CHRONIQUE PAR ...
Lucificum
Cette chronique a été mise en ligne le 01 juin 2021
Sa note :
14/20
LINE UP
-Mike Majewski
(chant)
-Ruben Rosas
(guitare+chant)
-Chris Andrews
(basse)
-Eric Park
(batterie)
TRACKLIST
1) Legalize Homicide
2) Fifty Ton War Machine
3) Conceived in Sewage
4) Fucked with Rats
5) March to Megiddo
6) Today We Die, Tomorrow We Kill
7) Heaving Acid
8) Carved into Ecstasy
9) Parasitic Eruption
DISCOGRAPHIE
Tout cela pourrait n'être qu'une de ces ridicules batailles d'experts, du genre de ceux qui coupent des cheveux en 60, ergotent des heures durant sur un infime détail quant au mode de reproduction des diptères et en viennent aux mains pour savoir si, oui ou non, Devourment a vendu son âme au grand capitalisme. La raison ? Oh, trois fois rien : le chant est presque devenu compréhensible...
Jusque là, Devourment (Dallas, Texas), c'était du brutal death option raclure de bidet, à savoir un chant extrêmement grave, monolithique, incompréhensible, ce que dans notre jargon de techniciens on appelle le « grouik », tant ce son guttural ressemble à s'y méprendre au cri d'un cochon qu'on égorge à la petite cuillère. Et aujourd'hui, tout a changé. Les fans sont perdus. Le monde est choqué, déstabilisé. Comment ? Non, ils n'ont pas engagé André Matos au chant, n’exagérons rien. Mais pour la première fois dans la carrière de Devourment, on distingue des syllabes dans le chant de Mike Majewski (qui a repris le micro depuis 2005, date de reformation du groupe suite à l'incarcération en 2002 de Ruben Rosas, chanteur initial du groupe maintenant à la guitare). En tendant l'oreille, il est même possible de distinguer ici ou là un mot, même s'il est difficile de savoir duquel il s'agit – si tant est que cela ait la moindre importance.
Bref, la révolution est en marche, et il y a gros à parier que les fans vont remplir les forums d'invectives entre les partisans de la syllabe et ceux du cri du cochon, mais finalement, dans tout ça, qu'en est-il vraiment quant à la qualité de ce Conceived In Sewage, dont la couverture romantique et douce annonce la couleur ? Eh bien il faut bien admettre que même en mettant une demi-goutte d'eau dans son sang, Devourment reste extrême, brutal et sans concession. Comme d'habitude, le blast n'est pas présent de manière permanente, mais la violence du propos est toujours accentué par ce chant qui, quoiqu'on en dise, reste très « grouikesque » la grande majorité du temps, totalement raclé et puissant, comme dans tout brutal death qui se respecte. La production made in Rutan est calibrée, efficace et bien équilibrée entre la puissance et le côté cradingue affectionné par les fans de brutal death. Et du coup, les 33 minutes de Conceived In Sewage remplissent leur office, à savoir vous poncer les tympans avant de vous donner un grand coup masse dans la tempe.
Les puristes peuvent continuer de crier à la corruption, à la sortie de l'underground – une signature chez Relapse, ça n'est pas rien – et au fait que Devourment ait cédé aux sirènes du mainstream, peu importe : Conceived In Sewage est un bon album de brutal death, granitique et pesant. Alors bon, ne boudons pas notre plaisir, les amateurs de grouik peuvent toujours se renvoyer Unleash The Carnivore, personne ne leur en voudra.