Damnation Festival 2015


Damnation Festival

UN REPORTAGE DE...




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Jour 1 : 07 novembre 2015

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Jour 1 :07 novembre 2015



Parfois, on se rend compte qu'on mène un rythme de vie un brin tordu ! En tout cas, c'est flagrant quand se rendre sur Paris en semaine pour voir un concert relève de la pure abstraction, tandis que se taper un aller-retour de 2000 bornes vers Leeds sur un week-end - exceptées les joies des Eurostars en retard, les bouchons londoniens et les « 'tention de pas prendre le rond point dans le mauvais sens !!!» – c'est du spacecake ! Billets en poche depuis belle lurette, appâtés par une affiche ô combien engageante, (Ndlr : Tabris, jambes en coton !), le seuil d'impatience est simplement à son comble au petit matin du Damnation Festival. Le Damnation Festival... Cette sympathique initiative datée de 2005, « par les fans pour les fans », et qui n'avait à l'époque pour seule ambition que de faire un peu plus de place aux groupes de metal extrême, trop absents d'autres fest. Pari tenu encore cette fois-ci, l'horizon live offert d'ordinaire aux conduits auditifs s'ouvre d'une dimension supplémentaire.
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Le lieu des réjouissances ? La Leeds University Union, autrement dit le lieu de détente du campus, mais dont la configuration ne lui confère qu'un cousinage très lointain avec les rachitiques « cafét' » des facultés hexagonales. L'endroit est fameux : à peu près tous les grands groupes britanniques – entre autres – s'y sont produits un jour et c'est ici que The Who a enregistré son plus célèbre album live. Avec une arrivée glorieuse sur place aux douze coups de midi (on avait faim de son !), toute latitude est offerte pour tranquillement repérer les lieux : quatre scènes réparties dans un cadre un poil biscornu - un dédale d'escaliers et de couloirs - mais sympathique (Ndlr : vous saviez qu'il y avait des supérettes à l'intérieur des facs anglaises, vous ?), un merch' éclaté également en deux lieux - l'un faisant place belle aux groupes du jour et le second plus générique (assez peu fourni d'ailleurs, dommage) - et puis l'incontournable bar. Enfin plutôt LES bars, puisque chaque salle, petite ou grande, possède son débit de boisson attitré en plus du bar central. Le temps aussi de fignoler une sélection définitive grâce au très... pratique « official souvenir programme » (hum ! tout aussi biscornu que la configuration des lieux). Choix cornéliens s'imposant de facto pour certains car qui dit quatre scènes, dit sets concomitants. Choix au final plus évidents, à croire que le running order a été fait pour nous être agréable : aucun chevauchement de groupes parmi ceux qui avaient retenus l'attention et suscité l'envie d'accomplir ce petit périple. Soulagement. Direction la Terrorizer Stage, une scène à double étage où il convient de s'éviter des frayeurs de gosse en dévalant les marches trop obscures, pour profiter du set d'entrée de jeu. Ne connaissant le groupe ni d'Adam ni d'Ève, aucune attente ne s'impose et, le cœur tout léger d'être là, on se contente de se laisser porter par la bonne humeur ambiante, assez immédiate il faut l'admettre. Le Roi Est peut-être Aveugle, mais nous ne sommes pas sourds ! The King is Blind introduit en effet ce fest avec un doom/death énergique, entrainant rapidement la salle dans son sillage. Le jeune groupe d'Essex pose ses ambiances rageuses avec aisance et son frontman, Steve Tovey, convainc sans problème, posant sa voix sans accroche sur des riffs efficaces et une rythmique implacable, haranguant la foule avec un plaisir non masqué. Les pogos se lancent dans un public déjà acquis à la cause du groupe et on se sent bien. Rien à dire de plus. Le sourire est là !
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Nous rejoignons alors l'Electric Amphetamine Stage, petite salle intimiste aux allures de cave, pour le set d'Undersmile (Ndlr : sur chaleureuse recommandation de notre comparse AtomicSchnitzel de Thrashocore, soupçonné de se retenir sur l'instant de sautiller sur place !). Découverte encore et changement de registre, car le groupe d'Oxford officie dans le registre sludge/doom/drone. Ce qui saisit d'emblée est bien évidement le charme des deux frontwomen. Difficile de rester insensible à l'attraction de ces deux voix et de ces deux visages « habités ». Les sonorités pensantes viennent rapidement plomber délicieusement les tripes et on se plairait à se laisser porter... Oui, on se plairait seulement, car malheureusement, la prestation se trouve quelque peu entachée. La configuration des lieux pour commencer ne permet pas de se mettre parfaitement à son aise pour jouir de la prestation (on relèvera notamment un bruit de fond provenant du bar placé à l'arrière de la salle polluant grossièrement les esgourdes). D'autre part, les balances mal équilibrées sont un réel un problème - une batterie trop mise en avant gâte l'ensemble. Enfin sur la prestation elle même, malgré des premiers titres emballants, on en vient à trouver l'ensemble trop froid, trop mécanique, les ambiances ne se posent pas et au final tout devient uniforme, répétitif, au point d'ennuyer. Les conditions du concert auront donc nui à la performance du quatuor, dont on retiendra surtout le look gothico-dépressif de ses deux meneuses alors que les ambiances plombées et poisseuses qui hantent leurs enregistrements promettaient une séquence plus immersive. Dommage.
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L'une des grandes attractions de cette édition du Damnation Festival, c'est la présence de groupes membres du collectif Church of Ra. Retour donc sur la Terrorizer Stage pour suivre la prestation de Wiegedood. Le changement d'ambiance est à nouveau radical : le groupe flamand nous offre en effet un black metal au goût de terre, incontestablement lié à l'aura de lave et de cendres d'Amenra. Un son gras qui vous donne envie de vous réfugier au plus profond d'une cavité froide et humide, de fermer les yeux le plus fort possible et de tenir en éveil tous les autres sens. Malheureusement encore, la section rythmique se révèle trop mise en avant, chant et guitares sont littéralement étouffés. Une oreille curieuse, ou plutôt une avidité à tout aspirer s'accommodera tant bien que mal pour ce set de cet écueil et tentera de tirer de la bouillie sonore la trame recherchée, avec plus ou moins de succès. Cette même oreille déterminera finalement que la musique est belle et bien de qualité, le son délivré est propice à une belle plongée intérieure et le décorum posé a tout pour emporter l'esprit bien au-delà de la scène. Mais le constat est sans appel : sortis de là, difficile de fixer et mémoriser réellement quelque chose de plus précis qu'un magma d'impressions, plus ou moins agréables et plus ou moins impactants. A ré-appréhender une prochaine fois, encore.

