Jour
2
:20 juin 2015
Soyons matinaux dès le deuxième jour et pendant qu'on le peut encore, et commençons la journée avec Deep in Hate (Altar - 10h30). C’est en effet l’heure du petit déjeuner sous l’Altar, qui a également eu le droit à un lifting grand luxe tout comme sa jumelle Temple. Au menu ce matin, une tartine de trente minutes de brutal-deathcore préparée avec une certaine Profondeur de Haine par les franciliens. Ces derniers ont pu mesurer leur notoriété grandissante, puisqu’il y avait déjà pas mal de monde pour les applaudir et qu’un petit wall of death matinal fut également organisé avec succès par le frontman. Un groupe parfaitement en place, un set ultra-carré et violent, faisant la part belle à leur solide dernier album et terminé par l’excellente « Beyond » (véritablement un excellent morceau, dont on vous conseille l'écoute). On n'en demandait pas plus pour commencer cette seconde journée au paradis de la violence musicale dans les meilleures conditions possible. Seconde journée qui se poursuit avec rien de moins qu'Haken (MS2- 11h40)... Haken ? Au Hellfest ? Assez surprenant pour ce groupe de progressif à cheval entre rock et métal, bien que tirant plus vers le côté obscur de la force sur leur dernier opus. Surprenant aussi car le groupe ne pouvait que jouer sur une Mainstage de par son style et que de bon matin, de par sa popularité encore très limitée aux cercles d'initiés, c'est finalement bien ce qui s'est passé. Et en cet horaire matinal, le public n'est pas forcément bien réveillé et ce n'est pas une louchée de prog alambiqué qui va franchement l'y aider ! Le début de set est assez étrange dans son genre, puisque le groupe semble bien minuscule sur cet immense scène principale. On se souvient avec émotion de la date intime à la Boule Noire, il y a un an de cela... Le cadre était clairement plus adapté ! Les zicos, fidèles à leur réputation de progueux, sont statiques au possible sur scène, les yeux rivés sur leurs manches (toujours sans sillet pour les guitares). Les lunettes de soleil ne font pas trop sérieux non plus, le groupe souhaitant peut-être afficher un certain décalage avec le folklore métallique du fest, à l'image de cette peluche accrochée au clavier ! Toujours est-il que, si visuellement tout ceci semble extravagant, musicalement ça gère toujours bien. Ces mecs sont irréprochables et le final sur "Cockroach King" fermera la bouche au sceptiques. Ne nous leurrons pas, les gens devant la scène n'étaient pas là par hasard et même si le set fut loin d'être celui de l'ambiance dans le pit, tout le monde aura pris sa ration de prog avec bonhomie. Le fan hardcore se cachant derrière ces lignes regrettera quand même que le premier album soit passé complètement sous silence, mais en une demi-heure, des choix s'imposent forcément.
Mais poursuivons. Ô joie de pouvoir enfin rencontrer des héros de l’ombre, à savoir Cock & Ball Torture (Altar - 11h40). Presque vingt ans d’existence pour l’un des groupes ayant inventé le porno grind (même si l’expression est apparue bien plus tard). Allemand, dix-huit ans de grind au compteur et un rendez-vous sous Altar pour mettre les pendules à l’heure. Le groupe se pointe sans pression (de toute façon, l’a-t-il déjà eue ?) et va balancer son grind gras lourd à tempo moyen pour la majorité du registre. Pas de backdrop, pas d’artifices, juste un trio prêt qui va balancer sa sauce sonore et faire danser le public, déjà nombreux vu l'horaire matinal et le registre pratiqué. Le son n’est pas parfait, surtout dans les grognements, mais la rythmique se suffit à elle-même. Difficile ensuite d’identifier les titres joués, même si certains riffs le sont par le plus grand nombre. Plaisir de découvrir en live ce genre extrême et de voir s’agiter les metalleux, non pas dans des pogo furieux (enfin presque), mais dans de vrais moments de danse ensemble. Danse avec les stars peut aller se rhabiller, the place to dance is Cock And Ball Torture’s pit. Et on poursuit sous les tentes (la force de l'habitude de nommer Altar et Temple ainsi) avec Der Weg Einer Freiheit (Temple - 12h15). Quel plaisir de retrouver ce groupe bien aimé de votre webzine ! La si jeune formation germanique fait de plus en plus d'émules dans l'Hexagone et c'est tant mieux ! Eux aussi fraîchement signés chez les Marseillais de Season Of Mist, leur présence aujourd'hui à l'affiche était indispensable pour défendre leur sublime nouveau bébé "Stellar". La setlist est au format classique, mais se fera toujours aussi appréciable. Le groupe n'a visiblement pas encore perfectionné ses points faibles et les même remarques évoquées quelques mois plus tôt lors de leur passage en région parisienne (et également ressentis lors de leur set du Roadburn 2015) sont toujours un peu d'actualité. A savoir, d'une part la relative staticité des membres sur scène et d'autre part, le son pas parfait avec, en particulier, cette fâcheuse grosse caisse qui a tendance à trop couvrir les guitares et noyer les riffs. Si l'on excepte cela, le groupe déroule avec un professionnalisme effrayant son black metal racé, impeccablement propre et tranchant. Rappelons tout de même le très jeune âge des membres, qui n'ont guère plus de la vingtaine et qui assurent avec un charisme relativement serein de jouer sur une scène de festival de renommée internationale. Une fois encore, le final sur "Zeichen" marquera le point d'orgue du show, avec cette composition en montagnes russes qui semblerait ne jamais se terminer et dont on souhaiterait qu'effectivement jamais elle ne se termine. Du bon boulot, on espère les revoir vite et avec les quelques défauts corrigés cette fois-ci !
