CHRONIQUE PAR ...
Alexis KV
Cette chronique a été mise en ligne le 01 juin 2021
Sa note :
13/20
LINE UP
-Gerrit Philipp Mutz
(chant)
-Jörg Michael Knittel
(guitare+chant)
-Joachim Schnalzried
(basse)
-Dennis Schediwy
(batterie)
TRACKLIST
1)The Music of Despair
2)A Lovelorn Traveller
3)Mourner
4)Holy Blood
5)The Oath of the Witch
6)Throne of Isolation
7)Burn Another Sinner
8)All the Gods You Worship
9)Anthem of Doom
10)The Peaceful Dead
DISCOGRAPHIE
Le petit monde du doom metal est régi par ses propres principes, souvent obscurs et illogiques. Ainsi, même si on n'a jamais entendu une note de leur musique, il suffit d'un coup d'œil au chemin de croix discographique de Dawn of Winter pour réaliser qu'ils ont des arguments pour prétendre au culte : The Peaceful Dead n'est que le deuxième album en presque vingt ans d'une carrière par ailleurs fort riche en démos et EP vinyles.
Mais le groupe allemand se permet de déroger, d'entrée de jeu, à la règle n°60 du doom : «Si vous faites du doom traditionnel, pompez Black Sabbath, Saint Vitus, Obsessed, Pagan Altar et Pentagram, puis affirmez que toute ressemblance n'est que pure coïncidence». Non pas qu'il arrive à éviter toute ressemblance avec ces légendes, bien au contraire, mais ils n'a pas l'intention de le cacher. "The Music of Despair", hymne à mi-chemin entre profession de foi et hommage à la scène dans lequel se retrouvera tout doomster digne de ce nom, affiche et annonce la couleur, le noir du désespoir, pour ceux qui n'auraient pas encore compris : «When my heart is filled with sorrow / And I wonder who I am / I put on some ancient Trouble / Some old Vitus, Pentagram.»
Cet aveu reflète une sincérité, une honnêteté qui transpire tout au long du disque : The Peaceful Dead n'est pas l'œuvre de musiciens qui cherchent à percer au-dessus des pâquerettes ou qui essayent de prouver quoi que ce soit. Ça leur fait tout simplement plaisir de jouer au ralenti, de s'épancher sur la misère du monde, d'entrevoir et d'anticiper la mort, de se perdre dans de vaines questions existentielles, voire théologiques, et surtout de le faire avec assez de maîtrise et d'inspiration pour arriver, au passage, à faire plaisir à l'auditeur. Quelques couacs sont à regretter, tel le final au flanger de "All the Gods You Worship" ou la rengaine de "Holy Blood", barbante comme seule une chanson de doom peut l'être, mais globalement le groupe s'en tire très bien en dépit de son manque d'originalité.
La production confère un son très sourd au duo batterie/basse et un grain prononcé à la guitare rythmique, ce fond brumeux et sombre mettant en valeur les solos et les lignes vocales, qui résonnent comme autant de cris dans la nuit. Gerrit Philipp Mutz affiche de réels progrès par rapport aux précédentes réalisations de Dawn of Winter : sur un plan purement technique, il garde intacte sa capacité à chanter avec toutes ses tripes tout en baissant considérablement le nombre de notes à la justesse douteuse (même si certaines de ses montées dans les aigus heurteront probablement les oreilles les plus sensibles), et cette technique est mise au service de certaines mélodies parmi les plus touchantes et mémorables qu'il lui ait été donné d'interpréter.
Sans apporter grand-chose au genre, The Peaceful Dead se révèle être une œuvre honnête, quoique par moments un peu trop traditionaliste, confectionnée par petits artisans depuis longtemps dévoués à la cause. Si elle ne rendra probablement pas le genre moins obscur et incompréhensible pour le commun des mortels, le petit monde du doom metal, lui, se réjouira probablement de cette nouvelle occasion de se lamenter un bon coup.