12 novembre 2016
-
Caen (Hérouville-Saint-Clair) - Le Big Band Café
Les concerts se font parfois rares en terres normandes. Aussi, lorsqu'un groupe du calibre d'Anathema décide de nous rendre visite (ce n'est pas la première fois et nous les remercions), il s'agit de ne pas rater le coche. La salle est petite ? Qu'importe. Cet Evening with Anathema (comprenez : sans première partie, en petit comité, presque à la maison) s'en accommodera à merveille.
«
An evening with... Anathema » : une soirée rien que que pour eux, et rien que pour nous, également. Pas de première partie ! Pas d'attente ! Euh... presque, car problème : si le concept «
zéro-première-partie » est effectivement assuré, le concept «
zéro-attente » laisse à désirer. Que celui qui a décidé de l'ouverture des portes à 20h, et d'un début de
live sur scène à 20h45 (auquel il faut ajouter les 10 minutes de politesse normande) aille se faire battre ailleurs. L'attente est. tellement. longue. et. statique. et. c'est. presque. impoli. Non, sérieusement ! Démarrer la soirée sur une telle erreur, sur une heure de retard, a de quoi rendre ronchon. Mais ! Les lumières s'éteignent pour enfin (!) laisser place à Anathema ! Enfin ! Enfin... presque ! Car nous ne sommes plus à une minute près, l'introduction - médiocre, se voulant sombre et impressionnante - choisie par le groupe - dure une nouvelle petite infinité de temps ; pas moins ! Tant et si bien qu'à la fin de la fin, Anathema parvient finalement à fouler les planches avec une entame... invraisemblable (a priori intitulée "Gotyou To"). Le seul morceau non identifié du set. Est-ce un morceau nouveau toujours en phase de test, comme il en sera présenté de nombreux ce soir ? Un morceau du passé qui aurait échappé à notre connaissance ? Nul ne sait... En tout cas : un véritable pétard mouillé, fadasse, et, qui plus est, servi par un son plein de grumeaux (tout s'arrangera bien vite à ce niveau-là, et heureusement). Inutile d'épiloguer : cette entame de concert nous laisse bougon, grognon, insatisfait. Heureusement, Anathema raccroche bien vite ses wagons, et nous avec, en redirigeant le set vers un classicisme qu'on pourrait presque leur reprocher. Juste de quoi poser l'ambiance propre aux concerts du groupe, avec ce petit truc en plus : un véritable dialogue avec le public entre chaque morceau, d'une sincérité et d'une franche camaraderie à toute épreuve. Ce concert, c'est un concert entre potes, entre amis, on se connait, on rigole. Anathema : l'un des groupes les plus chaleureux, les plus humains, les plus honnêtes qui soit avec son public. L'expression «
concert de fonctionnaires » trouve ici son antithèse la plus parfaite. Il y a d'ailleurs fort à parier que pour beaucoup, ce concert d'Anathema est une première : ceux-là on de quoi être ravis. Le public est toutefois étonnement non-
metallesque, et plus âgé que d'habitude. Effet des mers du nord, toutes proches, il est également plus sage qu'à l'accoutumé, notamment en fin de set, alors que tout est pourtant réuni pour se défouler un peu. Au cours de la soirée, le groupe égrène les pistes de ces disques les plus récents. Toujours les mêmes titres, pourrait-on râler, que ce serait une très juste remarque. Mais force est d'admettre que "Closer" ou "The Beginning and the End" passent toujours à mereille l'épreuve de la scène. Sans parler du bel "A Natural Disaster" durant lequel Lee Douglas et sa magnifique voix ne manque jamais de nous donner des frissons. Cette soirée réservait en outre deux surprises, majeures :
1) Une fin de set en l'honneur de l'album
Judgement (1999), aka «
l'album français » d'Anathema. En effet, les anecdotes racontées lors de la soirée nous font comprendre le lien unique liant
Judgement à la France lors de sa conception. Tout le monde semble s'en amuser, tandis que les autres, dont je fais partie, savourent déjà ce qui va suivre : une clôture de soirée en enchainant les quatre premiers titres dudit album. D'emblée, ce sont d'intenses nuits pluvieuses et sombres qui ressurgissent dans la tête de celui dont
Judgement a bercé la prime jeunesse. Ce début d'album, l'un des points clef de toute la discographie du groupe, voire de toutes les discographies de tous les groupes du monde (oui oui !), est un régal à savourer en live. Une surprise intégrale en faisant naître une autre : pas de "Fragile Dreams" pour terminer le set, mais une reprise de l'instrumental "Orion", par Metallica. Quand on vous dit que tout est réuni pour partager un peu d'énergie, c'est que c'est le cas. Une fin de concert magistrale.
2) De nombreux morceaux de l'album à venir ont été présentés. Le prochain album sera enregistré avec le producteur des Mogwai, en condition de studio-live. Cette mini-tournée est donc un prétexte pour rôder lesdites nouvelles pistes, ce soir au nombre de cinq (ou six, selon la nature de "Gotyou To"). Cassons les codes et essayons-nous donc au piste par piste, en plein live-report, qu'à cela ne tienne !
"John Martyn" - Votre serviteur est perdu, ne sachant plus à quoi a bien pu ressembler ce morceau. Pas d'info. Webzine à la noix. Et dire qu'ils (ne) sont (pas) payés pour ça ! En tout cas, c'était surement très bien. C'est Anathema, dont l'on parle, zut !
"Ghost" - Un beau morceau calme, qui met Lee à l'honneur, à la manière de "A Natural Disaster". La piste raconte l'histoire de l'homme ayant disparu dans l'album
A Fine Day to Exit (2001). Joli moment.
"Springfield" - A priori, ce morceau serait le petit nouveau chouchou de l'ensemble du groupe. Et il faut dire qu'il y a de quoi aimer ledit morceau, avec ses vrais faux airs de Mogwai. En cadeau,
le lien vers la vidéo de "Springfield" prise par notre forumeur Vaijuju ! Venez sur le forum, on s'y sent bien !
"Bricks" - Woah... Anathema fait soudainement débouler un morceau classiquement rock, classique dans sa structure, qui n'est pas sans évoquer les "Panic" et autre "Pulled Under at 10000 Feets a Second" mais renouvelés d'une efficacité remarquable. Une petite perle d'énergie mélancolique, de rock britannique, d'Anathema nerveux dans sa superbe.
"The Optimist" - Nouveau morceau ou morceau solo de Danny Cavanagh, ceci n'est pas bien clair. Ce qui l'est, c'est l'origine du titre (qui évoque la rencontre avec un migrant Syrien, d'un optimisme ayant inspiré l'artiste). Une jolie ritournelle, qui demandera quelques écoutes avant de se révéler pleinement.
Pour faire simple, et conclure ainsi ce paquet de mots sur cet Evening with Anathema : un très beau concert, qui a fait peur sur le départ avant de nous réconforter en tout point. Une setlist originale et unique, un dialogue authentique, une musique magistrale, une nostalgie dosée à merveille. C'était la cinquième fois pour votre scribouillard, et pas la dernière.