CHRONIQUE PAR ...
Cosmic Camel Clash
Cette chronique a été mise en ligne le 01 juin 2021
Sa note :
15.5/20
LINE UP
-Mr Hreidmarr
(chant)
-Mr Heinrich Von B
(guitare+programmation+chant)
-Mr Valnoir
(basse+chant)
-Mr Sylvicious
(batterie)
TRACKLIST
1)L'Hymne à la Joie
2)Cosa Nostra Klub
3)The Martialist
4)Total Eclipse Of Dead Europa
5)Vote For Winners
6)Die Holzhammermethode
7)Dinner Is Ready
8)The Doomsday
9)Inexorable Parade
DISCOGRAPHIE
Ultraviolence Über Alles avait traumatisé pas mal de monde lors de sa sortie en 2002. CNK signifiait alors Count Nosferatu Kommando et le groupe de Hreidmarr officiait dans un electro-metal corrosif à souhait en plus d'être volontairement inhumain et martial dans l'approche. Aujourd'hui le vocaliste a quitté Anorexia Nervosa, et ce qui apparaissait comme un projet secondaire est devenu son mode d'expression principal. Revenu sous le nom de Cosa Nostra Klub, The CNK signe avec L'Hymne à la Joie un album massif.
The CNK reste le groupe de Jean-Sébastien Ogilvy alias Mr Heinrich Von B, compositeur en chef... mais les nouvelles recrues ne sont pas non plus là pour faire de la figuration. Jean-Emmanuel Artfield-Lautrec (alias Valnoir) signe ainsi l'univers graphique de cet album, en particulier cette pochette renvoyant directement à l'art totalitaire et qui a valu au groupe de se faire censurer par la FNAC qui l'a obligé à coller un sticker par-dessus. Cet univers est en total accord avec le look de militaires décadents affiché par les membres, et l'approche conceptuelle de CNK est d'autant plus soignée qu'elle est en symbiose totale avec la musique. Difficile en effet de faire plus visuel que cet Hymne à la Joie qui prend par surprise et fait bouffer à son auditeur un mur de samples symphoniques, et ceci dès son intro qui envoie le thème bien connu de Beethoven en version surmultipliée. L'ampleur de la production de Stefan Bayle (Anorexia Nervosa) est ahurissante à ce propos : on a littéralement l'impression de se prendre un orchestre philarmonique dans la gueule, et ça ne fait que commencer.
Le côté électro si présent du premier disque a donc largement laissé sa place à un côté orchestral grandiloquent et absolument énorme. "Cosa Nostra Klub" est à ce titre une gigantesque baffe : l'intégration des chœurs d'opéra et des cuivres aux riffs de guitare laisse pantois, Hreidmarr se déchire les cordes vocales dans un registre hurlé aigu et le tout est catchy au possible en plus d'être méchamment violent. C'est presque la notion de métal symphonique qui est à revoir avec cet album, et le soi-disant film score metal de Rhapsody est enfoncé. L'intensité des samples de "Martialist" est telle qu'en fermant les yeux on pourrait sans souci se croire dans une salle de cinoche version THX / Dolby devant une scène d'action de Matrix. La batterie est également devenue bien plus organique : les toms résonnent et le son mécanique comme l'absence volontaire de groove d'Ultraviolence Über Alles sont oubliés. Dans cette approche symphonique la guitare et la basse sont en pur soutien, ce qui renforce cette atmosphère martiale qui fait le lien avec le CNK époque Count Nosferatu Kommando.
Les parties orchestrales ne sont pas linéaires : on passe de Wagner à Danny Elfman à des choeurs de péplum ("Die Holzammermethode"), le point commun étant l'intensité. L'electro refait surface au moment où on ne l'attend pas : "Vote For Winners" renoue avec les sons synthétiques de claviers, et le groupe réussit même à lier ces sons à l'orchestre sur l'épique "Dinner Is Ready". Les refrains sont chantés comme s'il s'agissait de slogans, renforçant le concept général de bande-son de dictature dégénérée. Par contre il faut admettre que la formule du groupe ne réussit pas autant à tous les titres : "Doomsday" est un titre décousu bien que son côté technoïde en fasse une probable tuerie en live et "The Inoxerable Parade" présente des longueurs dispensables. En général on peut d'ailleurs dire que le groupe retrouve rarement la puissance incroyable de "Cosa Nostra Klub" : cette chanson est une telle tuerie que les autres (pourtant très honorables) pâlissent en comparaison. Par contre une chose ne déçoit jamais : le chant furieux de Hreidmarr qui confirme là son statut de hurleur de première classe.
Intense comme rarement, brutal, dérangeant, cet album ne pâtit que de quelques brisures de rythme qui nuisent à son écoute d'un trait. Il reste en tous cas une brillante démonstration de renouvellement musical et pose un nouvel acteur de poids dans le paysage extrême, acteur complètement imprévisible qui plus est. Et même s'il est constitué de « poor homeless nobodies, fallen idols wannabees », on a au final bien envie d'adhérer au Klub. Peut-être justement pour ça d'ailleurs...