CHRONIQUE PAR ...
Droom
Cette chronique a été mise en ligne le 01 juin 2021
Sa note :
16/20
LINE UP
-Alison Garner
(chant)
-Elliot Guise
(guitare)
-Lee Woods
(guitare)
-Michael Savage
(basse)
-Tom Adams
(batterie)
TRACKLIST
1) Point Zero
2) Seven Hours
3) Ease Down
4) In Flames
5) Nothing Ever
6) Lights
7) Rise
8) 4am
9) With You
10) Let's Go
11) Give Me Your Love
DISCOGRAPHIE
Une jeune femme vous jette un coup d’œil. Détachant le regard de votre smartphone, vous vous en apercevez. Elle le remarque et détourne immédiatement le regard vers ses pieds. Gêné mais touché, vous sentez comme une tension dans l'air. Aller l'aborder ? Cela semble tentant, mais ce serait prendre le risque de briser l'état de stase qui enveloppe ce tableau du quotidien qui, pour une fois, semble moins morne qu'à l'accoutumée. Vous regardez de nouveau dans sa direction : personne. La fille s'est évanouie. Vous êtes seul. Comme d'habitude. A une différence près : vous avez découvert un possible.
Lights, le premier long-format de The Fauns, est une petite pépite de shoegaze / dreampop. La signature du groupe de Bristol chez Invada Records, le label d'un Portishead, n'est pas étonnante ; pas plus que la tournée récente effectuée en compagnie en compagnie d'Alcest. L'ensemble de ces formations partagent en effet une même vision vaporeuse de la musique. Lights nous embarque pour le monde ouateux que l'on connait si bien pour peu que l'on ai un jour posé l'oreille sur - au hasard - un certain Loveless des My Bloody Valentine. Ici comme ailleurs, les notes deviennent des nappes et les textures s'accumulent. Les couches de guitares se superposent jusqu'à ne plus former qu'un tapis de coton et de plumes. Au sein de cet océan d'ondes, la voix douce et sensuelle d'Alison Garner (la fameuse fille au regard fuyant) se fait discrète à l'extrême, trop contente de pouvoir se réfugier derrière ce mur de fumée.
Suivant les codes propres au shoegaze, Lights se déroule sans heurts ni faiblesses. Sur un schéma classique - qui n'a rien de surprenant pour qui connait le mot « shoegaze » - , le groupe parvient toutefois à varier son propos. Ici, le rythme sera lent et lourd ("Nothing Ever"), plus loin, la mélodie prendra le dessus ("Lights"). Les instants de calme succèdent à ceux de paix, tandis que l'ensemble de l'album se dévoile finalement comme une invitation au bien-être et au laisser-vivre. Les mélodies sont toutes soignées et mises en valeur par la production faussement « noisy » exigée par le genre. Que ce soit sur la mélancolissime "4am", ou sur les invitations amoureuses de titres comme "With You" ou "Give Me Your Love" (qui clôt le discours sur une teinte rose bonbon), Lights est un album qui, de bout en bout, fait du bien. C'est tout cela qu'il faut retenir : discrétion, classe, fragilité, douceur, etc. Un champ lexical plutôt féminin, ma foi.
Le premier album des Fauns fait partie de cette catégorie - rare - d'albums qui remplit l'esprit et qui fait du bien à l'âme. L'ensemble est précieux et délicat, tandis que rien ne déborde du rêve. Tout, sur Lights, semble une invitation à la paresse. Le temps s'arrête, la vie bat son plein et rien d'autre ne compte. Sans esbroufe, sans vouloir réinventer un genre, le groupe de Bristol débarque chez nous, et l'on espère désormais le voir rester encore un peu.