L'explosion et l'hégémonie du black metal français, alors obnubilé par Burzum et Darkthrone, le black polonais et l'extrême droite, ne doivent pas faire oublier que le death et le thrash avaient aussi leurs représentants français. En ces temps où le heavy metal hexagonal régnait par son côté épique et ses chanteurs évoluant dans le King Diamond (ADX et Sortilège en tête), certains groupes visaient largement plus loin et écoutaient les valeurs sûres en matières de speed overdosé. Parmi eux se trouvaient Massacra et Agressor, ce dernier secouant tout le monde underground avec ses deux demos, Merciless Onslaught et Satan's Sodomy. Si Licensed to Thrash (recommandé par Euronymous lui même au détour d'une interview de 1988) fît assez parler de Loudblast et Agressor en 1987, le groupe de Franconville attendra l'année suivante pour faire parler de lui, avec une démo du même nom que l'album chroniqué ici.
D'autres, comme Nomed ou Mutilated n'eurent pas la chance de sortir plus d'un album, hélas. Mais en tout cas, tout ce beau monde fît, grand bien nous en prit, oublier les lamentables Mörsure (qui en déçurent plus d'un : même si ce quartette speed / punk avait de l'avance, l'usage d'une batterie électronique n'aide pas). Cet album, enregistré alors que Morbid Angel, Obituary et Carcass avaient dégainé leur album, ne passera pas inaperçu grâce à Shark Records (alors qu'il était prévu que ce soit Neat Records, mais un label anglais ne pouvait signer un groupe français, parait-il), label ayant déjà importé les deux premiers Sepultura. Avant de se laisser envahir par un album sauvage et marqué par un son tranchant comme celui d'une énorme scie électrique, l'intro doit être évoquée car elle s'inscrit dans la droite ligne de groupes voulant nous mettre dans le bain (elle change des grosses voix modifiées ou des effets bruitistes). Instinctivement, cet album fait penser à Kreator (Pleasure to Kill, forcément, et cela montre combien la bande à Mille a influencé le death), Sepultura (pour l'intro) ou Possessed. Final Holocaust est un disque qui se voulait death mais qui est fortement marqué par le thrash des Allemands tant il est rapide et brutal et en est presque similaire à Protector, autre groupe teuton ayant marqué aussi avec Urm the Mad, ou Merciless (les Suédois, hein, et produits sous Deathlike Silence).
Cette évolution un peu manquée vers le death-metal, Fred, Pascal, Chris et Jean Marc le doivent à la production et à certaines compositions qui les restreignent à un thrash très agressif. Difficile en effet pour le disque de cacher ses accents thrash en écoutant des morceaux comme "Sentenced for Life", "Nearer of Death" (qui, pour le coup, aurait été plus cohérent pour le choix du titre pour l'album) ou "Eternal Hate". Des efforts sont toute même fait pour tendre vers le death metal voulu depuis le temps des démos grâce à Pascal qui laisse Fred chanter sur une ou deux chansons. Ca tabasse sévère, ça crache mieux que chez Loudblast, même si le caractère ralenti des blasts relègue finalement cet album au second plan derrière Altars of Madness ou Hallucinations. On est très loin des envolées aiguës sur Licensed to Thrash, et la vélocité des compos et du jeu de batterie sont époustouflants, notamment sur "Researchers of Tortures" ou encore l'impitoyable "The Day of Massacra". Dommage que le son de la batterie laisse assez à désirer, voire même oblige par moments à baisser le son, car ce son de cymbale risque rapidement de faire saigner les oreilles, et dans la majeure partie des cas, d'agacer. Le meilleur restera à venir avec Enjoy the Violence et, pour certains, Signs of Decline, mais impossible de rester indifférent pour autant devant leur acharnement à tirer vers le death avec un organe si guttural.
Avec son premier album chargé de haine et de volonté de prouver que la France avait son mot à dire, Massacra est bien intégré dans un mouvement conscient du death metal mais n'arrivant pas à dire adieu au thrash incarné par Possessed, Destruction, et Kreator. En cette année 1990, Massacra, Merciless, Agressor et Sextrash dégainèrent un thrash brutal, rapide (euphémisme !) et sombre. Histoire de se préparer à la vague déferlante du death metal puis à l'hystérie qu'allait susciter le black metal, l'année suivante. Quoi qu'il en soit, si en ce moment, seul Affliction Gate semble se maintenir au dessus de la vague retro-death emmenée par Necrowretch et consorts (qui, en gros, fait un peu sous-Autopsy), autant se réécouter cet album qui arrache la tronche sévère.