- Docteur, je fais des rêves étranges.
- Je vous écoute, mon fils.
- Comment ça « mon fils » ? Vous n’êtes pas un toubib ?
- Si, bien sûr. Médecin de l’âme.
- Ah merde, je suis justement en train de rêver.
- C’est fort possible, mon fils.
- Mon père, j’allais vous raconter un songe bien curieux, mais vu que je rêve, là, je me demande si ça vaut bien la peine.
- C’est vous qui voyez…
Allons bon, Chevallier et Laspalès, manquait plus que ça… Et pourquoi pas Eddy Mitchell non plus ? « Pas de boogie-woogie avant la prière du soir… » N’empêche, on resterait dans le contexte. Mais quand même, rêver d’une messe dirigée par Aaron Stainthorpe et Ian Anderson, ça fout les chocottes. Surtout quand on découvre que l’orgue est tenu par Rodger Hodgson et que dans l’assistance se cachent quelques membres de Xerxès. Non vraiment, ça ne tourne pas rond. C’est la foire au n’importe quoi. Prêcher le doom par le prog.
- Mon fils, vous ne rêvez pas. Dieu, dans son immense sagesse, a conçu Pantheist.
- Le groupe belge ?
- Eux-mêmes.
- Je me disais bien que ça ne pouvait être que belge…
- Mon fils, vous allez froisser vos lecteurs wallons.
- Mes quoi ?
- Oui, d’accord. Mais entre vous et moi, il est pas si mal cet album, non ?
Il a le mérite d’être original, c’est sûr. De pousser l’expérience initiée par Godsend (ah les débuts de Holy Records…) jusqu’au bout. Mais le mariage – à trois, bouh, c’est péché - entre la lourdeur, la grenouille de bénitier et le prog gentil, c’est très inconvenant. Ian Anderson faisant des mamours avec Aaron et Rodger… drôle de vision. Et puis, il est inégal. Vachement inégal. Toute la première moitié de "The Storm", quel ennui. Heureusement que la seconde, un superbe dialogue entre piano et batterie, est autrement plus inspirée. "4.59", c’est juste un intermède pinkfloydien un peu rasoir, quant à "Brighter Days", n’en parlons pas... Alors qu’est-ce qu’il reste, finalement ? Trois titres ? Seulement trois titres… Oui bon, en tout, ils font plus de vingt-cinq minutes. Vingt-cinq minutes de brillance ? Oui. De brillance, c’est ça, et d'émotion aussi. "Broken Statue" version lourde de Jethro Tull époque Aqualung – Aqualung, c’est pas n’importe quel album quand même. "Be Here", touchant prêche d'un groupe qui a dû écouter Godsend dans sa jeunesse. Et puis "Live Through Me" ou « comment arriver à foutre un piano à la Elton John et me foutre la chair de poule ». Un vrai miracle... Quel drôle d’album quand même... La pauvre fillette de l’Exorciste, elle s’en démettrait les cervicales…
Pantheist a fait fort avec cet OVNI écclesiasto-doomo-prog. Le dernier album à ce jour des Belges n’a dû séduire que les fans de… je sais pas de quoi, en fait. En tout cas, si vous aimez les mélanges détonants et ne craignez pas quelques immersions dans l’eau bénite, tentez votre chance et passez outre les longueurs – car il y en a.
- Vous parlez tout seul, mon fils ?
- Non, j’étais avec mes lecteurs.
- Vos quoi ?
- Non rien.