CHRONIQUE PAR ...
Wotan
Cette chronique a été mise en ligne le 01 juin 2021
Sa note :
18/20
LINE UP
-Ville Sorvali
(chant+basse)
-Henri Sorvali
(chœurs+guitare+claviers+accordeon+harpe)
-Mitja Harvilati
(chœurs+guitare)
-Marko Tarvonen
(chœurs+guitare+batterie)
-Markus Eurén
(chœurs+claviers)
-Hittavainen
(fiddle+jouhiko)
TRACKLIST
1) Karhunkynsi
2) Haaska
3) Pimeä
4) Jotunheim
5) Kaiku
DISCOGRAPHIE
Le sang versé. Verisäkeet. Le prix à payer pour les guerriers. Seuls les grands combattants ont connu les Pimeä. Armés de leurs Karhunkynsi, ils font le deuil de leurs morts alors que les Haaska tournent autour des cadavres. Ils sont abasourdis après l’ardeur du combat. Dans le Jotunheim, leurs cris de douleur réverbèrent contre les parois. Kaiku. Mille cinq-cent ans plus tard, nous les entendons encore.
Les albums Kivenkantaja, Verisäkeet et V: Hävitetty forment une trilogie. Non officielle mais ces trois disques sont unis par une vision musicale consistante et sont un peu à part du reste de la discographie des Finlandais, notamment en qualité vu qu’ils sont respectivement : très bon, excellent et légendaire. Verisäkeet est le plus sombre de tous. Moonsorrow délaisse définitivement les quelques restes de folk cheesy encore présents sur Kivenkantaja pour aborder des rivages bien plus sombres. Grandeur, puissance, mais aussi atrocités, morts, colère et désespoir sont les maîtres mots de cette œuvre grandiose et prenante. Le chant hurlé de Ville Sorvali puise dans sa rage, sa force, ses tripes les plus profondes, les plus intimes pour assaillir nos sens, transmettre ses émotions à fleur de peau. Sur "Pimëa" par exemple, ses cris retranscrivent comme une peinture les paroles, sur le thème d’un paysage mort et désolé.
Bien entendu, la performance sans défaut du chanteur ne cache pas le mur du son qui déferle sur nous pour soutenir les émotions du vocaliste. Le socle metal, résolument black et agressif, est une franche réussite. Au-delà même des riffs thrash présents de ci de là, nous trouvons une rythmique presque groovy sur le titre d’ouverture, des lead heavy metal sur "Pimëa", des lourdeurs doom sur "Jotunheim". La richesse des compositions ne réside pas seulement dans le changement de tempo et l'intégration de plusieurs influences metal, mais aussi dans la parfaite synergie avec les instruments traditionnels et les chœurs. Difficile de sortir un titre du lot en exemple, tant chaque morceau s'avère parfait sur ce plan. Citons par exemple la transition entre le plan un peu folk et ce moment très heavy sur "Haaska", ou encore la plainte funéraire mélodique sur "Jotunheim", ou l'accordéon sur "Pimëa" reprenant le même thème que les plans de guitares, que nous retrouverons tout au long de la composition.
Car si l’art de la composition sera parfaitement maîtrisé sur V: Hävitetty, aboutissement du concept initié sur Kivenkantaja, force est de reconnaître que les chansons sont sans moments faibles, très cohérentes d’un bout à l'autre malgré la durée (l’album fait 70 minutes pour 5 titres). Les morceaux gagnent en intensité lors de chaque intervention d’instruments traditionnels. Les mélodies sont mémorables, immédiates, alors que les morceaux ne suivent pas une construction couplet/refrain. L’album entier est cinématographique aussi bien dans son ampleur que dans son propos. Bruits d’animaux, de tonnerre, de pas dans la neige sont présents entre les morceaux. Les chœurs donnent une profondeur supplémentaire. La musique est une véritable peinture sonore, riche, d’un monde sombre et sur lequel règne la mort et la désolation.
Le pagan/folk metal est souvent trop caricatural et très rarement sérieux. Seule une poignée de groupes peut prétendre faire une musique sans ces défauts. Moonsorrow se place en tête de ce petit comité et Verisäkeet en est la preuve définitive. Sombre, riche, consistant, bien écrit, mélodique, primordial, cet album est l’aboutissement d’un genre. Du Valhalla, Quorthon regarde, une larme à l’œil, son plus digne successeur.