CHRONIQUE PAR ...
Winter
Cette chronique a été mise en ligne le 01 juin 2021
Sa note :
13/20
LINE UP
-Michael Sele
(chant+guitare+claviers)
-Marco Gassner
(guitare)
-David Vetsch
(basse)
-Mac Vinzens
(batterie)
TRACKLIST
1) Myrrh I
2) Narcotica
3) Rumours
4) Suicide Landscape
5) Dark Rain
6) Listening Wind
7) Golden Age
8) The Lonesome Death of a Goth DJ
9) Hunters
10) Kingdoms of Cancer
11) Myrrh II
12) Last Night Home
13) Stairs
14) Obscura
15) Last Words
DISCOGRAPHIE
La tradition pour les webzines metal d’un certain standing, c’est de chroniquer de temps en temps, entre un album de Grave Digger et un de Cannibal Corpse, des trucs qui sortent du quotidien du métalleux de base. Exemple : du jazz-rock fusion, un récital de cithare indienne… Et bien sûr, il convient de s’extasier le plus possible sur l’œuvre histoire de montrer à la face du monde que nous sommes vraiment trop éclectiques et par conséquent trop cools. Alors que ce soit bien clair entre nous : le dernier album de The Beauty of Gemina, personne n’est allé le chercher, il est venu tout seul via un label qui en général fait dans le metal. Et je ne compte pas non plus faire semblant de tomber en pamoison devant The Myrrh Sessions pour « faire genre », on est d’accord ?
Le nouvel album du quatuor suisse n’est pas vraiment nouveau puisque des quinze chansons que comporte The Myrrh Sessions, seules quatre sont véritablement nouvelles, et encore : dans ces quatre, on trouve l’intro et un intermède, jolis morceaux courts et entièrement musicaux ("Myrrh I" et "Myrrh II"), ainsi que la belle mais guère plus longue outro ("Last Words"). Bref, il n’y a que "Listening Wind" qui n’ait pas figuré sur un des précédents albums du groupe, et il s'agit d'une reprise des Talkings Heads, assez mièvre et donc pas franchement emballante. Autant dire que l'album est une compil' du groupe en version acoustique (le groupe donnant en général dans l'électro goth) agrémentée de quelques frivolités. Si l'on oublie ces dernières et que l'on se concentre sur le corps de l'album, le résultat est globalement plutôt pas mal.
Cela tient-il à la qualité des compositions initiales ? Les connaisseurs pourront répondre, mais vu que votre serviteur n’avait pas l’heur de connaître le groupe avant de tomber sur cet album, seules seront évoquées ici les versions de The Myrrh Sessions, versions pour la plupart agréables à l’oreille. Si l’on pense obligatoirement à Nick Cave en écoutant l’album, tant pour la voix de Michael, qui rappelle également Andrew Eldritch, que pour l’instrumentation, d’autres réminiscences frapperont certainement l’auditeur quelque peu versé dans le rock indé et la cold-wave des années 80/90. Le timbre qu’emprunte Michael sur "Rumours" devrait faire clairement penser à Interpol, les beaux violons de "Suicide Landscape" ou ceux d’ "Obscura" pourraient rappeler l'époque tardive de Trisomie 21, tandis que "Hunters" a un agréable petit goût de Sisters of Mercy, une fin jazzy en plus.
On trouvera également de claires influences rock / country sur l’un des meilleurs morceaux de l’album, l’enlevé "Dark Rain" qui donne une terrible envie de remuer l’arrière train au rythme des guitares. D’une manière générale, et si l’on excepte "The Lonesome Death…" qui n'a absolument pas supporté le passage de l'électro au folk jazzy, les morceaux les plus rythmés sont également ceux où le groupe semble mettre le plus de conviction et le plus de justesse dans leur exécution ("Rumours", "Suicide Landscape", "Dark Rain"). Le résultat, encore très acceptable, est tout de même plus mitigé pour les morceaux plus lents dont les mélodies neo-folk souvent soutenues par du piano s’avèrent parfois bien mièvres et/ou clichesques . Si "Hunters" ou "Stairs" dégagent une beauté sincère, le sombre "Last Night Home", mais surtout "Listening Wind" et "Kingdoms of Cancer" (à la bien mauvaise entame) semblent être là plus pour remplir l’album que pour exprimer un sentiment profond.
Au final, cette sorte de « The Beauty of Gemina unplugged » est plutôt bonne. Certaines versions sont magnifiques de fluidité et d’harmonie, et paraissent un bel hommage à la musique pop-rock-folk-indé d’il y a quelques décennies. Pas mal de morceaux, sans atteindre cette qualité sont simplement agréables. On déplorera cependant la présence de quelques titres pas terribles et on pourra éventuellement s’interroger sur la bien-fondé de la démarche. Il n’empêche que la sensation d’ensemble reste agréable et puis bon, nous sommes au vingt-et-unième siècle : l’album comporte suffisamment de bons moments pour ne pas être effacé. L’auditeur fera sa petite sélection, la mettra sur son lecteur et s’en ira content, en paix avec lui-même et avec le monde.