Accordons-nous à présent une pause bière.... Vous savez, une pinte bien british, ce truc archi-amer que l'on vous sert à ras bord et qui inonde trop volontiers les gosiers entamés de ceux qui naviguent de scène en scène la bouche ouverte, à baver comme les derniers des groupies ! Passé cet intermède bien agréable pris au bon soleil (disons qu'il n'y avait point de fog à cette heure), le rendez-vous est pris pour retrouver avec émotion nos chers Colmariens de C R O W N sur la Eyesore Stage, aux dimensions plus généreuses que leurs petites sœurs déjà citées. On constate bien vite que le groupe n'est pas franchement connu dans le coin : ça bavarde, ça traverse la salle dans tous les sens, on ressent une touche de frilosité par rapport aux set des groupes « locaux ». Petite note d'agacement. Lorsque le set démarre, une autre pointe de regret se fait sentir : nos compères ne sont que deux sur scène et si malgré cela, la volonté de déverser le son de C R O W N tel qu'on le connaît est indéniable, on ne fait pas à deux le job du groupe au complet. La puissance des titres de Natron, comme par exemple "Serpents" fait clairement défaut et l'impact final s'en ressent. Le plaisir reste vif malgré ces écueils, le terrain est familier, les lèvres se meuvent sur des paroles ô combien répétées, les membres s'agitent au rythme des attaques guettées, le cœur palpite volontiers, mais la prestation conservera malgré tout un petit arrière-goût d'édulcorant plutôt que de vrai sel.

Suite avec un second membre de l'estimé collectif Church of Ra. Et c'est pour le set de Oathbreaker, sur la Jägermeister Stage - pourtant la plus grande scène de ce festival - que les mots « mais je vais vous faire bouillir jusqu'à ce que votre chair se décolle ! » s'impriment véritablement dans nos têtes. Le motif d'une telle vindicte ? Le son étouffant qui entame totalement la voix de la pourtant si fascinante Caro. De quoi hurler de frustration tant il faut forcer ses tympans en ce début de set pour percevoir l'ampleur de ses efforts non feints ! Quelle tristesse pour une prestation pourtant attendue avec impatience... Progressivement, heureusement, les balances commencent à s'équilibrer mais ça ne suffira pas à endiguer le sentiment de gâchis initial. Malgré ces difficultés, Oathbreaker montre son appétence pour la scène. Caro, le visage constamment dissimulé derrière son ample chevelure, fascine et se montre, s'offre même dans cette image de l'être totalement habité par la musique. Le quatuor emporte son monde avec lui dans une marée noire et l'on ne demanderait qu'une chose : rester et savourer, dans le spectre complet des éléments déchaînés.

À quelques encablures de là, sur la Eyesore Stage, se prépare la formation instrumentale Maybeshewill. L'accueil chaleureux que lui réserve une frange non négligeable du public tend à démontrer que les Britanniques sont attendus sur leurs terres. Nettement plus apaisé que la plupart des formations au programme du festival, le quatuor délivre des pièces délicates auquel le mur du son dressé par les guitares insuffle une héroïque vigueur. Les sonorités contrastées sont cependant équilibrées et tiennent le set à distance de la dernière copie un peu fade rendue en studio. Néanmoins, on guette en vain les montées en tension qui ont fait la réputation du groupe, comme si les musiciens s'appliquaient d'abord à bien jouer au lieu de se lâcher définitivement. Le rendu est plaisant mais un peu trop poli. Il manque une force, une puissance d'évocation qu'un collectif japonais, instrumental lui aussi, proposera un peu plus tard avec maestria.

