CHRONIQUE PAR ...
Winter
Cette chronique a été mise en ligne le 01 juin 2021
Sa note :
11/20
LINE UP
-Count De Efrit
(chant + instruments)
TRACKLIST
1) Empty Earth
2) Filth of Mankind
3) Broken Trees
4) Last Men, Last Dreams
5) Forgotten Sounds
6) Sarabe Aramesh
7) Epic Suicide
8) Grey Dolls From Nowhere
9) Unwritten Story
DISCOGRAPHIE
Il y a des genres plus risqués que d’autres. De nos jours, il sera difficile de crier au génie face à un nouveau groupe de heavy metal classique, mais pour peu que ce dernier aligne quelques bons riffs, le fan moyen saura en général faire preuve de mansuétude. Certains styles minimalistes, comme le drone, le sludge ou le post-black, sont en revanche plus délicats à aborder : tel groupe y mettra suffisamment d’étincelle créative pour qu’on le classe parmi les précurseurs talentueux, tandis qu’un autre donnera une prestation si pauvre qu’on le rangera plutôt dans le même sac que le fameux Romano Chocolescu, si chers aux Inconnus. Si l’on ne classera quand même pas Mourner Portraits du one-man-band iranien Silent Path dans la catégorie des impostures, il est néanmoins assez difficile de réllement s’emballer pour cet album. Et évoquer les faits et gestes du petit moustachu allemand taré de la première moitié du XXème siècle ne change rien à l’affaire.
C’est tout de même une question d’étincelle, tout ça. Objectivement, les différences sont parfois minimales, surtout dans un genre comme le black limite ambient, entre un titre réussi et un morceau loupé. Cela tient beaucoup à l’intensité et la conviction que l’artiste, aussi bien (mal ?) intentionné soit-il, arrive à exprimer. Cette intensité n’est hélas présente que par moments sur Mourner Portraits. Les trois premières chansons sont vraiment moyennes : composées pour l'essentiel de guitares mornes, agrémentées (façon de parler) de claviers rappelant fortement Filosofem de Burzum et ses ambiances mortifères, répétant à l’envi une unique mélodie, elles ne sont pas sauvées par les quelques breaks que l’on peut entendre de ci, de là. Pas de quoi crier au scandale, mais c’est le minimum syndical qui est offert ici. "Epic Suicide" et "Grey Dolls From Nowhere" proposent une monotonie glauque guère plus inspirée que les trois premiers titres évoqués précédemment. Bref, pas mieux. La majorité de l’album est donc tout à fait dispensable, faute à une apathie générale assez patente.
Néanmoins, la flamme que possède Count de Efrit arrive à s’extérioriser par moment : après un début bien peu sexy, la seconde moitié de "Last Men, Last Dreams" gagne en intensité, et l’ambiance métallico-noire-grise-dépressive se fait tout d’un coup crédible et même, que cela soit dit, belle. "Sarabe Aramesh", quant à lui, offre une mélodie lancinante chantée clairement et mélancoliquement, très acceptable, bien qu’un peu répétitive (ce que l’on mettra sur le compte du genre pratiqué). De plus, et c’est là où l’artiste paraît le plus à l’aise, les titres purement ambient sont carrément bons : la pluie de "Forgotten Sounds" nous transperce tout autant que les notes qui l’accompagnent. Quant à "Unwritten Story", il s’agit certainement du meilleur titre de l’album, tant cette reprise de la mélodie de Noël "Jingle Bells" façon funérailles touche sa cible, comme Sopor Aeternus avait pu le faire avec la marche funèbre sur "The Goat". L’auditeur se sent tout d’un coup terriblement seul et désemparé. Comme quoi, et c’est paradoxal, tout espoir n’est pas perdu…
Je pourrais m’attarder sur le pays d’origine de l’artiste, et y chercher le pourquoi du comment, mais, ne connaissant rien de ce pays, je préfère éviter les poncifs en la matière et me centrer uniquement sur l’album. Sur son site officiel, Count de Efrit décrit sa musique comme du « sick funeral depressive black metal ». Mourner Portraits cherche effectivement à créer une ambiance de ce genre, mais n’y arrive que par moment. Les titres sont en général trop pâles, le black metal destructuré proposé ici est bien souffreteux. Néanmoins, Silent Path trouve par moment les ressources pour rendre ses chansons plus convaincantes, et notamment sur les deux moments purement ambient de l’album. Est-ce la direction que souhaite prendre l’artiste pour son prochaine œuvre ? Ca ne serait pas un mauvais choix de sa part…