CHRONIQUE PAR ...
Cosmic Camel Clash
Cette chronique a été mise en ligne le 01 juin 2021
Sa note :
15/20
LINE UP
-Veronica Freeman
(chant)
-Pete Wells
(guitare)
-Chris Morgan
(claviers)
-Jesse Wright
(basse)
-Paul Courtois
(batterie)
TRACKLIST
1)Dawn Of Seasons
2)Shell Shock
3)Burn It Out
4)Bare Bones
5)Within The Solace
6)Beast In The Field
7)Legacy
8)Nobodies Victim
9)Balls To The Wall
10)Steel Rain
11)Seasons Of Tragedy
DISCOGRAPHIE
Imaginez-vous que certaines personnes se plaisent à répéter que le heavy-metal est mort. Et s'il est évident que le heavy des origines n'a existé que lors de ses... origines justement et que le genre traverse une période d'apathie ces temps-ci, affirmer qu'il a disparu au profit des styles plus modernes que sont le metalcore, le mélodeath ou le néo est un peu fort de café. Car de temps à autres un groupe réussit à ranimer la flamme du heavy traditionnel et à balancer un album solide et réjouissant dans le genre en question. En ce début d'année, ce rôle revient à Benedictum.
Peu de chanteuses ont réellement fait bouger la scène ces dernières années : on ne compte plus les Tarja-clones, les growleuses ne sont plus inhabituelles... en gros mis à part la fantabuleuse Agnete de Madder Mortem les vocalistes féminines hors normes ne se sont pas bousculées au portillon. Ça ne pouvait pas durer, et Veronica Freeman risque donc de traumatiser beaucoup de monde. Imaginez un chant masculin de type heavy eighties, aigu, râpeux, nasal, le type de voix élevée au Jack Daniel's qui fait tripper les chevelus à patches... et faites sortir cette voix d'une donzelle à la plastique avantageuse. Le choc est assuré. Avec son timbre de papier de verre Veronica donne littéralement l'impression d'avoir une gigantesque paire de couilles, et ce n'est d'ailleurs que lors de moments calmes comme "Steel Rain" qu'on peut réellement détecter qu'il s'agit d'une femme derrière le micro, sa voix non saturée sonnant d'ailleurs fort bien. Très, très impressionnant.
Musicalement, Benedictum donne dans un heavy burné au son boosté aux hormones qui lie une orientation générale de pure tradition avec des incursions de modernité très bien senties. On rencontre donc des riffs de bikers extrêmement pêchus, des soli de guitare comme à la grande époque... mais aussi quelques plans où la violence monte soudainement d'un cran. L'intro thrash de "Shell Shock" en fait partie ainsi que la déferlante de double et de guitare après les soli de "Burn It Out", passage qui fait d'autant plus plaisir que le refrain du morceau est limite FM et que tout ça se tient sans souci. Les claviers sont le plus souvent très discrets mais sont variés quand ils s'expriment : piano au début de "Beast In The Field", thème de synthé au son prog sur "Legacy" (dont le riff fait plus power-metal que heavy), sons spatiaux en fond sur "Steel Rain", c'est à chaque fois judicieux. Cette volonté de se renouveler vaut pour les compos qui ne se ressemblent pas entre elles tout en gardant une identité forte.
La force de Benedictum c'est que malgré la présence constante d'éléments modernes le feeling général reste fondamentalement roots. Que le batteur envoie la double plus que de raison ou qu'il y ait des chœurs et des nappes liturgiques au début du gigantesque titre final (onze minutes qui passent en un éclair) n'empêche pas qu'on a toujours l'impression d'écouter un bon vieux groupe de heavy. Cette aptitude à capturer l'esprit du heavy traditionnel passe évidemment par le chant (qui, homme ou femme, peut reprendre "Balls To The Wall" en étant crédible à ce point ?) mais aussi par un sens du refrain-hymne qui fait rarement défaut. En fait le principal défaut de l'album est la longueur excessive des morceaux qui dépassent souvent les cinq minutes : il est dommage qu'un groupe avec une volonté si palpable de varier le propos finisse par énerver en faisant trop tourner ses plans. Même un refrain très réussi comme celui de "Beast In The Field" finit par gonfler quand on l'écoute trop de fois : on le saura qu'il y a une bête dans le champ, quoi ! Dommage...
Sorti du titre final (qui donne dans un métal prog racé), Seasons Of Tragedy est un album de heavy comme on aimerait en entendre tous les jours. Juste assez moderne pour renouveler le genre, juste assez traditionnel pour être crédible, c'est une alchimie fort bien dosée que voilà. Tous ceux qui théorisent la mort du heavy-metal en tant que genre devraient poser une oreille là-dessus...