Après cette délicieuse pause et l’une des grosses découvertes black-métal de l’année, retour à un style plus râpeux et grinçant avec les poètes de Prostitute Desfigurement (Altar - 12h50). Malgré le nom, c’est bel et bien un lourd death metal qui va être joué et qui prend pour le coup, en live, toute sa dimension. Si le groupe s’est illustré en studio et a réussi (un peu) à sortir du lot, le court set très agréable qui va être joué réussit sans aucun doute à fédérer le public connaissant peu ou bien le groupe, mais aussi et surtout probablement en rameutant les curieux du jour. La machine à blaster sur les couches vocales grogneuses et rocailleuses ravit l'auditoire. La vitesse et la brutalité ressortent bien en live et à vrai dire, le groupe prend une bonne dimension par rapport aux studios où l’on a peut-être tendance à moins prendre au sérieux (à tort) leurs compositions. En tout cas, pour ce début d’après-midi, ça pète de partout et l’Altar continue sa montée en puissance façon death metal ! Lorsqu'on aime on ne compte pas et voici (déjà) le troisième concert de Monarch! (Valley - 12h50) en moins de trois mois pour votre dévoué reporter : la bête commence à être bien connue, mais ne cesse de procurer du kiff. Alors présentation, car aucun papier ne témoigne encore du groupe sur le webzine. Monarch! se définit comme un épais mur de son noir, un bloc massif et brut, une entité à part entière qui n'a rien à voir avec ce qu'il est commun de trouver derrière le mot musique. Ayant été formé entre autres par des membres de Year Of No Light, le line-up actuel accueille en son sein un guitariste du groupe girondin. Du sludge assommant de ces derniers, Monarch! s'en veut le pendant encore plus sans concessions, sans claviers, à l'atmosphère encore plus noire que les ténèbres. Le chaos. Le Drone. Voilà, le mot est lâché. Des vibrations qui vont et viennent, un tempo plus lent que du funeral doom et une puissance incroyable dans chaque riff. Ou plutôt, du quasi unique riff de chaque piste d'un quart d"heure. Car oui, il n'y a pas que le rythme qui est au ralenti ici, les progressions sont elles-mêmes mises au pas, donnant à chaque moindre variation encore plus d'impact. Mais comment passer sous silence la principale attraction visuelle du groupe en la personne de la charmante frontwoman, Emilie Bresson, aux allures d'écolière gothique ? Arborant devant elle son jeu de bougies sur son plateau d'effets, la jeune fille murmure, chantonne et crie. Mais crie vraiment. Le cri déchirant, du fond des entrailles, à peine aidé par ses moult effets, qui servent essentiellement à ajouter delay, reverb et autres échos aux parties vocales. Visuellement, l'impact sera bien moins saisissant qu'en salle plongée dans le noir et simplement éclairée des quelques bougies. L'horaire aussi joue en défaveur de la formation et pourtant le fan saura largement y trouver son compte. Pour le profane, ce sera quitte ou double. Le groupe ne laisse pas indifférent, on adore ou on déteste...
