Ah, quel plaisir de retrouver ce qui est sans doute le seul groupe un peu sérieux de néo-classique provenant de l’hexagone ! Bon, certes, Adagio a le mérite d’exister, mais le groupe de Stéphan Forté ne saurait être du 100% pur jus. Alors que MZ, pardon, mais c’est du vrai, qui n’a peur de rien et qui n’écoute que son cœur pour écrire sa musique. Quand on a commencé par sortir quatre albums instrumentaux, ça prouve qu’on ne court pas après les disques d’or. Car MZ a aussi une caractéristique typique d’une formation de néo-classique : le relatif anonymat.
Toutefois, il faut avouer qu’avec leur précédent effort, l’excellent Nostalgic Heroes, MZ a fait un grand pas en avant. En intégrant dans leur rang un chanteur, Jean-Jacques Fanciulotti, Markus (leader du groupe) a permis à son bébé de devenir plus accessible sans pour autant sacrifier à la qualité des compositions et à sa marque de fabrique – ce qui n’était pas, sur le principe, gagné d’avance. Mais Nostagic Heroes a été une entière et franche réussite, et le retour en 2010 de MZ avec le même line-up laissait présager du meilleur. Las, il faudra se résoudre au fait que ce Heavenwards, bien que très loin d’être raté, ne se hisse pas au niveau de son prédécesseur. Disons-le de suite : certaines compositions sont bien en deçà de ce que MZ a pu écrire sur le précédent album. Bien sur, Heavenwards compte d’excellents moments, mais là où Nostalgic Heroes ne comptait que quelques faiblesses, Heavenwards les cumule. Et ça commence par le premier titre, "Planet Hell", aux mélodies prévisibles et à la structure tout à fait classique d’où est absent le côté flamboyant et épique auquel le groupe nous avait habitués.
Malheureusement, ça n’est pas tout, puisque sur l’ensemble de Heavenwards, il faudra également subir un "Out Of Sight, Out Of Heart" presque pénible, un "Long For Dominate" insipide et un "Bloodspill At Night" qui achève cet album comme il a commencé : dans la déception. Même les intermèdes instrumentaux ("Grand Opus" et "Low Tarantella") sont vraiment dispensables…Tous ces titres forment un ventre mou trop envahissant qui plombe clairement l’album, ce qui est d’autant plus dommage que le reste est vraiment bon, voire (plus rarement) carrément génial. "Engraved On The Wall" et "Rising Nightmare", par exemple, sont deux excellents titres où MZ prend un peu plus son temps pour développer ses thèmes et ses mélodies, rappelant les "Nightfall Prelude" et "Landscape Fading Into Infinity" du précédent album. Ces deux titres permettent à l’argument le plus à double tranchant du groupe de s’exprimer enfin : Jean-Jacques Fanciulotti. Car cette voix si particulière peut rebuter l’amateur habitué à des voix lisses et lyriques : ici, le timbre légèrement nasal, éraillé et granuleux de Jean-Jacques donne une vraie particularité et une identité forte à MZ, qui se démarque clairement du reste de la scène néo-classique internationale. Rappelant à la fois Dio et Lars Patrick Johanson (Wuthering Heigths, Astral Doors, Space Odyssey…), Jean-Jacques possède ce type de voix que soit l’on déteste, soit l’on adore, mais qu’on oublie rarement.
Et puis il y a ce moment, au milieu de l’album, où l’auditeur se prend en pleine tête quinze minutes de merveilleux, d’émotion et d’efficacité : le couple "Heavenwards"/"Astronomy", la première faisant presque dix minutes et la seconde étant la vraie instrumentale de l’album. Sans être spécialement liée entre elles, leur enchainement fonctionne parfaitement. "Heavenwards" étale son piano, ses mélodies, son côté mélancolique toujours servi par la voix théâtrale de Jean-Jacques, sans regarder à la dépense ni se contraindre à une quelconque structure : MZ lâchent les amarres et emmènent avec eux l’auditeur dans un voyage presque progressif, dans une ambiance plus orchestrée que de coutume et réellement émouvante. Les lignes vocales de Jean-Jacques et son timbre se posent parfaitement naturellement sur l’écriture du groupe et le résultat est là : MZ vient de donner naissance à son meilleur titre, avec un final dont on aurait presque souhaité qu’il se prolonge... "Astronomy" enchaine derrière, et à la place de Jean-Jacques, c’est cette fois-ci à Zan que vont les louanges. Si ces solos sont globalement inspirés, ils sont au-dessus du lot sur "Astronomy", titre lui aussi mélancolique avec ses violons presque langoureux et sa mélodie de guitare sobre et inspirée. L’auditeur, lui, ressort de ces deux titres avec un grand sourire imprimé sur la figure.
Que ne fût pas l’album ainsi pensé dans sa globalité ! Dès que MZ devient conventionnel, il perd clairement en qualité d’écriture. Il faut à Markus et Zan de l’espace, pour laisser à leurs compositions de quoi prendre de l’ampleur comme c’est le cas sur le morceau "Heavenwards", ou sur les meilleurs titres de l’album. Si l’album avait compté six morceaux de la stature d’"Heavenwards", c’aurait pu être l’un des albums de l’année. Faute de quoi il reste un album tantôt génial, tantôt presque médiocre, laissant l’auditeur quasiment sur sa faim, malgré la très bonne prestation de l’ensemble des musiciens du groupe. Le jeu de basse de Markus n’a pas encore été évoqué, peut-être parce que celui-ci se veut plus sobre et moins flamboyant que sur Nostalgic Heroes, même si le fait que la basse soit bien mise en avant dans le mix soit assurément une très bonne chose. La production, d’ailleurs, s’avère maitrisé et réussie pour une production maison, avec un son clair, bien rond et un équilibre entre les différends instruments et orchestrations qui servent parfaitement le propos.
Malgré ses défauts, Heavenwards reste un album attachant. L’amateur de néo-classique aura largement de quoi se sustenter sur les cinquante-sept minutes que dure cet album, et la France peut se vanter de posséder en son sein un groupe talentueux, à l’identité marquée et aux compositions racées. Ce qui est assez rare pour être signalé…