Lettre ouverte au groupe Amphetamin :
« Messieurs, vous jouez dans un groupe totalement inconnu, la preuve : vous n’êtes pas sur Spotify. Vous êtes auto-produits et vous nous avez envoyé un message anodin pour demander que les Eternels chroniquent votre premier album. FORCEMENT, j’en conclus que vous êtes un gentil petit groupe et que votre travail sera au mieux une œuvre sympatoche, au pire un truc horriblement mal foutu. C’est pour ça que j’aimerais que vous m’expliquiez POURQUOI j’ai pleuré DEUX FOIS, devant témoin qui plus est, à l’écoute de At the Dawn of Twilight !!! J'ai une réputation à maintenir, moi, je suis le mec sombre du quartier, froid comme la mort. Les enfants pleurent quand je passe à côté d’eux. Merde, quoi, les gars, il faut prévenir quand on sort un truc pareil !!! Vous aurez des nouvelles de mes avocats, ça je vous le garantis ! »
Oui, deux fois, pas une. La première, à la fin du titre éponyme "At the Dawn of Twilight" lors d’une nouvelle montée dans les aigus de Sebastian, vocaliste né des conséquences d’une relation « pour tous » entre Matthew Bellamy et Mikael Akerfeldt (dans ses moments tendres), la seconde sur le court titre final, "A Shadow on Me", véritable machine à hérisser le poil et humecter la cornée. Et pourtant, qui aurait pu prévoir le déluge émotionnel à venir à l’écoute du timide "Lunae Lumen", bien plus en accord avec ce que l’on peut attendre d’un groupe anonyme ? On y entend des premiers accords à la Sigur Ros suivis d’une entrée conventionnelle dans un monde post-rock déjà bien peuplé. Bref, on pense écouter pépère un truc sympathique mais qu’on oubliera dans l’heure suivante, et puis bam ! Le premier choc : le sombre "E-rased" ou « je joue à mélanger Heritage de Opeth et Signify de Porcupine Tree, et je dépasse presque les maîtres ». "Pain(t)ful Memories" reste dans la même lignée que le titre précédent, mais l’ambiance totalement acoustique fait que l’intensité retombe quelque peu . Du coup, on songe à l’accident, au coup de chance du débutant. Écrire un super morceau ça peut arriver à tout le monde, hein.
C’est sans doute ce second relâchement qui fait vraiment mal : quand "Wish & Fall" commence la garde est totalement baissée, et c’est pour ça que les accords de ce morceau dignes d’un Muse de la belle époque, s’essayant avec bonheur et une certaine nonchalance au post-rock, font des ravages dans l’estomac de l’auditeur. Le reste de l’album ne fait que confirmer qu’At the Dawn of Twilight est un album époustouflant de maîtrise et de mélancolie. Le mélange prog/post/pop proposé par les Frenchies est de tout premier plan et le morceau de bravoure éponyme résume parfaitement toutes les qualités du groupe, tout leur savoir faire et leur énorme sensibilité : commencé de manière douce au son des guitares acoustiques, il monte tranquillement en puissance, en proposant des rythmes plus lourds et une ambiance plus inquiétante avant que Sebastian ne plante un clou de plus dans le cœur de l’auditeur en guise de conclusion. "Autumn III", à la saveur pop-rock musclée et le piano bouleversant de "A Shadow On Me" finissent le travail en beauté. En beauté ? Non, en magnificence en fait.
Le début d’At the Dawn of Twilight souffre de quelques hauts-et-bas, mais quand la machine se met en marche, c’est tout simplement… Excusez-moi mais là j’écoute "A Shadow On Me" et du coup je… Enfin bref, vous l’aurez compris, Amphetamin m’a touché et m’a coulé. Surtout que je ne m’y attendais pas.