-Mon père ! Que faites-vous donc ?
-Désolé… *Blam !*… ma fille… *Blam !*… Mais y a des moments *Blam !*… où y en a marre d’être miséricordieux ! *Blaaaaam*
-Oh non, mais vous y êtes allé fort là ! Regardez-moi ce pauvre petit démon ! Vous l’avez sacrément amoché !
-Ma fille… Vous savez quoi ? Je m’en bats les couilles de votre opinion.
-Roh, mon père, ce langage !
C’est sympa d’être sympa, mais il y a un moment, il faut savoir mettre le holà. Poser les limites. La colère divine, c’est pas du pipi de chat. Une fois Pantheist lancé à la face du monde, notre bon père pensait bien que ledit monde allait s’assagir. Que l’ambiance œcuménique régnant sur l’album était un signal pour la terre. Tout irait mieux et la concorde règnerait dans l’univers. Alors forcément, quand, sept ans après, on voit l’état dans lequel est notre belle planète, ça a de quoi foutre les boules au Dalaï-Lama en personne. Résultat des courses: Pantheist est vénère et sort son album le plus féroce, intitulé Seeking Infinity. Tellement féroce qu’il contient des passages en blasts. Pas pléthore, hein, les ex-Belges ne sont pas devenus les apôtres du grindcore, mais ce sont de petits signes qui ne trompent pas. Finis les claviers à la Elton John tentés sur l’album précédent, Seeking Infinity est sombre, puissant, ample et incisif. C'est en tout cas l’objectif que visent les artistes. Y parviennent-ils réellement ? En grande partie, oui.
Passée l’intro en voix-off, dont le seul intérêt est de prévenir que, même si on a les glandes, on va pas rester au ras des pâquerettes - parce qu'on va causer spiritualité - Pantheist nous assène peut-être le meilleur morceau de toute leur discographie, "Control and Fire". D’une puissance dingue, il prend l’auditeur par la nuque et le plonge de force dans un univers sombre, gigantesque et gelé. La voix du révérend ? Un bon vieux growl des familles. Presque disparus sur l’opus précédent, les grognements reviennent en force nous percer les tympans. Les claviers omniprésents, utilisés en mode orgue Hammond plus qu’en nappes, donnent à l’ensemble ce petit feeling théurgique si propre au groupe, mais en mode crypte cosmique plus qu’église de village. La suite de l’œuvre est à peu près de cet acabit: compos solides, exécutées sans se presser – doom oblige - mais sans répétitions infinies, transmettant une sensation de volume et de solennité impactante. Le dernier titre, "Seeking Infinity, Reaching Eternity" - tout un programme-, surprend par un début très, très old-school qui, peu à peu se modifie pour terminer de manière plus « moderne » - aucun jugement de valeur dans cette opposition vieux/jeune - et tragique.
Le côté dramatique est renforcé par un growl poignant, qui rappelle "To Enter Pagan" de Primordial et ses « I love you, I need you » - dans l’esprit, plus que dans la forme. Quelques points de détail, comme aurait dit ce gros déconneur de Jean-Marie, viennent hélas nuancer le portrait idyllique que je suis en train de brosser. D’une part, le long intermède "1453: An Empire Crumbles" est trop ampoulé et perd en crédibilité. N’est pas Dead Can Dance qui veut. D’autre part, en bon révérend, notre père ne renonce pas totalement à son chant clair bien particulier et c’est un erreur. Inadapté à l’album, il vient polluer deux titres "The Enlighted Ones" et "Emergence". Heureusement, la voix « gentille » est peu utilisée, ce qui limite son pouvoir de nuisance. De plus, les chœurs présents sur le dernier morceau, sont bien plus convaincants. Seeking Infinity n’est, du coup, pas l’album du siècle, mais son ampleur, sa puissance et sa beauté en font quand même une excellente sortie, qui émoustillera plus d’un amateur du style.
-C’est bon mon père ou un peu plus ?
-Encore un peu, ma fille ! Là, l’œil gauche, fermez-le lui complètement ! Voilà ! Et un coup de genou dans les parties pour finir ! Parfait !
-Finalement, c’est agréable comme sensation ! J’aime bien quand leurs os craquent… On pourrait voir plus grand ? S’attaquer aux big bosses ? Satan, Lucifer , etc.
-On y travaille ma fille… on y travaille…