Chronique : Weedpecker III (2018)

CHRONIQUE PAR ...

Merci foule fête
Cette chronique a été mise en ligne le 01 juin 2021

Sa note : 15/20

LINE UP

-Piotr "Wyro" Dobry
(chant+guitare)

-Bartosz "Bartek" Dobry
(chant+guitare)

-Grzegorz "Mroku" Pawłowski
(basse)

-Robert "Falon" Kułakowski
(batterie)

TRACKLIST

1) Molecule
2) Embrace
3) Liquid Sky
4) From Mars to Mercury
5) Lazy Boy and the Temple of Wonders

DISCOGRAPHIE

III (2018)
IV: The Stream of Forgotten Thoughts (2021)

Weedpecker - III

(2018) - rock stoner psychédélique - Label : Stickman Records

Les noms de groupe à base de jeu de mots sur la marie-jeanne incitent naturellement à la méfiance. Après Cannabis Corpse, aussi rigolo qu'anecdotique et les flippants Bongzilla, voici venir Weedpecker, formation polonaise ayant vu le jour en 2012 et dont les deux premiers albums intitulés I et II – à la Van Halen - donnaient dans un stoner élégant (ça veut dire que ça ne braille pas comme chez High on Fire) mais scolaire. Pas totalement satisfaits de ces deux tentatives liminaires, les compatriotes de Nergal annoncent du changement sur leur troisième LP, bien que l'ayant appelé III (plutôt comme Sahg, finalement). Et il faut admettre qu'ils n'ont pas menti.

À première vue, rien ne semble avoir bougé. Outre le titre en chiffre romain, le recueil présente une nouvelle fois de longs et peu nombreux chapitres, cinq en l'occurrence. Pourtant, l'exposition laisse clairement filtrer des indices au sujet d'une évolution par rapport aux débuts du collectif. Sur un tempo alangui résonne une suite d'arpèges lumineux, accompagnés de fugaces nappes d'un orgue semblant tout droit sorti d'un classique d'Amon Düül II - Wolf City, par exemple. Puis retentit le tonnerre électrique de guitares chargées mais pas plombantes, solide écrin du chant séraphique de « Wyro » Dobry, leader du gang psychotrope. Une modulation finale fait muter cette "Molecule" en une émanation rêveuse mais intense, la section rythmique participant discrètement mais activement à l'évocation qui s'évapore en decrescendo. Les quatre autres pistes sont déroulées selon ce modèle de périple contrasté, telle "From Mars to Mercury" qui renoue le temps d'une séquence vigoureuse avec les premières amours stoner de la formation. Les parties apaisées et la voix céleste de Wyro, sorte de croisement de Gaz Coombes de Supergrass et de Matt LoCoco de Transit Method, ont tôt fait de faire dévier l'entité vers les contrées psychédéliques qu'elle cartographie désormais avec l'assurance de l'explorateur ayant trouvé son territoire idéal.
Un léger relâchement, l'euphorie sans doute, se fait sentir au bout du voyage, la troupe de Varsovie n'évitant pas complètement le cliché des bab' enfumés qui enquillent les plans sans trop se préoccuper de la structure du morceau, sur "Lazy Boy and the Temple of Wonders". Néanmoins, une accélération dans le dernier tiers rappelle que les Weedpecker aiment faire saillir les manches de leurs guitares, ainsi en amorce de "Liquid Sky" qui évoque le son et les accords fervents des collègues suédois de Lykantropi - on regrettera toutefois que le délectable thème chanté ne revienne pas une ultime fois après une passe d'armes entre basse protubérante et guitare joyeuse. Le duel est encore plus intense sur "Embrace" où quatre et six-cordes se répondent, s'entremêlent, se cajolent, crissent, discutent en une enivrante cavalcade précédée par une chorale stellaire avant de s'achever dans le va-et-vient délicat des caresses qui s'attardent.

Incarnée dans des compositions où alternent chevauchées fiévreuses et ivresse des songes, la mue psychédélique de Weedpecker est une réussite. Le troisième volet des aventures au long cours des Dobry brothers laisse entrevoir un style racé qui ne se laisse aller ni à la mollesse ni à l'agression gratuite, tout juste à quelques facilités d'écriture qui ne remettent pas en cause le plaisir d'une virée dans les recoins chatoyants de l'imagination. Sans que la consommation d'un quelconque produit hallucinogène ne soit indispensable, il convient de le souligner.