Klone -
The Eye Of Needle (EP)
Klone. Si vous n'êtes pas frappé du terrible syndrome « c'est français donc c'est mauvais donc j'essaye même pas d'écouter sauf Gojira et encore mais bon quand même ils sont bien forts les cons » (il y en a, si si), vous connaissez forcément ce nom. En même temps ça fait un moment que les bonhommes sont dans la place. Assez méconnus jusqu'à il y a peu, la sortie de l'album Black Days, qui faisait montre d'un sens de composition assez peu commun, avait mis un gros coup de projo sur les poitevins et leur avait permis d'atteindre une certaine notoriété/respectabilité bien légitime dans le milieu.
Histoire de ne pas laisser retomber le soufflé, sortait ces jours ci un EP en format physique au prix tout modique de 4 boules. Si on peut s'interroger sur l'intérêt artistique profond de la démarche (le même EP en version numérique étant déjà dispo gratuitement et légalement sur internet), ça n'en reste pas moins une nouvelle sortie de Klone, et ça s'écoute avec plaisir. L'analyse sera brève, car avec trois morceaux (dont la durée cumulée atteint tout de même les 20 minutes, on parle quand même de Klone) dans la très droite lignée de ce qu'ils avaient produit sur Black Days, il n'y a pas non plus méga ripaille à se mettre sous la dent. La richesse est toujours au rendez vous, c'est indéniable, les chansons sont toujours aussi prog, fouillées, riches, entre métal moderne et rock barré technique, le chant est toujours aussi bon, mais putain, le même reproche que celui qui avait un (tout petit) peu gâché le kiff sur Black Days est indéniablement de retour dans la place : « putain, on dirait encore plus du Tool qu'avant ». Le mot (ou plutôt le nom) est lâché : Toolien. Ce groupe, et peut-être plus encore son chanteur, sont définitivement et indéniablement Tooliens de toutes parts.
Couplets, construction des morceaux, jeu tout en finesse des zikos, intonations du chanteur, quasi tous les éléments du spectre sonore développé par Klone rappelle, de près (le chant) ou de loin (la prod' et les parties plus gros métal qui tape, finalement assez peu nombreuses), la bande de génies de Dany Carey et Maynard James Keenan. Quelques éléments d'analyse lâchés comme ça : cet EP est remarquable d'équilibre. Après un premier morceau très calme et planant, tout en montées progressives pour le coup aussi post-corisantes que Tooliennes ("The Eye Of Needle Part. 1"), le groupe envoie la sauce avec autrement plus de vigueur (et surtout de lourdeur dans le son, finalement), sur un second morceau tout aussi ambiancé et et progressif mais légèrement plus rentre dedans et direct ("The Eye Of Needle Part. 2"). Le troisième morceau est donc, en toute logique, le plus virulent des trois (mais tout cela reste TRES relatif, on parle de Klone) avec une lourdeur et des intonations de chant qui ne sont pas sans rappeler le gros métal sudiste d'un Down ou d'un Pantera tirant vers le hardcore, le tout avec un groove de BATARD messieurs dames ("Monster").
Bref c'est du très haut niveau, comme souvent avec Klone, et l'auditeur passera un bon quart d'heure à l'écoute de cet EP, quels que soient ses genres de prédilection (évidemment si vous ne jurez que par le grind ou le brutal slamming death ça vous paraitra un peu gay). Après on est en droit de s'interroger sur le poids lourdissime de la filiation Toolienne sur le son et l'architecture de composition de ce groupe. On est pas dans le plagiat, loin s'en faut, mais l'ombre des géants américains plane sur de nombreux plans des poitevins, et il serait judicieux pour Klone, après un album et un EP plus fortement marqués par cet héritage que leursd autres sorties (du moins à mon sens), de se démarquer un peu plus à l'avenir.