13h35 ça n'a l'air de rien comme ça, et pourtant, c'est l'heure qui donne généralement le coup d'envoi des concerts de l'après midi, et les groupes qui officient sur ces horaires périlleux sont prévenus : soit ils font du très bon, soit ils mettent en musique la sieste post-lunch des festivaliers! Par exemple (et dire que votre serviteur avait été prévenu...) Infestus (Temple - 13h35), ce projet teuton de black metal mené par une seule tête pensante, si imaginatif et percutant sur album, se rate totalement. Pourtant sur album la magie opère, en témoignent les deux précédents opus livrant des compositions acérées, à la mélancolie et à l’efficacité si équilibrées. Un projet misanthropique si émouvant... Qui aurait visiblement dû s'arrêter là ! La déception est en live à la hauteur du génie sur album. Difficile d'expliquer un tel renversement de situation. Le leader se positionne en frontman, majoritairement avec un micro, seul, parfois accompagné d'une guitare également. Pour reproduire les multiples couches de musique, on compte deux guitaristes l'accompagnant ainsi qu'une section rythmique basse/batterie. Jusque là, rien de bien étonnant. Oui, mais les musiciens semblent complètement à côté de la plaque ! Comme bloqués du fait d'un accessoire oblongue dans l'arrière train, absolument personne ne se bouge et on assiste à une performance complètement scolaire, pas toujours très proprement exécutée de plus, qui coupe net avec la maturité des compos. Le chanteur au contraire, en fait des caisses, remuant grotesquement tel un Dani Filth version grand blond allemand. Ceci n'a pas de sens. Et on a beau aimer les titres, l'attitude pitoyable du groupe sur scène leur fait perdre toute substance, émotion et crédibilité. On préfère alors vite fuir la scène que de subir encore ce désastre. A oublier. D'autant qu'à cette même heure explose le "Rien-à-Fout" , soit un live-report version courte du set de Vitamin X (Warzone - 13h35) pour son cru 2015 au Hellfest. Inutile de résumer ou de raconter, ce groupe pour hyperactifs se déchaine en ce début d’après-midi, en plein cagnard et remonté comme toujours.Même si le groupe en profite pour balancer quelques nouveaux sons, c’est la vingtaine de bombinettes hardcore que l’on vient chercher ou se prendre comme une insolation alourdie au muscadet. Circle pit, braveheart, ses kilos de bouées et autres animaux gonflables sont pré-requis avec toute la bonne humeur expulsée par la colère et le discours. Rien d’original, mais une nouvelle leçon de densité et de punch comme seule sait la distiller la Warzone. L’idée de planifier ce type de groupes sur les scènes plus grandes refait chaque année son apparition et le set proposé rejoint les exemples de l’argumentaire : version Hellfest, Vitamin X peut s’arranger d’une Mainstage tant l’énergie est communicative. Ready to burn et ready to fight !
Côté Valley, on attendait beaucoup du passage de The Wounded Kings (Valley - 14h20), étant très fan de ce qu’on avait pu entendre sur album (notamment l’excellent Consolamentum), mais le doom occulte et sur-lourd des britanniques s’avérera un poil trop propret et scolaire pour nos oreilles avilies par tant d’expériences musicales retorses. Sans aucune faille dans l’exécution, les Rois Blessés ont déroulé un set techniquement parfait devant un public conquis, mais dans lequel on ne parvint personnellement jamais véritablement à rentrer, ne retrouvant pas complètement l’ambiance funeste et inquiétante distillée au sein de leurs albums. Un bon concert concert néanmoins, mais sans nul doute à revoir dans des conditions plus appropriées que celles d’un bel après-midi d’été ensoleillé sous une Valley nettement moins sombre et intime que par le passé. La rançon du succès sans doute…Dans la famille des grandes questions métaphysiques, d'autres se demandaient quelle forme donner au passage de Crusher (Altar - 14h20). Effet revival ou sortie d’hibernation ? La première extinction du death metal avait eu raison de pas mal de groupes dont quelques bonnes équipes françaises, y compris Crusher, qui avait placé la barre très haut avec leur opus Corporal Punishment sorti en 1992. Joie mesurée de pouvoir voir ce groupe live quand on connait le ravage des années et l’effet revival qui conduit parfois à des moments gênants... Mais le public se presse tout de même pour voir le groupe. Enfin le groupe, plutôt son chanteur, puisque seul le frontman Crass (ça passe mieux que Mickael Da Silva) représente dorénavant le brutal Crusher de la grande époque. Bien accompagné musicalement notamment par Junior Rodriguez, guitariste luxe de session live ou studio, l'Altar gueule déjà bien fort et la mixité des âges fait plaisir au chanteur monté sur ressort qui débauchera pas mal de vertus, à commencer par son énergie. Si le son est plutôt moyen, la setlist prévoit bien sûr quelques anciens titres évidemment très attendus, mais aussi en profite pour faire un peu de promo de circonstance. Coté chaud et show, deux assistantes prêtent mains fortes au MC brutal, tantôt en faisant performance de piercing pour l’autre, tantôt en caressant (oui mettons ce mot politiquement correct) leur chanteur héros. Le set finira par une prestation de Crass qui se transformera en pantin articulé grâce aux aiguilles placées dans ses joues. Le tout sous des rythmiques bien lourdes et bien death. La fosse aura réagi tout du long dans un amas de pogos débauchés. Le concert spectaculaire du jour !
