En me mettant à écrire ce matin, je me suis dit « Ah, tiens, du metalcore, ça fait bien plaisir, ça fait si longtemps ». Ouais non bon, en vérité je vous le dis, ça m'emmerdait d'avance. Pourquoi ? Parce que je n'apprendrais à personne que ce genre devient de plus en plus générique et surpeuplé au fur et à mesure que les années passent, que le nombre de sorties dans le genre augmente, et la qualité générale baisse dangereusement, surtout quand on voit qui domine la scène : Asking Alexandria et consorts, soit des groupes résolument putassiers, et surtout des plus (auto)limités musicalement parlant.
Alors quoi, genre foutu, point de salut ? Dur de répondre, mais en lisant la fiche de presse des charmants Brightoniens de Bury Tomorrow dont on parle aujourd'hui, l'inquiétude s'instille rapidement. Les mecs pratiquent un metalcore britannique typique, tournent avec des groupes genre Alesana ou Attack Attack (groupe à propos duquel Gandalf le Gris aurait déclaré : « Fuyez, pauvres fous »), bref tout laissait à penser à une foutue catastrophe à la We Came As Romans et autres Sleeping with Sirens... Ben ça n'a pas vraiment loupé. Malgré un opener plutôt couillu voire assez tubesque (méchantes lignes de chant sur le refrain) laissant à penser qu'on aurait peut-être, finalement, à faire à un groupe de la qualité supérieure (type August Burns Red, Texas In July, This Or The Apocalypse et consorts), l'assez réussie "Redeemer", et un morceau suivant dans la même veine ("The Maiden"), les choses se gâtent assez vite quand la voix claire, jusque ici tout à fait supportable car assez rauque et puissante (le genre de voix qui ramène à la fin des 80's / début des 90's dans un stade lors d'un concert de rock burné), se fait mièvre et émo, ce qui quelque part ne pouvait pas louper... Bref, ça plus un titre comme "Knight Life", son riff faux djent tournant à vide, son ignoble refrain, son clip tourné en boîte de nuit (ouais ouais, comme un clip de Pitbull sauf qu'on remplace les latinas et black bonnasses par des petites hipsters tatouées à lunettes et les bad boyz par des coreux et des mécheux), ça commence déjà à gaver. Ce qui sauve ce groupe de la noire médiocrité est sa capacité certaine à pondre des riffs et des séquences assez géniales et à sortir les dents suffisamment souvent pour qu'on ne s'emmerde pas trop : intro et couplets, hors beatdowns fatigants, de "Message To A King" par exemple, mais le morceau se gâte hélas assez vite, avec une voix claire qui lâche les chevaux émo, et pas pour le meilleur.
Ce qui le fait tout de même demeurer dans la fange est est cette incapacité totale à se détacher des codes du genre, pourtant devenus parfaitement insipides tant ils ont été répétés à l'infini sur une période courte : ces foutus beatdowns assommants sont encore et toujours de la partie ("Lionheart", intro efficace mais mon Dieu, déjà entendue environ 100 fois au carré, et presque toutes les autres d'ailleurs). L'absence totale de recherche sur la guitare rythmique lors des refrains aussi, tout bon groupe de metalcore qui ne se respecte pas et veut signer chez Nuclear Blast ou Metal Blade se contentant de foutre une lead jouant toujours la même vieille ligne mélodique mélodeath éculée, et la rythmique banane un riff hardcore mélodique ralenti tout basique, que la batterie suit benoîtement. C'est très rageant car les couplets sont presque tous excellents (même sur l'assez vilaine "Honorable Reign") dès que les guitaristes sortent du schéma aliénant beatdown de débile + lead larmoyante... Encore une caractéristique du cahier des charges metalcore respectée à la lettre : gâcher son potentiel technique sous des tonnes d'artifices vocaux ou de production, encore une fois surgonflée aux hormones. Le reste de l'album appelle au même constat : ce genre tourne en rond, ça devient flippant. Même quand le niveau technique est relevé et les capacités de composition réelles (intro de "Bitemarks" ou d'un "Abdication Of Power" salement plus burné, par exemple), tout est gâché par ces scories récurrentes, dont très peu de groupes de la scène semblent parvenir à se détacher. Résultat, un album où presque tous les morceaux se ressemblent, où la voix insupporte la moitié du temps (et encore, on occulte la voix hurlée, également hyper générique, totalement désincarnée et interchangeable avec n'importe quel groupe du genre, elle n'apporte pas grand chose). Et en plus cet album est beaucoup trop long pour un truc aussi générique, on s'en sort plus. Bref, un opus au concept axé sur la royauté, mais dont le résultat n'a rien de royal, ni même de princier. Éventuellement un petit baronnet de campagne musical, au mieux...
Bref, virez moi ces refrains, virez moi ces beatdowns, virez moi ces voix bien trop émo, et on commencera peut-être à avoir un truc qui ressemble à quelque chose. Ah bah après c'est sûr qu'on passe moins dans Metal Hammer et Kerrang ! du coup, mais au moins on peut se dire que sa musique ne pourrait pas être pratiquée par n'importe quel autre groupe du genre. Pourquoi ne pas avoir cherché plus encore dans la direction d'un "1603", morceau vachement plus heavy et old school dans l'esprit, et qui fonctionne très bien ? Un groupe a fait ça, il y a quelques années, oser à nouveau mixer des éléments old school thrash death à son metalcore moderne. Ben ce groupe c'est Sylosis, groupe de metalcore anglais de base devenu par ce biais l'un des groupes les plus excitants de la scène... Exemple à suivre les mecs, prenez en de la graine.