Night Fest Metal X 2019


Night Fest Metal X

UN REPORTAGE DE...




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Jour 1 : 19 octobre 2019

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Jour 1 :19 octobre 2019



Le Night Fest Metal X, qu’est-ce que c’est ? Non Patrick, il ne s'agit pas d'une soirée privée dont les participants auraient pour objectif de s'introduire des coups de poing américains dans le rectum sur la foi d'une orthographe défaillante mais de la dixième édition d'un festival de black metal se déroulant à Arlon, commune wallonne située aux confins de la Belgique, du Luxembourg et de l'envie de mourir – petit coucou amical à nos amis Lorrains. Il drache sur les Ardennes – constatation à peu près aussi originale que l'annonce d'une sécheresse au Ténéré – et la bière servie au bar attenant à la salle peinte en noir, qui peut accueillir une deux-centaine de personnes, est bonne : les deux clichés les plus éculés sur la Belgique étant validés, il est temps de se confronter aux émanations rugueuses des huit escouades qui se succèdent devant une audience raisonnablement fournie, mixte – on a même aperçu des jeunes femmes non accompagnées de spécimens masculins, signe incontestable que le monde est en train de muter - et constituée majoritairement de connaisseurs, et donc de connaisseuses, venu(e)s parfois de loin. En tout cas il y a des anglophones – sans doute des fans de rugby bourrés qui se sont fait expulser du Japon où se déroule la Coupe du Monde concomitante et dont le charter du retour était tellement low cost qu'il a été contraint d'atterrir dans un champ à proximité, officiellement désigné sous l'appellation “aérodrome d'Arlon-Sterpenich”.

Plutôt que procéder à un récit strictement chronologique certes conforme au déroulé de la journée mais un poil prévisible – et afin de mettre en lumière la diversité qui irise le black metal, lui-même sous-genre de la grande et foisonnante famille du metal – on vous propose de regrouper les compte-rendus selon le style pratiqué. Ça tombe bien car la programmation se prête idéalement au jeu des couples (non Patrick, ce n'est toujours pas ce que tu imagines).

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Les deux premières prestations peuvent ainsi être aisément associées dans la catégorie des déviants locaux - ou « locos » si on aime les jeux de mots foireux vaguement espagnols. LETHVM (14h30), en charge de balancer la première salve, officie dans un post black/ sludge, angoissant et doom, survolé par les imprécations déchiquetées de Vincent Dessard. Le titulaire du micro impressionne, particulièrement lorsqu'il se fait distinctement entendre sans avoir recours à son accessoire – le terme “distinctement” se rapportant au volume sonore et non à la compréhension des paroles, ces dernières étant inintelligibles tant elles sont maltraitées dans un registre hurlé/ strident caractéristique. La demi-heure durant laquelle opère le quatuor n'est que pesanteur, rage et désespoir et rappelle immanquablement les compatriotes d'Amenra, maîtres respectés du genre - l'aspect cérémonial en moins, un brin de nervosité en plus.

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Quatre ans d'existence et déjà deux LP, dont le dernier en date, Acedia, est sorti une semaine avant le fest : ces jeunes gens pressés, s'ils parviennent à accaparer la scène comme leurs mentors flamands tout en maintenant la tension qu'ils ont instauré à l'Entrepôt, risquent bien de faire parler d'eux au-delà des frontières belges.
Le lien entre le doom orientalisant proposé par WYATT E. (15h30) et le black metal est plus que ténu et pourtant, la formation belge ne fait pas tache sur l'affiche. Sans doute parce que malgré l'apport d'une quatre-cordes, le son développé par cette étrange entité évolue parfois dans des aigus saturés plutôt raccords avec ceux de leurs camarades du jour. Dissimulant leur visage à l'instar des membres de Batushka, Undead Prophecies ou encore Mgła, les musiciens de Wyatt E., tout de noir vêtus, évoluent tels des touaregs en converse crispés sur leurs instruments, guitare, basse, batterie et surtout synthés qui grésillent en boucles.

