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CHRONIQUE PAR ...

71
Arroway's
Cette chronique a été mise en ligne le 01 juin 2021
Sa note : 12/20

LINE UP

-Emmanuel Jessua
(voix+guitare+piano+programmation)

-Jérémie Lautier
(guitare)

-Gredin
(basse)

-Thibault Lamy
(batterie+programmation)

TRACKLIST

1)Maintained Relevance of Destruction part. 1
2)Maintained Relevance of Destruction part. 2 (feat. Ilene G.)
3)Daybreak at Slaughter-House
4)H492053
5)the Hole (feat. Milka)
6)Scarlet Fever
7)Tutuguri
8)Naked Lunch I
9)Naked Lunch II
10)Remords Posthumes

DISCOGRAPHIE


Hypno5e - Des deux l'une est l'autre
(2007) - ambient avec du metal - Label : Overcome



Des deux l'une est l'autre est manifestement un album ambitieux. La question est de savoir s'il se hisse à la hauteur de ses prétentions. Hypno5e propose des compositions conséquentes dont la recette comporte grosso modo trois ingrédients: des plans énervés, des passages clairs aux tonalités dépressives et des monologues cinématographiques aux humeurs contemplatives, d'aucuns diraient philosophiques. A voir…

Il n'est pas nécessaire d'écouter très attentivement Des deux l'une est l'autre, ni même de l'écouter en entier d'ailleurs, pour remarquer immédiatement ses deux principales faiblesses: des influences beaucoup trop marquées et une intellectualisation bancale voire artificielle du concept. Il est en effet difficile de ne pas noter des similitudes musicales avec un groupe comme Psykup: la manière d'enchainer rythmiquement les riffs et de mener les ambiances plus calmes, le son des guitares et leurs élancements aigus, les hurlements du chanteur qui ne sont pas sans rappeler certaines des performances de Ju et Milka (lequel apparaît d'ailleurs en guest sur "The Hole"). La comparaison se fait malheureusement au détriment d'Hypno5e: moins riche, moins déjanté, moins coloré. Il n'en demeure pas moins que la performance technique est réussie. Un constat à double tranchant: l'illusion est par moment quasi parfaite, on en oublierait quel groupe on écoute réellement. Alors finalement, est-ce que l'on apprécie vraiment Hypno5e pour ce qu'il est… pas sûr. Et pourtant impossible de ne pas reconnaître la qualité d'un certain nombre de passages. Cela relève du cas de conscience.

L'atmosphère est morne, les mouvements souvent léthargiques et indolents, dynamisés par des accès de révolte ou de folie. On n'est pas très loin de l'asile, des murs blanc hôpital, des isolements dépressifs. Il suffit d'écouter les cris hystériques au début de "Tutuguri" pour s'en persuader. L'album a tendance à s'étaler en longueur et cela est dû en grande partie aux nombreux extraits de films ou monologues ajoutées au corps des compositions. L'idée n'est déjà pas franchement originale en soi, mais le résultat souffre en plus de deux défauts. La narration occupe une place telle qu'elle tend à remplacer le chant par moment et rompt la dynamique des morceaux en ralentissant le rythme. Mais ceci n'est rien si l'on commence à écouter attentivement le texte: on philosophe sur «l'exploitation bienheureuse» de la mélodie par elle-même, sur la mélodie «successive et simultanée qui s'offre dans une évidence ineffable et dans la sécurité au sein de la vocalise»… rendez-vous sur "H492053" pour découvrir la suite, et n'oubliez pas de vous arrêter sur les dernières minutes de "Scarlet fever" qui sont tout aussi délicieuses, malheureusement dépourvues d'ironie. Ces interventions, lorsqu'elles ne sont pas aussi «recherchées», contribuent à installer l'atmosphère mais gâchent trop souvent leur effet par leur évidente ambition à donner à la musique une dimension qu'elle n'a pas… en plus d'agacer l'auditeur.

Finalement c'est sur des morceaux comme "Tutuguri" et "Naked Lunch" I & II que Hypno5e personnalise son style: en accentuant franchement le côté aliéné de la musique et en flirtant du coté d'ambiances post-rock à tendance psychotique. On a même droit à deux minutes trente d'indus sur "Naked Lunch II". Le contexte a une identité plus forte, les mélodies au chant clair sont réussies même si elles ne sont pas originales dans l'absolu et les passages dont les influences sont les plus marquées se distinguent d'avantage. Dommage que l'album se termine sur "Remords Posthumes", franchement déprimant mais beaucoup moins intéressant. Au moins sert-il de bonne conclusion et reste-t-il dans le ton d'un album dont le concept gravite autour du thème du remords. Alors on se rappelle des premiers mots qui ouvrent l'album et qui pose finalement bien le décor: "Le monde où il vivait était triste: un roi dégénéré, des infants malades, des idiots, des nains, des infirmes, quelques pitres monstrueux vêtus en princes qui avaient pour fonction de rire d'eux-mêmes; le complot, le mensonge, et le remords...".


En tout cas en ce qui concerne l'auditeur, ce sont de regrets qu'il s'agit: regrets de voir qu'avec le bagage technique et le potentiel artistique dont dispose Hypno5e, le résultat offert par Des deux l'une est l'autre soit tellement en demi-teinte. On aimerait voir Hypno5e s'affranchir d'avantage de ses influences et livrer avec plus de simplicité sa réflexion afin d'asseoir son identité sans contestation possible. Une attente qu'il reste donc à combler.


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