CHRONIQUE PAR ...
Iokanaan
Cette chronique a été mise en ligne le 01 juin 2021
Sa note :
17/20
LINE UP
-KK
(chant)
-Nicolas Amossé
(guitare)
-Harun Demiraslan
(guitare+clavier)
-Ludovic Chauveau
(basse)
-Sylvain Bouvier
(batterie)
TRACKLIST
1) Moonshine Limbo
2) Damballa's Voodoo Doll
3) Possessed by the Nightlife
4) Guédé Juice
5) Fire on Skin
6) Blowjob on the Rocks
DISCOGRAPHIE
Nom de dieu sait que j’avais besoin de swinguer ces derniers temps. De faire péter du groove à saturation dans les limbes de mes tympans. Trepalium m’a fait de l’œil, je leur fais de l’oreille. Et c’est grand ! Ce soir, je danse avec une putain de machine de guerre au milieu de la piste de ce bon vieux bar aux planches qui grincent et au parquet qui fume. Je vais me refaire le mojo et m’immoler en laissant le sorcier hurler de rire pendant que le public finit de lécher le rhum brisé qui coule à terre...
Trepalium de retour. Pour les mortels, ça n’augure rien de bon : la pleine-lune a hissé son drapeau, les loups-garous hérissent les poils, quelques morts-vivants laissent traîner leurs membres par delà les tombes, il est l’heure de coucher les familles dans le douillet des foyers... Pour les Éternels par contre, c’est l’heure de sortie! Et c’est pas dommage. Dès les premières secondes de "Moonshine Limbo", mélangeant bris de verre et cris humains ravagés au vieux piano de comptoir désaccordé, nos âmes se mettent à pogotter contre nos peaux comme des diables piqués de rage cherchant à quitter les corps qu’elles ont cru bon d’habiter. C’est devenu limpide, c’est désormais clair : le groove chez Trepalium n’est plus un détail de passage et il prend enfin toute la place qu’il mérite. Si, par le passé, les différents instruments semblaient se détacher un peu trop les uns des autres, aujourd’hui, la cohésion de groupe est forte et la recherche de la sonorité est diablement juste
Voici enfin un son où les poulets égorgés peuvent courir sans tête de leur plein gré. Et sur une durée tellement plus claire : Trepalium sait manifestement gérer l’efficacité de ses morceaux, notamment avec une maîtrise du hit somme toute magistrale. Pour preuves, "Moonshine Limbo" vous attrape le crâne, "Possessed by the Nightlife" vous plonge la tête dans l’eau et "Fire on Skin" fait porter le tout à ébullition... À l’exception possible de "Guédé Juice", qui peut nécessiter plusieurs écoutes, Voodoo Moonshine est une œuvre propre qui, soyez heureux, ne s’aseptise jamais. Brûlot infernal où chaque tour de piste fonce à l’essentiel, où les breaks tombent comme des gouttes de pluie sur un sol brûlant nous laissant savourer une cendre à la fois agréable et démoniaque. Véritable prière où le sentiment de l’homme blanc des années 40 qui se découvre un corps qui se trémousse et se cambre à la rythmique dite du diable est retrouvé. De quoi jouir, vraiment...
Trepalium a toujours conservé une certaine linéarité dans chacun de ses albums, laissant à une époque les quelques défauts se trouver sur la longueur. Le choix de sortir un Album-Ep à couleur de six pistes pour Voodoo Moonshine semble à la fois sage et avisé venant d’une formation qui se cherche encore tant elle n’a pas choisi le chemin de la facilité musicale ou commerciale. Trepalium paraît être en métamorphose, dans cet entre-deux où tout arrive, passant d’artistes influencés à artistes de référence, nous laissant dans l’attente de plus grandes nouveautés, présages de trouvailles qui nous feront bander les hauts-de-forme jusqu’au fond du feutre.
En attendant, dans ce bon vieux bar aux planches qui grincent-plancher qui fume, même les sourds qui n’avaient qu’un billard pour jouer se sont mis à danser, ils exultent eux aussi, criant le miracle. Et tout ça le temps d’une éclipse où nous avons dansé, bercés par une puissante vision déchaînée de ce que pourrait être le prochain cabaret de l’apocalypse.