« Ah ha ! Ah ha ha haaaaaa ! Oh ho oooooh ! Et oui et oui mais ouais bah ouais ! Mais enfin quoi ! Non mais aussi il était temps quoi ! » Bref, y a un nouveau Hatebreed et voilà à peu près ce que cela m'inspire. On ne taxera pas cette chronique de tract de fan dans la mesure où je reste assez mesuré sur les dernières sorties des Américains, mais faut bien reconnaître qu'en matière de hardcore metal virulent, Hatebreed reste LA grosse référence, un truc à absolument voir en live, une machine à riffs, à gros breaks, à groove de pachyderme. Donc, la bande à Jamey est de retour, et très franchement, cette fois, ils ne se sont pas foutus de notre gueule. Mais y a-t-il enfin quelque chose d'autre à attendre de ce groupe que sa masterclass annuelle hardcore metal « à la Hatebreed » ?
Eh bien ça paraît dingo mais oui, sur cet album, oui. Il s'agit cependant d'être clair d'entrée : Hatebreed reste Hatebreed, le groupe ne s'est pas perdu en route, ce Divinity of Purpose n'est pas un album de doom ou de thrash old school (dès les premières notes de "Put It To The Torch", c'est clair). Pour autant, il y a une réelle et indéniable évolution orientée vers le metal au sens large sur ce dernier opus, et c'est assez hallucinant sur certains morceaux. Sur "Nothing Scars Me", par exemple, eh bien il y a un couplet très metal et un refrain... assez mélodique. Bah ouais. Sur "Time To Murder It" aussi, à un moment. Évolution dans les lignes de chant donc, qui restent sur le mode hurlé tough guy, mais se parent d'atours bien moins agressifs ou revendicatifs que les typiques chœurs hardcore old school si chers au groupe, et qui sont encore légion, pas de panique ("Honor Never Dies", et pourtant y a une ligne de lead thrashisante sur le refrain, ou encore "Before The Fight Ends You"). Il y a aussi ce break non plus hardcore metal mais carrément metalcore sur "Own Your World", qui fait très mal mais qui surtout, surprend ! Il y a encore, plus généralement, ces riffs d'inspiration de plus en plus metal (option lourdeur et violence à la Hatebreed, tout de même) qui interpellent ("Dead Man Breathing", typique de cette évolution en cours). Il y a également ces passages d'inspiration purement thrash métal, sur "The Language", par exemple. Déjà bien moins surprenant de la part des Américains quand on a écouté l'album de reprises To The Lions ou même certains passages de l'éponyme, mais tout de même. Le chant surpuissant de Jamey reste, pour sa part, toujours dans la même lignée, bien que de légères évolutions se fassent également sentir dans la façon de poser ses lignes de chant et ses harangues (quelques spoken words sur "Divinity of Purpose").
Bref, on sent que le maitre des lieux commence à se lasser un tout petit peu de son style et tente d'évoluer en le mixant avec de plus en plus d'éléments exogènes, et franchement c'est une réussite. Pour autant, que se rassurent les fanatiques de Perseverance ou de The Rise Of Brutality, le hardcore metal et le hardcore old school ont encore plus que largement leur place sur le nouvel opus des titans du genre, pas de problème de ce côté là ("Before The Fight Ends You"). Quoi qu'il advienne, Hatebreed sera toujours ce groupe qui balance des refrains imparables à propos de garder la tête haute quels que soient les tornades de merde qu'envoient la vie, Hatebreed alternera toujours les passages hardcore speedé à la Sick Of It All avec des breaks lourdissimes et aussi sautillants qu'écrasants (comme sur le bien old school "Indivisible"), Hatebreed aura toujours un des frontmen les plus puissants et géniaux de la scène, et Hatebreed, ouais, aura toujours une production absolument monstrueuse qui donne envie de tout casser dès que démarre un morceau. Même si ça ressemble invariablement à ce qu'ils faisaient avant malgré les nombreuses évolutions précitées. Même si certains riffs tournent un peu à vide et ne sont pas forcément des plus inspirés. Hatebreed, c'est avant tout l'efficacité, la recherche de l'impact immédiat, et en cela, les Américains restent intouchables sur ce Divinity of Purpose, qui en mettant un peu plus d'eau métallisée qu'à l'accoutumée dans son vin de messe hardcore, touche encore une fois sa cible en plein cœur, ou plutôt en pleine face.
Y a pas à ergoter, chaque style compte ses maitres, Hatebreed est celui du hardcore metal, et il n'est pas prêt de lâcher le trône de fer. Tant que les performances live seront à la hauteur, le contenu des albums restera plus « secondaire » à la condition d'avoir son lot de tubes (et c'est encore le cas ici avec "Put It To The Torch" ou "Nothing Scars Me") qui casseront tout sur scène, lieu où ce groupe prend toute son ampleur. Bref, Hatebreed taille sa route en laissant encore un tas de membres brisés dans son sillage, et continue son évolution de manière lente, contrôlée et plutôt réussie jusqu'ici.