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Certain(e)s goûtent moyennement ces lentes séquences – très – répétitives dominées par la programmation de cymbales surmixées. D’autres, davantage réceptifs à l’ambiance dépaysante suggérée par ces longues plages hypnotiques, semblent se laisser emporter vers les sphères lointaines et vrombissantes dessinées par les musiciens voilés, dont l’un charge l’atmosphère en contraste constant, à la fois torride et glacial, de quelques hurlements réverbérés. La magie n’aura pas opéré pour tout le monde mais le voyage, intrigant, mérite qu’on le tente.
Le black metal auquel s'adonnent 1914 et Imperium Dekadenz, bien plus conforme aux codes du genre, ne peut que rassurer les aficionados éventuellement déroutés par les deux expériences précédentes. Les premiers nommés (16h45), chantres de la Première Guerre Mondiale, offrent à leur tour un visuel singulier en arborant des tenues d'époque, salopettes en feutre, kilt et surtout blouse de soldat défroqué pour l'« Oberleutnant » Ditmar/ Dmytro Kumar qui arbore un fusil Lebel (français, donc) en guise de pied de micro. Pas de parti pris déplacé de la part des Ukrainiens, qui évoquent l'horreur des tranchées à coups de riff trépidants, passages heavy mélodiques - voire carrément doom - et extraits de ritournelles nasillardes issues de soixante-dix-huit tours crépitants. Totalement impliqué dans son incarnation d'un soldat visiblement atteint de trouble de stress post-traumatique, yeux clos et corps tremblant, Ditmar expectore ses visions d'épouvante au gré des batailles, le visage recouvert de boue – dans ces conditions, le commandement « baïonnette au canon ! Pour la France, en avant ! » qui retentit en prélude de “Verdun” glace les os.

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Ses compagnons, impassibles, alignent les thèmes aussi angoissants qu'immersifs. Et lorsque le vocaliste hébété descend une seconde fois dans la fosse avant de disparaître en coulisses, on se sent soulagé d'être sorti indemne de cette fange putride.
Plus mélodieux, les thèmes épiques déployés par IMPERIUM DEKADENZ (19h20) s'accommodent eux aussi de tempos modérés, entre deux accélérations bien senties. Faisant l'effort de se présenter en français - “nous sommes Imperium Dekadenz, de la Forêt Noire”, Horaz (de son vrai nom Christian Jacob...) se concentre exclusivement sur le chant, le duo qu'il forme avec Vespasian à la guitare étant renforcé par trois autres instrumentistes sur scène, dont un batteur peu avare en rictus. Malgré quelques faussetés durant la première partie et un son en déficit de dynamisme, le set est plaisant, ce que souligne à sa rustre manière un spectateur totalement déchiré qui atterrit lourdement sur un retour après s'être fait porter par quelques « amis » - phénomène d'autant plus incongru que le crowdsurfing n'a guère eu de succès durant le festival. Après un remarquable solo de basse exécuté sur un superbe instrument stylisé, la prestation touche à sa fin. Horaz en profite pour déboucher une bouteille de vin qu'il brandira vers l'assistance aux moments du salut – ça change des binouzes.

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Tout cela est bien joli, mais ça manque un poil d'agressivité, non ? Heureusement pour les amateurs de tabassage en règle, les organisateurs ont invité deux autres gangs germaniques qui vont s'appliquer à les punir, Ultha et Endstille. Qu'est-ce qui est rouge et écrase tout sur son passage ? Non, il ne s'agit pas cette fois-ci de l'actuel résident de la Maison Blanche, mais d'ULTHA (18h00), section de Cologne évoluant dans une pénombre écarlate qui fait son petit effet (en revanche, les photographes nagent en plein cauchemar). Étirant des riffs consanguins sur de longues plages entrecoupées de vocaux furieux, le collectif s'inscrit dans la mouvance d'un black fondé sur la vitesse d'exécution tout en se ménageant de parcimonieuses respirations et en faisant sourdre la mélodie – on n'est pas chez les bourrins. Toutefois, un clavier inaudible et un rendu sonore assez brouillon renforcent la linéarité des morceaux, constat qui ne gêne pas a priori les « trve » fans de black metal orthodoxe qui estiment que leur genre de prédilection devrait toujours ressembler à ça.

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« Bourrins », un qualificatif qu'il est en revanche difficile de dissocier d'ENDSTILLE (23h45), tant le quintet de Kiel avoine sans répit. Enfin des corpsepaints ! Le chanteur, le crâne maculé de (faux ?) sang met beaucoup de rocailles et d'énergie dans sa stridence, au diapason de ses comparses qui ne donnent pas leur part au chien, assaillant leurs cordes sans retenue. Là encore, ceux qui goûtent ce genre de « mur du son » qui cogne en continu doivent apprécier, mais on sent pourtant que ce dernier pourrait claquer encore plus fort, ou tout du moins plus distinctement. Les instruments s'entremêlent en effet dans un maelström grésillant qui ne facilite pas l'adhésion. Phénomène ingrat frappant souvent le dernier groupe se produisant en festival, une fraction non négligeable du public capitule face à l'assaut sonique en cours et quitte la salle après quelques titres.