retour sur les mainstages ensuite, où il y a parfois des programmations que l’on ne comprend pas bien. Celle de Ghost Brigade (MS2 - 14h30) en début d’après-midi sur la Mainstage en fait partie. Le public est plus que clairsemé pour accueillir le metal gotho-doom des Finlandais. Ce qui est dommage, puisque la musique planante et mélancolique du groupe a de quoi séduire un large public. Casquette vissée sur la tête, Manne Ikonen semble craindre le soleil qui brille bien fort, trop fort pour la musique du groupe, sans doute. La prestation sera cependant de bonne qualité, sobre (c’est le moins qu’on puisse dire), mais efficace, à l’image de son chanteur. Les guitaristes nous gratifieront même d’un peu de headbang sur les morceaux un peu agités. Petite déception sur la setlist, puisqu’on regrettera l’absence des fabuleuses « Clawmaster » et « Soulcarvers ». Groupe à revoir dans d’autres conditions, c’est certain ! A présent et dans la famille « Wilmington, Caroline du Nord, USA, fracasse la Valley », je voudrais le premier frère consanguin (pour le deuxième, rdv sur la page de reports du dimanche) ! ASG (Valley - 15h50) a fait un véritable carton en ce samedi après-midi avec son énorme heavy rock protéiforme changeant de style au fil des albums et des envies du combo : stoner, doom-sludge, heavy-rock, grunge, les gars de Wilmington balaient tous les styles sans grande élégance, mais avec une forme de décontraction typique du sud des USA et surtout, un talent assez déconcertant. C’est vraiment le genre de combo qui peut plaire à tout le monde et cela s’est vu en ce deuxième jour de Hellfest. Alors si en plus ils se mettent à jouer des tubes absolus comme « Right Death Before » (grand moment) ou « Dream Song », on ne répond plus de rien ! Vivement la suite de la fessée avec Weedeater, le petit frère sale et un peu lent car fini au bourbon distillé par le gosse de Deliverance (film aussi sale que mythique de J. Boorman) dans un vieux capot de Mustang désossée.
La sortie de tente est rude, car on est en plein aprèm, et alors que l'astre solaire fait cruellement sentir sa brûlante morsure, le festivalier, guère motivé par la perspective de se faire cramer la couenne devant une mainstage squattée par un groupe lui inspirant de la méfiance, tend à se réfugier sous ce qu'il faut bien appeler désormais un hangar à boeing 747, où ferraillent les sections les plus extrémistes et autres refoulés des scènes prestigieuses. Ainsi s'établit une rencontre imprévue avec les Britanniques d'Onslaught (Altar - 15h50), rescapés du thrash metal des eighties qui n'ont jamais pu se défaire d'une réputation de seconds couteaux, globalement méritée si l'on s'en tient à leurs enregistrements studios. Les quarante minutes qui suivent s'annoncent donc peu passionnantes, mais semblent garantir une sudation raisonnable en ces fortes chaleurs. Erreur sur toute la ligne. En effet, il ne faut pas deux titres aux Anglais pour déclencher une véritable émeute dans la foule. La recette ? Tout à fond avec un son qui claque. Même pas besoin de faire de bonnes chansons, encore que le répertoire déroulé devant les slammers furieux n'est pas indigne. Dopés par la puissance claire qui émane de leurs amplis, les cinq membres du collectif montrent leur avantageuse technique. Outre Sy Keeler, le chanteur souriant qui aura maîtrisé son sujet entre imprécations des profondeurs et suraigus vitrifiants, l'autre musicien à tirer son épingle du jeu se révèle être le guitariste le plus jeune de la bande, Leigh Chambers, monstrueux d'aisance et couplant sa dextérité avec une énergie communicative, sauts à la David Lee Roth (jeune) inclus : certains groupes-phares du thrash en recherche d'un second guitariste fiable feraient bien de jeter un œil sur les performances de cet impressionnant individu. Néanmoins, c'est tout le groupe, hormis le guitariste historique un peu plus en retrait, qui mouille salement le maillot, ne relâchant jamais la pression. Total : le public a beau être rincé, il en redemande. Sans discussion, la performance d'Onslaught s'inscrit parmi les plus denses ayant secoué cette édition du Hellfest.