Mettant de côté la prestation de The Ocean (très largement savourée deux jours auparavant au Trabendo) pour lui préférer un rapide déjeuner (dîner ? souper ? Mais quelle heure est-il ?), nous embrayons, frisant l'occlusion intestinale (par pitié, faites que ce n'était vraiment pas de la viande dans ce burger « végé » !!!!) sur le set d'Altar of Plagues. Les Irlandais évoluant à deux sur scène, c'est un sample qui fait office de basse. Hélas, celui-ci, réglé beaucoup trop fort, couvre et dénature totalement leur propos musical. En lieu et place du post black metal pesant et onirique hantant les enregistrements de cette formation singulière, une mélasse d'infra-basses sursaturée cueille à froid aficionados et curieux. Une fois le premier morceau achevé (c'est le cas de le dire), le leader pose sa guitare à terre, suscitant un larsen éprouvant, et quitte la scène. Au bout de de deux minutes, ne le voyant pas revenir et échaudés par une entrée en matière aussi catastrophique, nous tournons les talons à notre tour. Sorry, guys.

Au tour de Sólstafir de se présenter sur la Jägermeister Stage. Peut-être faudra-t-il se ranger un jour à l'avis de certains de nos collègues et admettre avec eux que les sets sont quelque peu surjoués et démonstratifs, répétitifs, galvaudés même, mais pour l'heure, rien que pour entendre une énième fois des titres tels qu'"Otta", in situ et de sentir monter l'irrésistible chair de poule qui les accompagne, pas question d'échanger nos places … Sólstafir offre une fois encore une prestation conforme aux attentes. Faudrait-il pour autant se montrer plus exigeant ? Les sets de Sólstafir se ressemblent oui, il faut l'avouer, mais le plaisir reste malgré tout intact. La sensation est toujours la même, cette plongée dans une étrange mélancolie. On pourrait vouloir fuir ce que la musique entraîne comme doux tourment, mais cette sensation est par trop familière, on l'accueille avec joie, les bras ouverts, quand bien même son visage est connu sous tous ses angles et toutes ses courbes.
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Eyesore Stage. Passons outre le bavard du premier rang qui incitera très vite à se retirer à l'arrière de la salle avec un sentiment de groupie déçue. Mettons de côté les bosses récoltées, la faute à un headbanger trop passionné.... Le concert qui se produit à cette heure est celui qui a motivé à lui seul l'excursion dans le Yorkshire. Un écran diffusant sans discontinuer des photographies chargées de sens ; le chanteur Colin H. Van Eeckhout, de manière attendue le plus souvent tourné vers la scène, offrant à la vue de tous la grande croix inversée qui lui mange la totalité du dos : voici les seules brèves images qu'il restera du décorum, car les yeux ne s'ouvriront que de rares fois, lorsque la musique s'arrêtera, priant intérieurement pour qu'elle continue, pour pouvoir retenir un instant de plus la puissante sensation que pour l'heure, seule la musique d'Amenra a été capable de déclencher. L'écoute sur album est une expérience à mener, unique, c'est une plongée dans des recoins de l'esprit que l'on ignore. Mais la prestation live se place bien au-delà encore. On emploie souvent le terme de communion ou de prière pour décrire le sentiment qui s'empare de l'auditeur, mais c'est probablement bien plus que cela. Le voyage intérieur qui se produit est indescriptible. La musique n'est pas juste musique, elle est stupéfiante de « sens », offrant un instant une réalité toute autre, quelques fractions de secondes d'ouverture d'esprit pour qui veut bien se laisser porter pleinement. Les gimmick de surface ne sont rien. Dur, froid, très violent à sa façon, Amenra touche en profondeur et offre, un très bref instant, la sensation paradoxale de tendre la main vers quelque chose de plus essentiel et de sublime. Les mots ne servent à rien ici ; ils ne franchissent plus les lèvres et se cachent, trop faibles, trop pauvres.
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Dernières notes pour clore ce festival. Voici un groupe découvert à peine deux jours plus tôt lors de sa prestation au Trabendo et qui a déclenché une grande impatience à la perspective de les entendre à nouveau. Mono. Se laisser emporter par la houle grondante d'une grâce infinie, quelle plus belle façon de terminer cette si riche journée ? La musique que délivre Mono pourrait se résumer à une lente montée en puissance, de celles qui saisissent un cœur au rythme encore lent et qui vous le propulsent à cent à l'heure. Là encore, aucun visuel de la scène ne reste précisément à l'esprit, si ce n'est une atmosphère tamisée, presque intimiste. Les yeux sont presque toujours clos, tout juste observent-ils quelques instant les amis alentour « partir » également, puis la foule disparaît, le corps n'existe plus et les images se bousculent dans un imaginaire non maitrisé. On se sent tiré en avant, conduit uniquement par ce post rock incomparable, cette grâce infinie, vers toutes le fantaisies et les beautés possibles. Les larmes coulent à flots, on se sent bien et mal en même temps et une fois encore, on refuse que la musique s'arrête, avide de plus, affamé de ces nappes fantastiques qui semblent nous libérer de tout. Juste un instant.



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