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Autre catégorie représentée lors de ce festival: les Britanniques du terroir, et plus précisément Winterfylleth et Saor. S'installant sur l'estrade avec près d'un quart d'heure d'avance – comme la plupart de leurs collègues et tant pis pour les retardataires – Chris Naughton et ses acolytes bénéficient d'un son puissant (âprement négocié), idéal pour mettre en valeur les mouvements les plus véloces. Les penchants apaisés de WINTERFYLLETH (20h45) ne sont guère sollicités ce soir – celles et ceux qui espéraient quelques incursions acoustiques dans la lignée du dernier recueil The Hallowing of Heirdom en sont pour leur frais. Pourtant, Nick Wallwork, le bassiste aux cheveux courts ressemblant à Didier Deschamps, se désaltère au cidre – un peu de douceur était donc envisageable. Au lieu de cela, les Anglais, évoluant sans leur claviériste, se montrent déterminés à développer leur black metal froid, onirique et guerrier. Encore plus statiques que leurs colistiers du jour, ils remportent cependant un franc succès auprès du contingent de supporters venus les écouter, démontrant que même en hurlant comme des damnés et en faisant souffrir leurs amplis, les sujets de Sa Gracieuse Majesté, conformément à ce qu'on est en droit d'attendre d'eux, savent allier flegme et professionnalisme.

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Si SAOR (22h10) ne donne pas, loin s'en faut, dans la mollesse, ses petites épopées soniques sont empreintes d'un lyrisme pastoral qui les aèrent agréablement. Dans ce contexte, le violon tire son épingle du jeu, malgré une amorce marquée par une batterie envahissante. Le détenteur du crin-crin, Lambert Segura, vocalise également en chant clair et n'hésite pas à arpenter les planches, pendant qu'Andy Marshall, initiateur du projet dont il est le seul membre officiel, grogne dans son micro, une quatre-cordes entre les mains. Les guitares sont confiées à de talentueux intervenants – superbe solo sur “Monadh”.

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Dans ces conditions, la paire de titres issus de Forgotten Paths, le dernier enregistrement décrié pour sa fadeur, sont nettement plus convaincants à l'épreuve du live... Sauf pour deux papys bedonnants dans le public qui se mettent torse poil avant d'engager une lutte grotesque façon Astérix contre Obélix – pas trop violente, les mecs sont complètement torchés. Cette incartade, si elle n'interrompt pas le récital, excède manifestement Andy Marshall qui jette de l'eau en bouteille sur les olibrius afin de leur signifier sa désapprobation – à leurs débuts et à sa place, les mecs de Mötley Crüe seraient probablement descendus péter les tronches qui posent problème mais ces choses-là ne se pratiquent plus guère de nos jours. On sent pourtant le bouillant Andy prêt à commettre l'irréparable après avoir évité de justesse la canette de bière qui lui était visiblement destinée en retour mais le sosie d'Adil Rami parvient à se maîtriser au prix d'un effort que l'on devine conséquent. Il ne peut s'empêcher cependant de balancer à nouveau de la flotte cinq minutes plus tard dans la même direction, les deux énergumènes faisant encore des leurs. Cet incident mis à part, la performance des Écossais, toute nimbée d'un bleu brumeux, se révèle suffisamment immersive pour contenter les fans et les novices – hormis peut-être les acharnés qui regrettent que flûtes et cornemuses, marqueurs sur album de la musique saorienne, ne soient pas de la partie. Une prochaine fois, qui sait ?


La pluie bat toujours le pavé et la nuit a confisqué la gare mitoyenne de l'Entrepôt, tandis que cessent les hostilités. Le bilan de cette dixième édition du Night Fest Metal ? Largement positif. L'affiche éclectique (du point de vue d'un amateur de black metal, s'entend) a permis de se confronter, et parfois même de s'immerger dans des univers variés et intenses, convoqués par des musiciens de haut niveau. À quelques rares exceptions près le rendu sonore aura été de très bonne qualité et l'auditoire multi générationnel semble ne pas avoir boudé son plaisir, si l'on en croit les mines majoritairement réjouies des festivaliers – qui a dit que les black métalleux étaient des gens sinistres ? L'organisation digne de louanges n'est pas étrangère à cette réussite – vive la nourriture pas (trop) chère et merci pour l'effort envers les végétariens ! - et invite à recommander la prochaine édition du festival. Alors ne croyez pas les mauvaises langues: quand un événement aussi stimulant y est programmé, il fait bon venir à Arlon.

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