également noter le très bel interlude ''Passage'' et son feeling folk-prog qui ne surprend finalement pas tant que ça, ou le tellurique ''Vinyan'', qui comporte quelques riffs absolument fabuleux et un groove encore une fois foutrement bien équilibré. Le chant, entre hurlements écorchés typiquement deathcore et spoken word entraînants, est au diapason de toute cette belle qualité. La prod' est franchement bonne pour un groupe aussi jeune et disposant d'aussi peu de moyens, et le niveau technique est ici des plus élevés (et ouais, quand on veut jouer ce genre de son, mieux vaut toucher un peu plus que le gros Max Cavalera sur sa dernière et minable « conspiration »). Alors après, tout n'est pas parfait : bien que l'identité du groupe soit indéniable, il est encore très courant d'avoir l'impression d'entendre Hacride, Gojira ou encore Manimal sur les morceaux, mais on ne va pas non plus s'en plaindre tant les groupes précités sont des tueurs. Bref, encore un tout petit peu de taff pour se sortir de ce carcan et proposer un truc un peu plus personnel, et on ne sera vraiment pas loin de la grosse claque dans la face.
Je conclurais en revenant sur la petite cartouche mise à M. Cavalera un peu plus haut (bien que je respecte éminemment le bonhomme pour tout ce qu'il a apporté au métal ça va sans dire) : quand on écoute d'un côté cet album, d'un groupe totalement inconnu et qui ne va sans doute pas se faire une thune avec malgré la qualité indéniable de son travail, et de l'autre les grosses m***** que se permettent de continuer à sortir certains piliers de la scène (l'affreux Blunt Force Trauma par exemple) et qui vont leur rapporter un paquet de pognon, on se dit qu'il y a vraiment pas de justice. Ben ouais, paye ton lieu commun, mais ça fait du bien de le dire. Merde, et courage les mecs.