CHRONIQUE PAR ...
Merci foule fête
Cette chronique a été mise en ligne le 01 juin 2021
Sa note :
14/20
LINE UP
-Julien Pras
(chant+guitare)
-Jimmy Kinast
(basse+chœurs)
-Mathieu "Matgaz" Gazeau
(batterie)
TRACKLIST
1) (Alien Grounds)
2) Apex III
3) The Whinery
4) Mindreader
5) Under The Hood
6) Friendly Fire
7) Prodigal Sun
8) Shot In Providence (bonus)
DISCOGRAPHIE
Une promenade au pays du fuzz et des grands espaces, du monde ? Voici le programme simple mais alléchant que propose une nouvelle fois Mars Red Sky sur son troisième enregistrement longue durée à l'intitulé évocateur, puisque l'apex peut s'apparenter à un sommet - musical, on suppose - et plus précisément à « un point imaginaire de la sphère céleste vers lequel se déplace le système solaire ». Le résultat s'élèvera-t-il à la hauteur de ces promesses astrales ?
Providence, leur dernier ep, est à peine sorti au tout début de cette année 2016 que les Bordelais reviennent avec un album sous le bras - le titre "Shot in Providence" issu, on s'en doute, du format court sus-évoqué figurant en tant que bonus sur son successeur. Dès les premières notes, l'affaire semble entendue - dans tous les sens du terme : les Mars Red Sky n'ont pas changé leur style d'un iota et l'ensemble des chansons va se plier à un schéma quasi immuable. Celui-ci débute soit par un arpège cristallin délicatement égrené à la guitare électrique (pas de chichis acoustiques), soit par un motif scandé dans des graves monolithiques – voilà pour l'essentiel des variations. Ensuite, tous les fondamentaux véhiculés sur les productions antérieures sont à nouveau déclinés : un tempo lourd qu'aucune accélération ne viendra troubler – pas de ralentissement non plus, ou alors on parlerait de funeral doom; un son abrasif, aimanté par les basses fréquences, qui s'engouffre dans le bas-ventre comme une foreuse géante creuserait les sables bitumineux; des accalmies et des vrombissements. Et des pédales d'effet, plein.
Ici se situent les limites du Rougeoyant Ciel Martien, mais aussi ce qui en fait sa beauté. Car une fois admise une indubitable linéarité rythmique et harmonique, défricher les vastes territoires bâtis par le trio girondin, entre accords bourdonnants et délicates mélopées, se révèle grisant. Tels des sortilèges de lévitation, les motifs obsédants se succèdent et expédient la victime consentante dans les spires impalpables des songes. Si les généreuses doses d'écho et de réverbération qui irradient chaque note expliquent en grande partie ce dépaysement sensoriel, celui-ci est magnifié par le chant séraphique de Julien Pras qui survole les frappes et les grondements de ses acolytes. La voix enchanteresse du leader s'affirme de façon déterminante dans l'équilibre sonore de sa formation, contrepoint aérien qui extirpe cette dernière du tout-venant stoner dominé par une certaine rudesse vocale. Dès lors, et bien qu'il ne soit pas aisé d'effectuer une sélection dans un recueil aussi homogène, les pistes finales se distinguent, notamment parce que le chant se pose dès les premières mesures et transcende les séquences instrumentales : ainsi "Prodigal Sun" évoque les chansons « indiennes » des Beatles, le chaloupé "Friendly Fire" une ambiance western, tandis que l'angélique "Under The Hood" résume idéalement la démarche générale.
Entre grâce et pesanteur, douceur et âpreté, Apex III (Praise for the burning Soul) vogue avec aisance sur les crêtes d'un hard rock d'une élégante lenteur. Façonné par une écriture un peu trop systématique, il est en grande partie sauvé de la monotonie grâce à une production tirant le meilleur des contrastes qui le structurent, dont d'ensorcelantes parties vocales. Répétitif et pulsionnel, l'album possède donc les défauts de ses qualités, dont la principale d'entre elles est de propulser l'auditeur dans un voyage cosmique sans prise préalable de substances hallucinogènes. Une musique à écouter dans le train, en balade ou au lit. Et dans une salle de concert, bien sûr.