A peine le temps de traverser le site qu’on se prend en pleines maxillaires le début du set des franciliens de Rise of the Northstar (Warzone - 16h35) LE groupe français qui monte (signature chez Nuclear Blast, tournée internationale, concerts sold-out, etc.). C’est au moins la troisième fois qu’on les voit, mais la différence entre le set vu juste avant (ASG) est néanmoins saisissante : chez ROTNS, on mornifle sec, on est des « tough guys », on harangue la foule et on balance les trempes crossover hardcore/thrash/beatdown à la sauce shibuya sans discontinuer. Le public est tout acquis à la cause d’un Vithia qu’on a déjà pourtant vu bien plus en voix, mais l’énergie, la passion et l’authenticité du bonhomme sont tout de même sacrément attachantes. Et puis derrière lui, ça ne déconne pas du tout : les perles hardcore belliqueux que sont « Dressed All In Black », « Welcame » ou « Demonstrating My Saiya Style » s’enchainent sous un soleil de plomb et un pit en fusion totale. Ces mecs sont nés pour tout ratiboiser en live, c’est une évidence, et on l’a encore vérifié en ce samedi après-midi ensoleillé. Ensoleillé et chaud...Si chaud partout sur le festival…! Mais qu'à cela ne tienne, fuck la chaleur, fuck les insolations, le parterre de la MS01 est prêt. Prêt pour quoi me direz-vous ? Eh bien il fait soif, la poussière vole, le parterre est plein et va pouvoir vivre son grand moment de rock-à-teuf australien avec un Airbourne (MS1 - 16h45) déjà plébiscité rien que par le nombre de spectateurs présents. Le groupe aurait même pu être planifié le soir au regard du monde déjà présent et excité. Et l’arrivée des frères O'Keefe va exploser les décibels. Pour introduire tout cela, rien de mieux qu’une intro musicale OST issue du film Terminator : l’effet est immense et le set n’a même pas commencé que tout le monde est déjà prêt à « rocker sa race » et à prendre l’un des super pieds du jour. Coté setlist, il n’y aura pas de surprises, le groupe tournant en promotion de son dernier album, complété façon best-of de la disco sur mesure pour festivalier. Bref, du kiff énorme de « Ready to Rock » à « Black Dog Barking », en passant par « Girls in Black ». De toute façon, le public est venu chercher LE riff couillu. Alors que tout le monde kiffe les O’keeffe, les ennuis techniques s’invitent et une coupure son survient lors du set. Et comme ce genre de problème n’est qu’une occasion pour le groupe de montrer l'étendue de sa classe, même sans son, le groupe parvient à faire bouger le public et le faire gueuler. Un mal pour un bien, le jus revenu, c’est le traditionnel éclatage de canette sur la tronche qui lancera la dernière partie du set australien. Comme d’habitude, un set énergique, fonceur et punchy, bref… le public ramasse encore sa mandale de rock qu’il est venu chercher et fini par un « running wild » sauvage as fuck !
Les bifles continuent de s’enchainer à la Warzone alors que débarquent les plus célèbres des porteurs de torche modernes du hardcore old-school, les gardiens de la tradition, on parle bien entendu des nerveux de
Terror (Warzone - 18h15). Mais le show de cette année sera clairement en deçà de ceux des années précédentes, la faute à pas de bol et plus précisément à un frontman absent pour cause de sale fracture quelques semaines avant le Hellfest. Et sans ce dingo de Scott Vogel, Terror n’est clairement plus le même. On assistera donc à un set raccourci (à peine 40 minutes) et moins énergique que d’habitude, le bassiste, qui tenait le micro pour l’occasion, ayant un peu plus de mal que son frontman habituel à motiver les foules. Le concert restera néanmoins et comme d’habitude un beau moment de fraternité tough guy, et on peut malgré tout saluer Terror de n’avoir pas purement et simplement annulé son concert, ce que pas mal de groupes se retrouvant sans chanteur auraient fait sans états d’âme. Pendant ce temps...Le succès des groupes de folk metal au Hellfest est assez incroyable, et ça se vérifie une nouvelle fois en ce samedi, puisque
Finntroll fait chapiteau comble au Altar (Altar - 18h15). Tellement comble que la foule s’est massée jusqu’à plus de dix mètres autour du chapiteau. Qui dit chapiteau inaccessible, dit concert inaccessible. Dommage, les trolls ont du rassasier leur public avec leur bonne humeur…C'est d'ailleurs la tendance générale, et la bonne humeur investit également une "Main
Slash" renommée pour l'occasion, le temps du set du plus fameux chapeau de l'histoire du rock, accompagné du mec qui vit dessous depuis toutes ces années (MS1 - 18h40) (live report
ici ).
