Dan Swanö. Aujourd’hui ce nom est connu d’un nombre important de chevelus, et pas de façon abusive, bien au contraire. Que ce soit pour ses multiples groupes, dont on citera principalement Pan. Thy. Monium., Edge Of Sanity et Bloodbath, ses plus que nombreux featurings sur des albums divers et variés (sur "Death League" du dernier Entrails pour le plus récent) ainsi que ses très prolifiques travaux en tant que producteur (Diabolical Masquerade, Nasum, Opeth…), le travail du bonhomme a toujours été remarquable par sa qualité. Lorsqu’il se lance en solo, deux ans après l’éclatement d’Edge Of Sanity qui avait commencé à pondre des albums inférieurs à ses chef-d ’œuvres passés, on peut légitimement craindre un Cryptic ou un Infernal bis. Mais ce serait mal connaître le géniteur de Crimson.
Sur Moontower, la formule pratiquée est assez originale, puisque sonnant assez nouvelle : un death metal mélodique (l’héritage d’Edge Of Sanity se fait sentir) avec des claviers mis bien en avant et un orgue Hammond (Swanö étant un grand fan des 70s, de même que son confrère Âkerfeldt) un poil en retrait, mais tout de même du plus bel effet. Puisqu’il est un album écrit en solo par un des celliers du charnier Pan. Thy. Monium., on pourrait craindre que trop d’expérimentations parasitent les morceaux, les rendant abscons. Il n’en est heureusement rien, puisque lesdits morceaux sont pour la plupart construits comme des chansons normales, avec couplet-refrain. La grande force de cet essai en solitaire réside d’ailleurs ici : la structure classique permet une assimilation facile, et une mémorisation en un court laps de temps, sans empêcher de fréquentes réécoutes, de par la qualité élevée du tout.
Le son de guitare, puissant, et plutôt orienté sur les graves, à la façon des Entombed et autres Dismember, ne possède cependant pas leur rendu « crayeux ». Mais cela ne l’empêche pas de faire d’exquises montées dans les aigus à l’occasion de solos et mélodies du plus bel effet ("Uncreation"). Les nombreux riffs très efficaces (bien que servant le plus souvent à faire une base pour les claviers) démontrent le talent de Swanö sur cet instrument, passant comme des lettres à la Poste. Et lorsque la six-cordes se pare de ses atours acoustiques, avec une voix claire bien sentie par-dessus ("The Big Sleep") ou en solitaire, renforçant un rendu émotionnel déjà fort ("Encounterparts", excellente instrumentale avec le meilleur passage au clavier de ces 46 minutes) on ne peut que fondre devant les mélodies imparables qu’elle distille.
Cependant, la star incontestée de l’album reste le clavier. Si vous y êtes allergiques, pas la peine de tenter l’aventure Moontower. L’ex-Edge Of Sanity s’en sert ici pour ajouter sur tous les titres des leitmotivs confondants de beauté. Certains de ces élans pourront parfois se montrer un peu trop guillerets et plus adaptés à du power metal ou de la pop (bien que cela ne soit qu’un ressenti personnel) mais le reste du temps, ils ne font que faciliter l’assimilation tout en magnifiant les compositions (le break au piano de "Add Reality", amen) dans un canevas d’airs légers, participant grandement au pouvoir énorme d’accroche de l’album. Il se trouve parfois secondé par un orgue Hammond qui bien que moins audible sait aussi se rendre indispensable ("Creating Illusion", une des seules pistes que je trouve un chouïa en dessous du lot).
On assimile facilement cet album grâce à ses nombreuses mélodies, il est vrai, mais il arrive à ne jamais être rébarbatif, puisque très diversifié. Son côté progressif renforce encore le bonheur d’écoute, puisque l’auditeur dévoué est, après la première expérience (déjà très concluante), prêt à tout pour connaître ce disque par cœur. Il n’y a pas de doute à avoir sur ce skeud, c’est un petit joyau de death mélodique comme on en trouve peu. De plus il est original (peu d’ersatz de In Flames/Dark Tranquility/Edge Of Sanity ajoutent de l’orgue Hammond et mettent le clavier au premier plan tout en réalisant un album diversifié) et est le fruit du labeur d’un seul homme. Ne serait-ce que pour ça on s’incline bien bas devant un album qui ne mérite quasiment que des superlatifs. Seul la légère baisse de "Creating Illusions" tire légèrement le tout vers le bas, mais ce n’est pas un motif suffisant pour passer à côté de Moontower.