CHRONIQUE PAR ...
Bigtonio
Cette chronique a été importée depuis metal-immortel
Sa note :
18/20
LINE UP
-Steven Wilson
(chant+guitare+piano)
-Richard Barbieri
(claviers)
-Colin Edwin
(basse)
-Chris Maitland
(batterie)
TRACKLIST
1)Buying New Soul
2)Access Denied
3)Cure for Optimism
4)Untitled
5)Disappear
6)Ambulance Chasing
7)In Formaldehyde
8)Even Less [Full Length Version]
9)Oceans Have No Memory
DISCOGRAPHIE
Ces fameuses faces B ont toujours été pour les artistes des opportunités en or de présenter des œuvres plus progressives et moins traditionnelles. Porcupine Tree s’est brillamment plié à la règle et nous offre en 2001 près d’une heure de reprises d’anciens titres et de compositions nouvelles, à un niveau de maîtrise encore peut-être jamais atteint. Pourquoi me demanderez-vous? La raison en est simple. Loin d’être un collage malhabile d'un ensemble de chansons hétéroclites, Recordings se paie le luxe d’être un album d’une fantastique homogénéité et de créer une atmosphère sombre et nostalgique propice à un torrent d’émotion dans lequel le quartet nous entraîne sans retenue.
Le talent de Steven Wilson n’est pas étranger à la réussite actuelle du groupe, cela n’est plus un secret pour personne. Pour autant, la face cachée du compositeur est au moins aussi intéressante que ses influences actuelles, plus metal et people, comme en témoigne son album de 2002 In Absentia, de bonne qualité par ailleurs. Cette face cachée, très tourmentée, et peut-être héritée de la période électronique de l’artiste, Steven Wilson nous la montre sans pudeur dans Recordings : des atmosphères sombres et oppressantes, une utilisation pléthorique des claviers en autant de sons fantomatiques étranges, des vocaux fantastiques et lancinants, des propos surréalistes et erratiques, autant d’ingrédients qui font de cet album une œuvre à part entière dans la discographie de Porcupine Tree.
Recordings est à mon avis un des seuls albums du quartet qui réussit a assumer complètement son identité, hors des chemins controversés de la pop facile qu’emprunte parfois Porcupine Tree au détour de ses albums (le *pire* pour moi restant ce Lightbulb sun *…* = tout est relatif !!!). Au programme donc, des ballades atmosphériques divinement inspirées ("Buying New Soul", "Cure For Optimism", "Disappear") entrecoupées de pistes plus musclées mais toujours aussi progressives ("Even Less", "Ambulance Chasing"). L’alchimie opère sans douleur, et on se réveille en sursaut au bout d’une heure d’un voyage sonore encore jamais soupçonné, dans un univers diaphane tissé d’une fine dentelle de mélodies inoubliables.
Car oui, à n’en pas douter, cet album propulse les évolutions actuelles du rock progressif dans une autre dimension. Steven Wilson mixe sans complexe les parties de violoncelle, les soli de toms et percussions, sa guitare magique couplée à sa pédale wha-wha fétiche (ce type chante vraiment avec sa guitare, c’est phénoménal !), et tous les effets sonores qui lui semblent pertinents. Autant le dire tout de suite, si la profusion de sons vous rebute, n’écoutez jamais cet album, dont la formidable subtilité de composition ne se révèle pleinement qu’au bout de trois à quatre écoutes. On se surprend toujours à remarquer un petit détail étonnant qui nous laisse admiratif devant tant de créativité et d’ingéniosité.
La production est bien sur parfaite, comme tous les albums de Wilson par ailleurs. Le leader de Porcupine Tree peut en effet se targuer d’être à l’heure actuelle un des maîtres incontestés de l’enregistrement studio pour tout ce qui touche de près ou de loin à du rock progressif, de même que Devin Townsend dans sa branche « metal » respective. Tout est parfaitement audible, des délicieuses lignes de basse exotiques de "Even Less" au violoncelle fabuleux de "Buying New Soul" en passant par les claviers torturés et atmosphériques de "Cure For Optimism". Seule petite ombre au tableau peut-être, le fait que cet album soit vraiment plus progressif que les autres empêchera beaucoup de gens ayant des préjugés sur ce style de musique de l’apprécier. Paradoxalement, cet album reste complètement abordable musicalement et peut constituer un bon angle d’approche du prog pour les amateurs de pop un peu aventureux.
En définitif donc, je ne saurais tarir d’éloges au sujet de cet album qui doit trouver sa place dans la discographie de tout vrai fan de Porcupine Tree. J’ai envie de citer Baudelaire qui disait de cet album : « Là, tout n’est que luxe, calme et volupté, quelle oeuvre de guedin ! ». Oui Charles, oui ! Une œuvre d’art trop peu connue du public qui gagnerait immensément à accéder à la renommée. On objectera toutefois que le fait que cet album soit sorti en édition limitée numérotée (vingt mille) nuise considérablement à sa diffusion !