CHRONIQUE PAR ...
Flower King
Cette chronique a été mise en ligne le 01 juin 2021
Sa note :
12/20
LINE UP
-Andy Tillison Diskdrive
(chant+claviers)
-Guy Manning
(guitare+chœurs)
-Jakko M Jakszyk
(guitare+chœurs)
-Theo Travis
(saxophone+flûte)
-Jonas Reingold
(basse)
-Jaime Salazar
(batterie)
+Julie King (chant)
TRACKLIST
Disk One: A Crisis in Mid Life
1)A Crisis in Mid Life
2)Lost in London Twenty Five Years Later
3)The Ethernet
4)Celebrity Purée
5)Not As Good As the Book
6)A Sale of Two Souls
7)Bat Out of Basilson
Disk Two: Throwing Metal at the Sky
1)Four Egos, One War
2)The Full Gamut
DISCOGRAPHIE
Ah, les concepts-albums… entreprise périlleuse s’il en est. On trouvé généralement deux cas de figure : ceux qui se servent de l’histoire comme alibi pour regrouper diverses compositions qu’ils avaient sous la main (et curieusement, ce sont souvent les plus réussis) et ceux qui placent le concept au centre même du disque, quitte à le phagocyter complètement. Mais avec Not As Good As the Book, The Tangent se permet de regrouper ces deux approches pour un résultat déstabilisant et, avouons-le, pas franchement glorieux…
Quid du concept ? Un quadragénaire sur le déclin qui a connu la grande époque des seventies et qui ne parvient plus à se faire une place dans notre époque actuelle, se réveille étrangement 88 000 ans après notre ère et entreprend, à l’aide d’une équipe de scientifiques, de rebâtir la Terre et la civilisation terrestre à partir de ses souvenirs… je ne saurais vous en dire plus, le label n’ayant pas jugé bon de nous fournir un livret de paroles et encore moins la nouvelle qui accompagne l’édition spéciale de l’album. Reconnaissons au moins à Andy Tillison un sens de l’humour bien trempé et le mérite de la sincérité : en témoigne le regard mi-amusé mi-désabusé que le héros porte sur sa société. C’est l’un des bons points d’un album qui, dans sa première moitié, joue déjà le tapis.
Le premier disque démarre en effet sur les chapeaux de roues : "A Crisis in Mid Life", petite bombe pop-prog au synthé joueur et à la rythmique sautillante, portée par un groupe au diapason. Et ça continue sur la même lancée : à un raté près, cette première galette a tout du bon disque de prog sympathique. Pas d’esbrouffe ni de longueurs, des compos qui taclent dans tous les registres – des nappes cotonneuses de l’envoûtant "The Ethernet" à la fureur de "Bat Out Of Basildon", hommage aux bikers de la fin des sixties – et surtout, un concept qui illustre les chansons et non pas l’inverse. Et puis arrive le second disque… et là c’est la débandade complète. On se prend successivement deux mastodontes mortifères de vingt minutes, d’un sérieux à faire peur, enchaînant les sections ennuyeuses aux jams pénibles. Ce n’est même pas que le ton ne se muscle pas de temps en temps, c’est juste que dans la torpeur générale ces passages ne se font même pas remarquer.
Et puis comme dans tous ces groupes de progressive revival, il y a cette tendance à la citation qui fait immédiatement retomber le soufflé, surtout quand jusque-là le groupe s’était montré plus subtil que, au hasard, leurs collègues les Rois des Fleurs. Passent encore les petits « hommages » disséminés ici et là (l’intro très Tangerine Dream de "Four Egos, One War", un solo ELPien sur "The Full Gamut"), dans un sens on pourrait dire que ça sert le concept… mais quand le groupe se prend pour ce qu’il n’est pas c’est le naufrage. Exemple : l’immonde "A Sale of Two Souls" qui pille les codes Van der Graafiens avec force emphase, saxophone, et un Andy Tillison risible à force de se prendre pour Peter Hammill alors qu’il n’en a ni la puissance vocale, ni la sensibilité. Et quand ce n’est pas Hammill, c’est à Waters que le leader s’en prend : difficile de ne pas pouffer de rire – ou rester atterré, c’est selon – en écoutant l’intro de The Full Gamut et ce « Lying on Our Backs... », déjà culte chez votre serviteur, mais pour les mauvaises raisons. Si encore cette « imitation » était à prendre au second degré, on saluerait l’initiative, mais non : notre homme semble sérieux comme la mort.
C’est bien là le malheur de ce Not As Good As the Book : avoir laissé son concept prendre le pas sur le contenu musical, et plomber ainsi un album qui démarrait pourtant de bien belle manière, avec des thèmes colorés et prenants. Que d’ambition démesurée… Restent des musiciens doués, une production béton… mais dans le genre qui nous occupe, n’est-ce pas un minimum ?