Richard Christy avait clairement annoncé la couleur lors de la promo du premier Charred Walls Of Damned : ce groupe n'était pas un one shot, et il avait bien l'intention de tourner avec le line up au complet et de remettre rapidement le couvert en studio. Et si les plans live évoqués dans l'interview qu'il nous a donnée l'an dernier ne se sont pas vraiment concrétisés (seulement une dizaine de dates aux States dans un line up light, avec Christy, Owens et des guests pour compléter), le nouvel album est bel et bien déjà là.
On ne change pas une équipe qui gagne, et c'est donc le même gang de tueurs au grand complet qui revient aux affaires. Les conditions d'enregistrement n'ont également pas changé, avec une grosse partie du boulot effectuée à distance. Du coup, pourquoi la magie du premier essai a disparu, ou du moins n'opère-t-elle que par intermittence ? Déjà, il y a une raison évidente, même si elle n'explique pas tout : Charred Walls Of The Damned a perdu son admirable sens de la concision, celui-là même qui avait fait débat, le public metal d'aujourd'hui n'étant plus très habitué aux albums de 35 minutes. Résultat, Christy a fait machine arrière et a décidé d'allonger la sauce : 12 titres au lieu de 9, d'une durée moyenne plus élevée (un seul titre de moins de 4 minutes, contre 6 sur le premier essai), pour 58 minutes de musique au total. Sans surprise, on trouve du coup quelques longueurs et redondances, pas mal de plans moyennement inspirés et même une poignée de titres plutôt bof ("Guiding Me", "Avoid The Light", voire "Ashes Falling Upon Us"), alors que l'album éponyme était un sans-faute de la première à la dernière seconde. Bordel, c'était si prévisible…
Autre petit point négatif par rapport au premier album, des compositions sans doute un peu moins variées dans l'ensemble. On dirait que Charred Walls Of The Damned a voulu affirmer un peu plus clairement son style, au risque de se passer de quelques éléments pourtant intéressants. Le groupe a parfois tendance à tomber dans des schémas de composition un peu prévisibles, là où il ne cessait de nous surprendre il y a à peine un an. Ici, en règle générale, les morceaux alternent couplet plus ou moins agressif et refrain dans une veine un peu plus aérienne et emphatique. Ceci dit, on ne peut que constater qu'il maîtrise son affaire à la perfection, et à partir du moment où il se lance dans ce type de compo, c'est quasiment le carton plein. Seul "Cold Winds" ne convainc pas particulièrement, le refrain n'étant pas à la hauteur du couplet très théâtral à l'ambiance assez dramatique. Dans une moindre mesure, on pourrait aussi parler du refrain de "Zerospan", très speed mélodique dans l'esprit et qui aurait mérité une charge de cavalerie légère et non le déballage de la grosse artillerie. Mais bon, Ripper c'est Ripper, on ne le refera pas maintenant !
Pour l'instant, j'ai l'impression de délivrer une impression plutôt négative sur Cold Winds On Timeless Days, alors il est temps de rétablir la balance. Des tueries, on en trouve à la pelle sur ce nouvel album, et ça commence d'ailleurs dès le premier titre : le solo d'intro est splendide, et que dire de ce refrain absolument magnifique ? Charred Walls Of The Damned continue de pratiquer le mélange des genres, comme sur "Zerospan" qui mélange intro death, couplet mélodeath et refrain speed mélodique, ou "The Beast Outside My Window", dont la longue et apaisante intro acoustique est suivie d'un blast beat ravageur. Le groupe se montre particulièrement à l'aise sur les morceaux agressifs comme "Lead The Way", voire carrément musclés comme "Admire The Heroes" et son couplet porté par un riff simple mais diablement efficace. Richard Christy est évidemment impérial, mais on saluera surtout la grande performance de Jason Suecof, à l'origine de pas mal de bonnes idées d'arrangements en lead et qui signe d'excellents solos, notamment celui tout en finesse et en touché de "Bloodworm", parfaitement raccord avec l'ambiance mélancolique de ce morceau.
Soyons clairs, Cold Winds On Timeless Days ne tient pas tout à fait la comparaison avec l'excellent album éponyme paru l'année dernière : disparition de l'effet de surprise, moins de variété, un peu de remplissage… Ceci dit, abordé autrement que sous l'angle de la comparaison, on se retrouve tout de même avec un très bon album ponctué de grands moments, à ranger dans le haut du panier de la production actuelle. Cold Winds On Timeless Days constitue une sorte de confirmation de l'ambition artistique de Charred Walls of The Damned, qui s'affiche plus que jamais comme un groupe à suivre.