Vous ne pouvez imaginer combien de groupes du style black-barré-n’imp-insert coin j’ai pu avoir en suggestions d’écoute par mon habituel algorithme fournisseur musical officiel, celui qui commence par « S » et finit « y ». Tout ça parce que j’ai fait une fixette sur trois albums de Nocte Obducta et que je continue à tenter de m’approprier le quatrième régulièrement, parce qu’il me fascine par certains côtés. Une proposition pléthorique d’insignifiances, d’inécoutables, d’ersatz sans intérêt et au milieu un petit îlot de répit, une surprise inconnue (par moi) et pourtant ancienne. Même si le présent album date de 2009, le groupe a débuté en 1994. Intéressant pour un vieux nostalgique comme moi. Encore plus intéressant, ils sont lombards. Je n’ai pourtant pas une attirance particulière pour le black italien, même si j’ai été hypnotisé par Sadist à un moment. De plus en plus intéressant, décidément.
Situons quand même un peu le propos. Rien à voir avec Sadist stylistiquement parlant. Et même si le groupe milanais existe depuis le milieu des années quatre-vingt-dix, cet opus de 2009 est leur premier album. Donc rien à comparer avec les Génois. Quoique… La marque de fabrique plutôt «
baroque », les variations de rythme, les incorporations de claviers parfois improbables mais magnifiques, c’est assez définissant du style black italien, du moins celui qui m’interpelle. Si c’est pour refaire du black à la nordique, autant rester en Europe du nord, donc restons méditerranéen, même s’il est vrai que le rapprochement avec les Allemands de Nocte Obducta est pertinent dans la construction des morceaux, dans l’alternance entre violence et éther, dans le chant, et dans la longueur de certains titres. Autant prévenir, ils sont plutôt longs avec deux à plus de treize minutes (dont un avec un trou de cinq minutes) et plusieurs entre sept et neuf minutes.
Autant prévenir également, le growl est black et extrêmement guttural. Oui, dégueulasse, on peut le décrire aussi comme ça, et vous savez combien j’adore ce genre de growl, je l’ai déjà écrit dans mes chroniques de Nocte Obducta. Malgré les analogies, Mystical Fullmoon reste plus imprévisible. Très «
avant-garde » et progressif, parfois furieux, avec des claviers très présents par passages, des portions jazzy dans “Opening the Shrine of Janus” qui ouvre sur un interlude du même style ajoutant un saxophone ("Daleth: Journey (Visio in Yule)"). Moi qui déteste ce style, je suis plutôt surpris d’arriver au bout, pour déboucher sur la belle intro doom black de "Omen (Capricorn Vibe)" qui recèle un passage
« façon » orgue des plus magiques en son milieu. Cette même «
façon » que l’on retrouve sur "Progression ov Thee Revelation: Nigredo in Mars". Le titre probablement le plus parlant quant à la musique du Mystical Fullmoon de cette époque est "As I Walk Along the Darkest Paths of My Soul" qui regroupe toute l’essence du groupe, avec breaks progressifs, belle mélodie, violence et claviers.
J’aurai mis pas mal de temps à transformer l’étincelle qui m’a attiré vers Mystical Fullmoon en vrai feu. C’est dérangeant au départ, cela part un peu partout, mais au final il y a de l’unité, et la présence grandissante des claviers sur certains morceaux a fini par venir à bout d’une certaine forme de résistance mentale à l’inhabituel. Et nous sommes en 2023, pensez donc à la réception de ce truc en 2009. Alors c’est sûr, cela ne plaira pas à tous les amateurs de black classique, il faut être prêt à la différence, à l’absorption de moments très beaux et à d’autres assez laids qui néanmoins sont indissociables. Et accessoirement accepter les claviers parfois planants, parfois electro ou transe dans le black metal, et ce n’est pas une mince affaire pour les purs et durs dont je ne fais pas partie.