On reste ensuite sur les mainstages avec « un groupe culte » comme le qualifie notre éminent photo-reporter, curieux de voir évoluer cette formation pionnière de la new-wave au tournant des années quatre-vingts (toujours elles). Cornaqué de main de maître par le mystique chanteur Jaz Coleman, Killing Joke (MS2 -19h45) a évolué, muté, dérouté, injectant de grosses doses de plomb ou convoquant les machines au gré des inspirations de son imprévisible leader. C'est malheureusement la dernière tendance évoquée qui l'emporte en ce début de soirée. Malheureusement, parce que la prestation de cinquante minutes se résume en une enfilade de longs morceaux tournant autour d'un motif répété inlassablement. Les rares tentatives de variations sont noyées sous trois-cents décibels de basses, ce qui explique sans doute pourquoi les musiciens ont l'air de suprêmement se faire suer. Le jeune préposé aux bidouillages électroniques est quasiment inaudible alors que bassiste et guitariste ne compensent pas, loin s'en faut, le monolithisme de leur partition par l'exubérance de leur jeu de scène – à côté, Lemmy et Ian Hill feraient figures de night-clubbers sous ecsta. Certes, les deux comparses ne sont plus tout jeunes, mais le Hellfest permet de constater chaque année qu'il existe des semi-retraités autrement plus énergiques que ces pépères en mode automatique. Reste l'icône Coleman, dont le timbre si particulier est lui aussi dominé par le boucan général. En communication minimale avec l'assistance – ni bonjour, ni merde, ni merci – il aura néanmoins été le seul membre du collectif à se déplacer sur l'estrade en mimant une sorte de marche au pas de l'oie et aura arboré pendant tout le concert un sourire figé, confinant au rictus. Si un individu a envie de monter un groupe après avoir vu ça, qu'on lui fasse renoncer à son projet pour toujours.
On poursuit sur les mainstages et quoi de mieux pour commencer cette soirée à mi-parcours du fest' que le southern rock bluesy des ZZ Top (MS1 - 20h40) dont le décor est tout à fait dans l’esprit du groupe ? Les légendes vivantes vont rameuter encore et toujours plus de monde sur le plateau du festival. On ne parle même plus du devant des scènes puisque de toutes parts le public s’installe pour recevoir, on l’espère, une belle leçon de rock. Le festival a de sacrés bons souvenirs de sets de dinosaures du rock dans son escarcelle, mais malheureusement, pour son nouveau passage eau Hellfest, le ZZ va se transformer en demi-molle voire tomber tout mou et tout rabougri.. même la moumoute guitare ne suffira pas à faire rougir le membre ni à faire saliver le public comme espéré. Ni un "Foxy Lady" hendrixien, ni un "Gimme all your Lovin’", ni même la cultissime "La Grange" ne feront péter le bouton du calbute du plaisir auditif. Certes, voir live le son tant aimé de la guitare blues rock plait, mais la prestation trop lente, trop vieille ou trop ennuyeuse donne vite envie de zapper sur le prochain groupe. Étonnant et décevant. On part donc bien vite vers des horizons nettement plus énergiques, et la venue de ce bon vieux Ice-T au Hellfest est l’occasion de relater ce qui restera un des seules minuscules « erreurs » de l’orga cette année : faire jouer Body Count sur la petite, l’isolée, l’inaccessible Warzone. Thé Glacé et sa bande ont en effet ameuté une telle foule qu’il était extrêmement difficile d’accéder au site (nous y étions plus de vingt minutes avant et ce fut déjà rude), et qu’en sortir fut un véritable bordel sans nom. Mais au-delà de ça, la prestation de Body Count, au-delà d’avantageusement relever le quota de minorités ethniques présentes sur le site (on peut s'en désoler ou s'en foutre - s'en réjouir me semblerait fortement déplacé - mais c’est un fait : les musiques extrêmes ne parlent pas du tout aux minorités, quelles qu'elles soient), fut très sympathique : une heure de hardcore urbain old-school, groovy, truffé de tubes à l’ancienne, mais faisant surtout la part belle au dernier (et excellent) album en date des Américains. L’attitude d’Ice-T fut pour sa part des plus plaisantes, mi-goguenarde mi-provocatrice, comme il convient à un vieux thug de son acabit, à qui on ne la fait plus. A n’en pas douter un moment sympa et un peu à part dans la programmation du fest’ !
