Quelque part, c’est frustrant. Avec un groupe aussi versatile qu’Hexvessel, on aurait aimé découvrir la teneur du nouvel album en commençant à l’écouter. Psycho-doom-folk ? Rock psyhédélique ? Black metal ? L’exploration d’un nouveau genre ? Musicalement, les gars savent surprendre, et pas qu’un peu. Je n’aurais pas été contre un peu de suspense. Seulement voilà. Un simple coup d'œil à la pochette de Nocturne et on a compris.
Car non, pas de surprise. "Opening" laisse penser que l’illustration calquée sur celle de
Polar Veil, l’album précédent, n’est pas un hasard. "Sapphire Zephyrs" le confirme. Le septième album du combo finlandais est coulé dans le même moule que celui d’avant. Il ne s’agit pas véritablement d’une redite puisque Hexvessel modifie quelque peu son black-doom atmosphérique. Si les blasts ne sont présents qu’en dose homéopathique, le rythme global s’avère un peu plus élevé et, surtout, l’on se rapproche de ce que des formations comme
Wolves in the Throne Room,
Urkraft ou
Agalloch peuvent proposer. Les Finlandais ne perdent pas leur identité pour autant, et ce mélange de mélodies tristes et d’arrangements gentiment inquiétants prend toujours la forme d’une invocation aux forces spectrales et éthérées parcourant la nature - invocation sous les auspices de laquelle seul l’excellent album
When We Are Death n’est pas placé. On retrouve donc ces moments délicieux et glaçants à la fois pendant lesquels Hexvessel est réellement possédé par… quelque chose.
À ce titre, la fin d’"Inward Landscapes" et son chant féminin hanté est une vraie réussite. D’une manière générale, la première moitié de l’œuvre s’écoute avec grand plaisir. Titre au départ agressif, "Sapphire Zephyrs" plante magnifiquement le décor. Le début de "A Dark & Graceful Wilderness" n’est pas ce que le groupe a fait de mieux, "Spirit Masked Wold" est un peu plus convenu que la moyenne, mais ces deux titres contiennent tout de même la pâle flamme typique du groupe. Quant à "Nights Tender Reckoning", il s’avère également de très bonne qualité. La voix de Mat y rappelle par moments celle de
Vincent Cavanagh tandis que la caravane des spectres invoqués s’ébranle doucement. Malheureusement, le groupe s’essouffle et la fin de l’album n’atteint pas le même niveau. Rien d’horrible, évidemment, mais les titres peinent à retenir l’attention. Avec son pattern black atmo plus classique et son outro très classe, "Unworld" fait le job, mais "Mother Destroyer" et "Phoebus" sont vite oubliés. "Concealed Descent" permet de savourer le beau timbre de Mat, mais on a connu le groupe plus inspiré.
Nocturne reste toutefois un très bon album mais si vous me posez la question «
Hexvessel doit-il continuer dans le black metal ? », je ne saurais quoi répondre. Issus du metal extrême, les musiciens ont largement de quoi se défendre mais le groupe pourrait être tenté de sombrer dans quelque chose de plus impersonnel et ce serait vraiment dommage. Alors…
…pourquoi ne pas effectuer un nouveau virage et aller explorer de nouveaux terrains ? Ce ne serait pas une mauvaise idée. Quelle que soit leur décision, nous pouvons d'ores et déjà savourer Polar Veil et, maintenant, Nocturne, deux albums poétiques, spectraux et empreints d’une magie particulière. Hexvessel sait captiver et il n’y a pas de raison que ça s’arrête.