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CHRONIQUE PAR ...

98
Tabris
Cette chronique a été mise en ligne le 01 juin 2021
Sa note : 17/20

LINE UP

-Nuclear Holocausto Vengeance
(tout)

TRACKLIST

1) Ambush
2) We Worship
3) Dead Inside
4) Beyond Vision
5) Deep Night 23rd
6) Drawing Down the Moon
7) Sense
8) Temple ov Lykos

DISCOGRAPHIE


Beherit - Electric Doom Synthesis
(1996) - dark metal ambient - Label : Spinefarm record



Avez vous déjà fait l'expérience d'un Kanashibari ? Je trouve fort à propos le sens qu'on lui porte en langue française : « le bras de fer du sommeil ». Vous êtes vous déjà trouvé coincés à la lisière de la conscience, entre rêve et éveil, au point de ne plus avoir la faculté de bouger ? C'est une expérience que je ne suis pas prête d'oublier. C'est un souvenir terrifiant. Et c'est exactement l'effet que produit Electric Doom Synthesis, l'épilogue de Beherit.

L'angoisse. Non point factualisée. Simplement primaire. Intime. Propre à chacun. Sans objet défini. Celle qui vous tient et vous bloque. Cela commence avec "Ambush", la bien nommée. Celle-ci suit le marcheur solitaire que vous êtes devenu lorsque vous avez appuyé sur la touche play. Elle vous suit dans cette nuit poisseuse, comme une insidieuse chose rampante. Vous avancez, en rasant des murs humides, un filet de sueur coulant le long de votre échine. Vous vous retournez sans cesse, car ce qui vous suit, a une voix, qui ne présage qu'une chose : derrière vous, il y a une forme monstrueuse. Et cette voix, vous assène un mantra, perfide : « Say you love me, say you love... ». Et vous ne pouvez pas vous boucher les oreilles. Non. Vous êtes captivé, tenu en haleine. Les motifs obsédants d'"Ambush", répétés à l'envie, sont autant de lueurs sinistres tournant et tournant sans cesse dans vos esprits inquiets. « Say you love me, say you love... Satan ». Ses sons cristallins, mâtinés de sirènes de voiture, vous gardent en alerte, comme une bête effarouchée cherchant la fuite et pourtant, oui, vous avez envie de voir le visage de celui qui vous traque. "Ambush" est une tourmente sonore, un piège qui se referme lentement sur vous, machiavélique. Vous êtes là, jeté au milieu de cette fange gluante, sans issue de secours. Quand soudain... "We Worship" se jette sur vous. "We Worship" n'est qu'une immense gueule, grande ouverte, puante, spongieuse, avide de vous avaler. La piste ne dure qu'un court instant, mais son souffle malsain est aussi terrible que fascinant. Tout comme Kanashibari, elle synthétise en quelques secondes une angoisse primordiale.
Les deux pistes introductives laissent ainsi exsangues. Mais elles ont été posées judicieusement, pour vous apprêter. Car alors se profile le véritable dessein de cet Electric Doom Synthesis. La contemplation du tumulte, la mise en lumière du trauma. Mais la perception de ce dessein dépendra de votre pleine implication dans la suite de cette écoute. Electric Doom Synthésis est une ode à un chaos fait d'industrie. "Dead Inside", et sa mécanique sans concession poseront donc le véritable décors. Son matraquage industriel brillant, dominé par cette voix de sergent major venu des enfers qui déclame ses borborygmes malsains, brosse un tableau noir, plein d’arêtes, de mètres cubes d'acier et de marteaux pillons. Et le sentiment qui s'en exhale est celui d'un avilissement total. A la machine. Cette machine froide, implacable, infaillible. C'est la toile d'un monde synthétique féroce, dont le mouvement est d'une régularité métronomique et dont la seule saillie visible, est cette mélopée de clavier acide qui tranche dans le vif. "Beyond Vision" ira encore plus loin dans le vice. Sis à la frontière du synthétique et de l'organique, sa rythmique martiale se ponctuant des petites notes spongieuses dégueulasses, elle vous laisse la sensation d'une invasion sous-cutanée. C'est ensuite le souffle rauque de "Deep Night 23rd". Où l'on croit s'offrir enfin une fuite. Car les gargouillements de la voix s'éloignent. Ainsi que les masses dévastatrices des machines, qui ne sont plus perceptibles que de loin. Une nappe contemplative prend le dessus, vous enveloppant. Mais elle va croissant et se mue peu à peu en quelque impériosité. Oh, claviers inspirés, presque cantiques ! La frappe des pillons devient alors frappe vocale, marteaux de tellure. Le rythme lent de la pièce ne fait qu'accentuer ici sa profondeur. Tout n'est plus que souffle de braises, jaillies d'une bouche de forge, grande ouverte devant vous. L'image concentrée de souffre de quelque Balrog pourrait aisément venir ici vous hanter.
"Drawing Down the Moon" déstabilise alors, avec son attaque introductive vrombissante typée « il y a fête aux enfers ce soir ». La première partie du morceau, presque trop enjouée, dénote même salement. Mais la piste se développe peu à peu. Tintements cristallins, basse prédominante, chants rituels, pointes d'acidité et, bien présente, cette satanée créature qui se répand en gargouillements immondes... tout est rassemblé pour faire de ce titre la plage d'expression du pur contentement de cette chose rampante et vile qui nous suit depuis le tout début et domine bel et bien l'ensemble de l’œuvre. "Sense" vous imposera de tendre l'oreille. Car elle est le silence de la partition. La piste la plus décriée d'ailleurs. Pour cette raison. Elle n'est qu'une succession de bruits, tout d'abord des sortes de piaillements, puis des raclements, indéchiffrables, inassociables. Elle agace, tant elle s'offre à ce point dénuée de logique. Et ça la rend tout aussi malsaine que les autres. Car on cherche à savoir ce que sont ces bruits. Sans y parvenir. On cherche à comprendre, car on nous le dit dans un ultime murmure : « This is the highest sense of the mind speaking ». "Temple ov Lykos", enfin, la pulsation finale. Reprendre la maîtrise de ses sens ? Mais pourquoi faire ? Il n'est rien à attendre. Non point qu'il n'est plus rien à entendre. Tout au contraire. La pression redescend-elle pour autant ? Oui... Non.. Elle change de nature. L'on se perd dans une contemplation du tout et du rien. Dans des tintements. Dans des frottements. Dans la résonance d'un pouls, trop syncopé pour être vraiment humain et pourtant, trop bien pensé pour ne pas le laisser croire. Dans cette nappe qui soudain s'élève, grave. Dans ces grognements de bête qui s'endort, enfin... à tout le moins, le croit-on. Et dans cette voix de femme, sur laquelle meurt la musique : « It's like a voice. Like a dream. I can dream ». Catharsis.

Electric Doom Synthesis n'est pas un album d'abord facile. D'autant plus qu'il doit impérativement s'affronter d'un seul tenant, faute d'en casser la cohérence. Hautement malsain, terriblement inspiré, il trouble, préoccupe, dégoûte et fascine tout à la fois. C'est une expérience musicale à mener, mais l'esprit averti, car vous serez maintenus par une étreinte de fer et vous pourriez bien perdre pied, vouloir vous retourner pour contempler l'horrible visage de celui qui répand son soufre sur vous.







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