Autre moment sympa voire carrément fantastique, le set ultra-attendu des immenses
Faith No More (MS02 - 21h45)(report
ici). Et puis tout d'un coup tous les concerts s'arrêtent... Le programme avait bien précisé «
feu d'artifices », mais nombreux étaient les doutes et les suspicions chez certains, le métalleux moyen étant par nature méfiant envers tout divertissement n'apparaissant pas comme assez "evil" à ses yeux intransigeants. Sur tous les écrans disponibles sur le site est alors projeté un film, comme un diaporama, avec force repères chiffrés allant du nombres d'acteurs aux hectolitres de bière enfilés chaque minute depuis sa création et bien d'autres données big data, le but avéré étant de saluer le long chemin parcouru par le Hellfest depuis sa naissance aux forceps, des cendres du défunt Furyfest. Dix ans d'existence avec un film hommage à tous et à chacun : des organisateurs, aux groupes, au public, aux bénévoles, aux habitants de Clisson et sa région. Défilent ensuite plusieurs images des groupes ayant fait l'histoire du festival. Le site applaudit joyeusement, et débute alors LE feu d'artifice : gigantesque comme un pit de Hatebreed, massif comme un riff de Down, dantesque comme un show d'Iron Maiden, il emplira totalement le ciel sur toute la largeur du terrain de la Mainstage 2 jusqu'à l’accueil PMR, avec des explosions de partout, tandis que retentissent des tubes allant de "Thunderstruck" (
AC/DC) à "South of Heaven" (
Slayer), en passant par "Bohemian Rhapsody" (
Queen) et "Satellite 15" de
Maiden. Le final sur
Slayer est si conséquent et pétaradant qu'il couvre presque totalement la musique. Le bouquet final passé, le site applaudira fortement et longuement en lent decrescendo, cet événement marquant laissant finalement la musique reprendre ses droits. Mais que d'émotions! Pour la MainStage,
Scorpions prend le relais et va donner une bonne leçon de rock du haut de ses cinquante ans de carrière. (report
ici)
Obituary (Altar - 23h35) en live, c'est cool. Ah, il faut développer ? C'est bien simple, peu de groupes fer de lance d'une scène ont aussi bien survécu que Obituary. Dans la scène death floridienne du début des 90s, beaucoup d'acteurs ont disparu ou sont tombés aux oubliettes, pas mal ont émergé récemment pour faire du revival avec des succès pas toujours au rendez-vous... Et Obituray a su se maintenir au milieu de tout ça, traçant son bonhomme de chemin en restant ce groupe de légende immortel et infaillible, mené par le grand chanteur John Tardy resté fidèle pendant toutes ces années à son look short/baskets et à son growl raclé dégoulinant. Une valeur sûre qu'on retrouve toujours avec le même plaisir sur scène, accompagné d'un son qui se veut carré et lourd tel un rouleau-compresseur. C'est en effet la puissance inouïe de l'enveloppe sonore qui vaut le détour à chaque fois, les compos étant à côté relativement classiques pour le genre. On parviendra toutefois toujours facilement à distinguer les vieux titres de Slowly We Rot au nouveautés de Inked In Blood, grâce à un je-ne-sais-quoi, peut-être plus de maturité et moins de spontanéité. Le constat demeure amusant. Malheureusement, le deuxième journée s'achève avec beaucoup de fatigue pour votre bien-aimé et l'épreuve pour rester concentré à cette heure tardive face à ce gros bloc uniforme fut herculéenne. On ressort encore plus abasourdi de ce show, dont on n'a finalement que moyennement profité, mais le sourire est quand même là !
Même en ayant manqué le premier tiers de la prestation du légendaire trio de Newcastle
Venom (Temple - 00h40) , il ne faut guère de temps pour se mettre dans l'ambiance tandis que celui-ci déroule le dantesque "Buried Alive" - dans le style pesant, "Warhead" fera également forte impression. Foisonnants jeux de lumières, fumigènes, monumental mur d'amplis, son un peu crade : la messe noire et métallique des multi-précurseurs thrash-death-black ne se déroule pas précisément dans la quiétude et le recueillement, et c'est très bien comme ça. La fatigue aidant en cette fin de journée, les fidèles semblent cependant quelques peu amorphes. Mais lorsqu'un Cronos bien en voix - après avoir pesté contre les « politiques » qui l'auraient privé, une fois encore, de ses effets pyrotechniques - annonce les tubes, un sursaut d'énergie secoue la foule qui s'hystérise sur les "Countess Bathory", "Black Metal" et un "Witching Hour" d'anthologie en clôture. Un set intense et réjouissant. Suite et fin d’une journée de très très haute volée à la Warzone, et à tout seigneur tout honneur, ce sont les légendes de
Biohazard (Warzone - 0h40) qui viennent clôturer l’affaire et mettre tout le monde d’accord avec un show ultra-physique, comme à leur habitude. Le niveau d’énergie de ces mecs est juste hallucinant, Graziadei, Hambel et Roberts bouffent l’espace de la Warzone en véritables bêtes de scène, tout en balançant tube hardcore-metal sur tube hardcore-metal. Difficile de faire mieux en termes d’intensité et de jeu de scène (mention spéciale au bassiste et ses spin-moves et pas de danse two-step incessants, le tout en jouant, chapeau !). Et même si il y a bien longtemps que le groupe ne propose plus rien d’intéressant sur album, c’est toujours un plaisir de voir qu’ils ont conservé la même énergie sur scène qu’il y a quinze ans. On appelle cela la passion et l’intégrité, deux des mamelles du hardcore, et ces gars-là comptent parmi les plus fiers représentants de ces principes, c’est indéniable.
Pour finir cette journée sur une touche légère, rien de mieux que faire appel à Marilyn Manson (MS2 - 00h30) et à sa bonne humeur légendaire ? Mouais… Si on aime le révérend, ce n’est certainement pas pour ça. D’ailleurs, l’aime-t-on encore ? Car si The Pale Emperor a rassuré bon nombre de fans quant à ses capacités sur album, on est encore en droit de se demander de quoi est capable le bonhomme sur scène. Précédé d’une réputation sulfureuse, et c’est peu de le dire, saura-t-il faire honneur à cette soirée si spéciale ? La réponse est… non ! En effet, les attentes seront assez vite déçues par une prestation paradoxalement trop sage. On est loin de la folie furieuse de Antichrist, on n’est plus dans l’exubérance de Mechanical Animals ni de Golden Age Of Grotesque. Dans le visuel, il y a un peu de tout ça, certes, avec ces vitraux majestueux à l’effigie du chanteur, des costumes qui changeront au fil du set et un déluge de lumières et de fumée, mais c’est au niveau de l’attitude que Manson pèche. Pourtant la setlist a de la gueule ("Deep Six" "Disposable Teens", "Sweet Dreams", "Tourniquet", "Rock Is Dead", "The Beautiful People", entre autres, ça fait son petit effet !), musicalement ça tient la route, vocalement et scéniquement, l’homme sera plutôt bon, même si on sent qu’il faiblit assez vite. Mais au niveau du contact avec le public, il sera distant et suffisant. Rajoutez à ça des pauses inexplicablement longues entre les morceaux, peu de communication, de rares provocations qui fleurent la melonite aigüe (même si l’idée de demander au public de jeter des sous-vêtements sur scène pour l’anniversaire de Twiggy Ramirez était plutôt marrante), et l’absence de rappel, et vous obtenez un concert moyen, de la part d’un artiste qui avait pourtant su séduire à nouveau son public sur album. Et qui avait pourtant l’occasion de prouver à nouveau qu’il fallait compter sur lui en live également. Dommage, vraiment…
Malgré cette dernière prestation et la chaleur continue, chacun aura trouvé son compte en cette deuxième journée: une organisation remarquable prévoyant accès aux points d'eau ou « ravitos » de nectars divers donnera de quoi tenir aux plus excités des festivaliers. La programmation de ce deuxième jour aura également engendré son lot d'émotions et de « ouïssance » et comme à chaque fois vers les 2h du mat' on se dit, sourire aux lèvres : « putain plus qu'un jour... putain chouette encore un jour ».